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Tour de France à huis clos ? L'édito "Foule sentimentale"

Mercredi la Ministre des sports a évoqué l'idée de maintenir le Tour de France mais ce dernier pourrait alors se dérouler à huis clos. On comprend bien l'idée du "show must go on", de l'institution plus forte que le virus, mais le Tour sans spectateur est-ce encore le Tour ?
Article rédigé par Julien Lamotte
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 2min
  (BETTINI LUCA / BETTINIPHOTO)

"Ne courez pas à côté des coureurs !" Si la proposition de Roxana Maracineanu venait à être validée, les commentateurs du Tour de France n'auraient plus à psalmodier cet avertissement devenu culte. Pas plus qu'on ne verrait la queue du "Diablo" ou les fesses de certains spectateurs en quête de notoriété passagère ou de bronzage intégral. Au-delà de ces terribles privations, il faut bien reconnaître qu'une Petite Reine séparée de ses millions de prétendants c'est toujours un peu triste.

Il faut imaginer Thibaut Pinot arracher le bitume au pied du premier lacet de l'Alpe d'Huez pour tenter de grappiller les quelques secondes qui le séparent du Maillot Jaune, le Français est littéralement porté par la foule, il fend une marée humaine, tout le pays est là, derrière lui, qui le pousse et le sublime... et bien non, Thibaut est seul sur son vélo, avec le seul tintement des cloches des vaches pour l'accompagner dans son effort. Surréaliste non ?

Passe-moi le sel

Le Tour ce sont évidemment les coureurs, leurs exploits, leurs souffrances, mais c'est aussi le public. Ce dernier est indissociable du peloton, il est le sel de l'épreuve, celui qui la relève, qui lui donne tout son goût. Priver la compétition de ses spectateurs c'est la vider de son sens. Dernier bastion populaire gratuit, la grand-messe de juillet réunit une foule qui se presse sur les bords des routes autant pour encourager Julian Alaphilippe que pour espérer gratter un bob Cochonou ou faire la fête avec ses voisins de caravane. Bref le Tour c'est un état d'esprit. Et à huis-clos, l'ascension du Tourmalet prendrait presque des allures de Tour malaise...

En soumettant cette idée, Roxana Maracineanu applique les consignes de distanciation sociale mais, sans le social justement, plus de Tour. Il faut pourtant reconnaître le volontarisme de la Ministre qui sait que l’épreuve, même sur des routes désertes, reste un monument, un symbole d’identité nationale. Plus que ça même, en ces temps d’incertitude et d’angoisse, le Tour peut jouer un rôle de refuge et d’exutoire pour des millions de spectateurs en mal d’émotions positives.

La quarantaine non rugissante

Mais ces derniers vibreront-ils autant sans les viva d’une foule placée en quarantaine, sans cette vision du coureur qui déchire un nuage de fumigène et zigzague entre les supporters, sans cette atmosphère joyeusement bordélique typiquement française? A vouloir se couper de son public, le Tour de France risquerait alors de devenir un Tour d’errance.

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