Paris-Nice - Tirreno-Adriatico: le match
Après deux mois de courses mineures (excepté le Tour Down Under), le peloton cycliste entre de plain-pied dans le haut du panier du calendrier à l’occasion de Paris-Nice puis de Tirreno-Adriatico. Proches d’un point de vue calendaire, les deux courses n’arrêtent pas là leur ressemblance. Disputées sur une semaine, ces épreuves présentent des parcours de grands tours en modèles réduits. Sprint, contre-la-montre, arrivée en côté courte, arrivée en montagne, tout y passe pour ravir l’ensemble du peloton professionnel qui voit en Paris-Nice et Tirreno-Adriatico, des terrains de jeu idéals pour aborder un moment-clé de la saison. Comment se démarquer par rapport à sa rivale quand vous vous ressemblez autant ? C’est le casse-tête que doivent résoudre chaque année Amaury Sport Organisation (à Paris-Nice) et RCS Sport (pour Tirreno-Adriatico).
Grimpeurs vs puncheurs ?
De tout temps, le parcours des deux courses a semblé être le meilleur moyen de les différencier. Bien que très ressemblants, à y regarder de plus près, les deux courses ont des philosophies différentes. A Paris-Nice les grimpeurs presque purs, à Tirreno-Adriatico, les puncheurs plus en explosivité. Bien qu’évitant la plupart du temps les Alpes, la « Course au soleil » a tendance à privilégier les ascensions longues alors que la « Course des deux mers » cherche sans cesse de nouveaux « raidards » à offrir aux amoureux des pourcentages. De même, la longueur des contre-la-montre est différente sur les deux épreuves. Paris-Nice n’hésite que rarement à planifier une épreuve solitaire longue alors que si la course italienne s’est souvent achevée par un contre-la-montre, celui-ci n’excède pas souvent les 20 kilomètres. Deux philosophies différentes donc. Qui attirent inévitablement des prétendants différents.
Il suffit de jeter un coup d’œil aux palmarès des deux épreuves pour comprendre la distinction. Si Vincenzo Nibali (double tenant du titre) et Cadel Evans ont remporté les trois dernières levées de « Tirreno », les vainqueurs précédents se nomment Cancellara, Dekker, Bettini, Freire ou si l’on remonte encore plus loin, Rebellin (l’un quatre à avoir remporté les deux courses en compagnie de De Vlaeminck, Zoetemelk et Rominger), Bartoli ou De Vlaeminck (recordman de victoires avec six consécutives dans les années 70). Pas forcément des coureurs capables de briller sur des acensions plus longues, contrairement à Porte, Wiggins, Contador, Indurain ou encore Merckx titrés à Nice.
A qui le meilleur plateau ?
Pour que les spectateurs (mais aussi les sponsors) se régalent, il faut un plateau alléchant. L’an dernier, Tirreno-Adriatico était allé trop loin (à l’image du Giro) dans la difficulté du parcours en proposant aux coureurs le « Sant'Elpidio a Mare », un mur avec des passages à près de 30% à escalader trois fois lors de la sixième étape. Une difficulté extrême qui avait fait polémique et qui n’avait pas reçu l’approbation des coureurs après coup. Oui mais cette édition 2013 de Tirreno-Adriatico s’est achevée avec un podium royal Nibali-Froome-Contador quand Paris-Nice sacrait Richie Porte devant Andrew Talansky et Jean-Christophe Péraud. Pas tout à fait la même dimension.
Parfois délaissée par les têtes d’affiches du peloton, Tirreno-Adriatico a refait son retard au point de commencer tout doucement à supplanter sa rivale française. Pour l’édition 2014, Porte, Betancur, Van Garderen, Gerrans, Nibali, Boonen, les frères Schleck et Degenkolb seront au départ de Mantes-la-Jolie quand Gesink, Mollema, Sagan, Greipel, Kittel, Evans, Uran, Martin, Kwiatkowski, Quintana, Froome, Wiggins, Contador, Kreuziger ou encore Cancellara seront à Donoratico en Italie. Victoire sans appel donc pour Tirreno-Adriatico dont le plateau est impressionnant pour cette nouvelle levée.
Le « soleil » ou les « deux mers » avant la « Primavera » ?
Paris-Nice, Tirreno-Adriatico, laquelle de ces deux courses est la meilleure pour aborder le premier grand rendez-vous de la saison, à savoir Milan-San Remo ? Si sur la décennie précédente, la « Course des deux mers » semble tenir la corde, la « Course au soleil » commence tout doucement à revenir dans le match.
Milan-San Remo, la course la plus longue de la saison (près de 300 kilomètres), l’un des cinq monuments du sport cycliste (avec le Tour des Flandres, Paris-Roubaix, Liège-Bastogne-Liège et le Tour de Lombardie), un bijou que tous les grands coureurs veulent approcher. Et pour résister à la longueur, aux conditions parfois dantesques, comme en 2013, et au final piégeux, il faut une condition optimale. Pour ce faire, un passage par l’une des deux courses à étapes semble être inévitable. Seuls deux coureurs sont parvenus à lever les bras sur la Via Roma sans passer par Paris-Nice ou Tirreno-Adriatico, il s’agit de Moser en 1984 et Chiappucci en 1991. Mais existe-t-il une préparation optimale ?
La dernière décennie tend à montrer que la course italienne est la meilleure pour préparer la « Primavera ». Sur les vingt dernières éditions, seulement quatre vainqueurs (Jalabert en 1995, Tchmil en 1999, Goss en 2011 et Gerrans en 2012) sortaient de Paris-Nice quand les 16 autres venaient de disputer Tirreno-Adriatico. Un tel écart ne peut s’expliquer que par le hasard. Est-ce la proximité plus proche de « Tirreno » qui fait arriver en meilleure condition à Milan ? Toujours est-il que désormais il est de notoriété publique que la « course des deux mers » prépare mieux à Milan-San Remo ce qui accentue encore l’écart de prestige entre les deux courses depuis quelques années.
Un écart que Paris-Nice va devoir réduire sous peine de voir la « course au soleil » subir l’ombre de sa rivale italienne.
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