Tour de France 2017 : Uran vainqueur par chaos
Le Tour et ses injustices, le Tour et sa cruauté qui fait aussi sa beauté. Richie Porte, vainqueur potentiel qui chute lourdement, Fabio Aru qui porte une attaque déloyale, Romain Bardet qui prend tous les risques pour se faire finalement rattraper dans les derniers kilomètres, Warren Barguil ,échappé au grand coeur encore là pour disputer le sprint final qui lève le bras en pensant avoir gagner...
La galère d'Arnaud Demare était annonciatrice. Ce dernier savait que ce serait dur, mais peut-être pas à ce point. Après à peine 300 mètres, le champion de France était déjà décramponné ! Le début d'une lente et terrible agonie... D'autres Français étaient plus en jambes et, dès les premiers pourcentages, une échappée XXL se formait, parmi laquelle se trouvaient notamment Pinot, Barguil, Vuillermoz, Voeckler, Rolland, Chavanel ou Gallopin. Et tandis que la pluie, annoncée, ne déjouait pas les prédictions et commençait à s'abattre dans les lacets jurassiens, les premières victimes tombaient au champs d'honneur. Gesink et Mori étaient les premiers fauchés par le bitume glissant. Puis, dans le descente du Col de la Biche, premier HC de la journée, Geraint Thomas, 2e du classement général, chutait lui aussi lourdement ! Le Gallois abandonnait ses coéquipiers de la Sky, son leader Chris Froome et surtout ses espoirs de finir le Tour.
Barguil attendait son heure
Contador et Quintana, eux aussi piégés par la chaussée, s'en sortaient beaucoup mieux que Thomas et c'est en accompagnant le peloton de tous les favoris qu'ils gravissaient le monstrueux Col du Grand Colombier et ses passages à 22%. A l'avant de la course, le groupe de tête se réduisait et se recomposait au gré des différentes difficultés mais, au final, c'était bien deux hommes qui parvenaient à se faire la belle : Tony Gallopin, formidable de courage après son début de Tour en souffrance suite à une blessure au pied, et Jan Bakelants. Le Belge d'AG2R lâchait bientôt prise dans l'ascension du Mont du Chat, laissant filer la souris Gallopin. Derrière le coureur de la Lotto, Warren Barguil restait en embuscade et, faisant sa classe naturelle, il reprenait, et déposait, son compatriote.
Dans le même temps, le Tour vivait un des psychodrames qui font sa légende : Alors que Chris Froome connaissait un problème mécanique et levait la main pour demander à être dépanné par son équipe, Fabio Aru, qui ne pouvait pas ne pas avoir vu le geste de l'Anglais, plaçait une attaque ! Une manoeuvre qui ne manquera pas de faire jaser dans les prochains jours... Quintana, Porte et Bardet étaient les premiers à emboîter le pas à l'Italien mais, après quelques centaines de mètres de chaos, Froome épaulé par un team Sky impressionnant, revenait au train. Et ruminait sa revanche en silence. Le monde du silence, Alberto Contador, lui, y plongeait doucement. A 34 ans, le "Pistolero" n'avait plus rien dans le barillet et voyait ses rivaux s'envoler inexorablement.
L'attaque d'Aru en vidéo
Tandis que Barguil jetait ses dernières forces sur le bitume, Froome passait à l'offensive. D'abord en coupant un peu sèchement la route à Aru pour lui faire comprendre qu'il n'avait pas apprécié son geste, ensuite en plaçant quelques accélérations qui étiraient les derniers survivants du Groupe Maillot Jaune. A force de faire l'élastique, Nairo Quintana "pétait". Le Colombien, décidément en difficulté, était le seul des favoris à céder du terrain dans l'ascension du Mont du Chat. Mais c'était la descente qui allait faire le plus gros dégât. Richie Porte, peut-être le plus sérieux rival de Froome, manquait un virage et tirait tout droit pour percuter de plein fouet la paroi rocheuse, emportant avec lui le pauvre Dan Martin ! La violence du choc était absolument terrible et l'Australien, évidemment contraint à l'abandon, pouvait s'estimer heureux de rester conscient...
La descente permettait aussi à Romain Bardet de jouer les équilibristes de génie et de fausser compagnie à Froome, Aru, Fulgsang, Uran et Barguil. Le coureur d'AG2R filait vers Chambéry mais il peinait à creuser un véritable écart avec le groupe Maillot Jaune. Tant d'efforts pour rien, ou presque : le Français était repris à 2,5 kilomètres de l'arrivée par les poursuivants emmenés par Fulgsang. Il était encore là pour disputer le sprint final mais la victoire se jouait entre Barguil, exsangue mais toujours présent, et Uran ! Pour quelques millièmes, le Colombien privait le Tricolore d'une magnifique victoire mais il prenait aussi une belle revanche sur le sort et sur le coureur de la Sunweb qui l'avait battu à la photo finish lors de la Vuelta 2013. Le Tour est cruel mais il sait aussi parfois faire preuve de justice.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.