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Le Tour des Émirats arabes unis, de simples paysages de carte postale pour attirer les touristes ?

Ce dimanche débute le deuxième Tour des Émirats arabes unis, anciennement divisé entre le Tour de Dubaï et le Tour d’Abou Dhabi. Pendant sept jours, de beaux noms du cyclisme mondial vont traverser les paysages de cet État du Moyen-Orient pour une des étapes de l'UCI World Tour. Alors que la pratique du vélo est faible dans la région, les compétitions s’y multiplient notamment pour attirer les touristes. Mais l’UAE Tour ne se résume pas à cela et d’autres enjeux se cachent derrière ces paysages de carte postale.
Article rédigé par Denis Ménétrier
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 6min
 

Après le Saudi Tour, les fans de cyclisme vont (re)découvrir, devant leur téléviseur, les décors que peuvent offrir le Moyen-Orient avec les Émirats arabes unis qui accueillent pour la deuxième année l’UAE Tour. En suivant sur sept étapes les Christopher Froome, Primož Roglič, Alejandro Valverde ou encore David Gaudu traverser les montagnes de Jebel Hafeet ou le barrage de Hatta Dam, les téléspectateurs seront peut-être convaincus de réserver leurs futures vacances pour une expédition aux Émirats arabes unis. C’est en tout cas l’un des objectifs initiaux de ce tour, qui a réuni dans l'un de ses logos de présentation une partie des monuments du pays à ne pas rater.

"Les tours organisés au Moyen-Orient permettent de montrer le véritable visage de ces pays, explique Kévin Veyssière, fondateur du site FC Geopolitics. On parle souvent de ces derniers en termes d’investissements économiques alors qu’ils ont un vrai patrimoine culturel avec des paysages de carte postale." Oman, pays voisin des Émirats arabes unis, a été le premier en 2010 à organiser un Tour afin d’attirer les touristes. "Le plus proche de cette idée de carte postale, c’est bien le sultanat d’Oman", assure Raphaël Le Magoariec, doctorant à l’université de Tours et spécialiste des politiques sportives des États du Golfe.

Viser des touristes majoritairement occidentaux, donc, mais pas que. L’organisation de ces tours permet également aux différents pays de s’affirmer sur la scène internationale grâce à une "diplomatie sportive". C’est la raison pour laquelle le Qatar, qui mise sur ce type de politiques depuis le milieu des années 1990, a été le premier pays du Golfe à organiser un tour cycliste, dès 2002. Avant d'y renoncer en 2016 pour se concentrer sur l’organisation de sa Coupe du monde de football 2022. L’Arabie Saoudite a également décidé de lancer son propre Saudi Tour, dont la première édition a eu lieu il y a un mois.

Initiative de santé publique

Pour les Émirats arabes unis, rayonner sur la scène sportive internationale est une chose, le pays s’illustrant davantage au niveau global par son arsenal militaire impressionnant pour un si petit état. Mais impacter sa population locale en est une autre. Comme dans l’ensemble des populations du Moyen-Orient, les Émiratis ne sont pas des grands passionnés de cyclisme, loin de là. "Le modèle d’urbanisme à l’américaine qui s'est développé dans le pays rend difficile la pratique du vélo", explique Raphaël Le Magoariec. Les populations locales, qui vivent dans des villes dignes de Los Angeles de par leur superficie, se déplacent donc majoritairement en voiture et ne font que peu de sport au quotidien.

Ajoutez à cela des pratiques alimentaires copiées sur le modèle du pays de l'oncle Sam et un climat désertique peu propice à l'activité sportive, et le résultat est le suivant : les Émirats arabes unis et d’autres pays du Golfe connaissent un réel problème d'obésité au sein de leur population. En 2016, 67,8% des Émiratis étaient en surpoids selon l’Organisation mondiale de la santé. Un pourcentage en constante augmentation depuis que les données sont recueillies. C’est à peine moins que les États-Unis, qui comptaient 67,9% de sa population en surpoids la même année. Le développement du cyclisme aux Émirats répond donc également, en plus de la volonté d'attirer des touristes et de rayonner sur la scène internationale, à un problème de santé publique.

Un cyclisme basé sur le bien-être

"Le cyclisme permet de véhiculer les valeurs du sport, comme le dépassement de soi, souligne Raphaël Le Magoariec. Mais aux Émirats, on cherche à favoriser le bien-être davantage que la performance. Le vélo est vu comme un loisir qui ne demande pas trop d’effort. Ça peut être vendu comme un outil de promenade." Et avec le modèle d'urbanisme qui rend sa pratique complexe, les décideurs locaux trouvent des solutions alternatives : l’ouverture, par exemple, du circuit de Yas Marina d’Abou Dhabi aux cyclistes. Dernier Grand Prix de la saison de Formule 1, la piste est réservée le reste de l’année à ceux qui souhaiteraient s’essayer au vélo. Un sport qu’a aidé à populariser Mohammed Ben Zayed, prince héritier d’Abou Dhabi et homme fort des Émirats, en faisant quelques tours de circuit en 2013.

Pour pérenniser ce modèle, et espérer voir sa population adopter la pratique du vélo - les expatriés sont ceux qui s'adonnent le plus à cette activité pour le moment -, les Émirats arabes unis tentent d’accroître l’attractivité de l’UAE Tour. Avec deux étapes de montagne cette année et de beaux noms au plateau - Tadej Pogacar, Arnaud Démare, Adam Yates, Fernando Gaviria en plus de ceux déjà cités -, l'UAE Tour pourrait gagner en audimat. En sponsors également, les Émirats profitant de retombées financières avec l’organisation de ce tour mais également de sa Team Emirates (ancienne Lampre rachetée en 2016) pour porter le nom - ou la marque - du pays à l'étranger. En attendant de voir si les externalités positives attendues de cette compétition porteront leurs fruits dans les années à venir, l'UAE Tour prendra son départ ce dimanche à 10h (13h heure locale) de la pointe de Dubaï, dans le palmier Jumeirah, autre haut-lieu touristique du pays.

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