Nuits de Fourvière : le joyeux et délirant manifeste écologique de Camille et Robyn Orlin ouvre le festival de Lyon
Avec "Alarm Clocks", un détonant concert-performance, la chorégraphe sud-africaine et la chanteuse française ont inauguré mardi 1er juin les deux grands événements culturels de la capitale des Gaules, les Nuits de Fourvière et la Biennale de la danse.
Il y a des spectacles qui font du bien. Il y en a d’autres qui font encore plus que cela. Qui vous remplissent de joie, d’émotions et de réflexions. C’est exactement ce que procure Alarm Clocks, le nouveau spectacle monté conjointement par la chorégraphe sud-africaine Robyn Orlin et la chanteuse française Camille.
Présentée en première mondiale à Lyon, la performance musicale et chorégraphique a ouvert ce mardi 1er juin les Nuits de Fourvière et la Biennale de la danse. Sur les pierres du Théâtre antique, quelques 1000 spectateurs ont pris place, respectant à la lettre les distances sanitaires imposées par le protocole. Mais derrière les masques, les sourires se devinent. "C’est essentiel d’être ici ce soir !", assure une spectatrice. Une joie partagée par les organisateurs des deux grands événements lyonnais: "On est heureux d’être là !", déclarent d’une même voix Dominique Hervieu et Dominique Delorme. La saison des festivals est lancée, Alarm clocks sonne le réveil de la culture et des consciences.
Un plaidoyer pour l'eau
Ébouriffée, comme sortie d'un trop long sommeil, la chanteuse Camille ne peut réprimer un sanglot d'émotion lorsqu'elle monte sur l'immense plateau noir installé dans le théâtre romain de Fourvière. Au départ, elle devait être entourée du chœur sud-africain les Phuphuma Love Minus. Empéchés par la pandémie, les chanteurs ont dû enregistrer leur partie qui lance le récital. "Robyn m’a demandé des chansons qui parlent d’eau”, explique Camille en ouverture. Un spectacle sur l'eau, mais sans eau. Un manifeste engagé pour dire le dérèglement climatique qui secoue la planète. Le manque d'eau sur le continent africain, les inondations qui frappent partout dans le monde, mais surtout la pollution aux plastiques dans les océans.
Et pour signifier l'absence, le débordement et le trop-plein, Robyn Orlin a choisi pour seul décor une immense robe à la traîne cousue d’étoffes techniques.
Sacs poubelle, vieux anoraks, patchwork de tissus synthétiques en tous genres, la parure avec laquelle Camille doit jouer est chargée de messages. Un cri d'alarme pour mobiliser, avant qu'il ne soit trop tard, autour des océans. "En Afrique du Sud, quand nous trouvons du plastique, nous l'utilisons, nous travaillons avec... Camille n'en utilise jamais, donc c'était intéressant de l'obliger à avoir une relation avec cette matière" explique la chorégraphe.
Deux imaginaires extravagants
Liées par une même complicité créative "délirante", Camille et Robyn Orlin explorent dans Alarm Clocks les combinaisons vocales et corporelles. Connue pour ses spectacles hauts en couleur, la chorégraphe sud-africaine trouve en Camille son double artistique. "Ce recyclage, ça donne quelque chose de très iconoclaste, de très coloré, ça m'évoque l'Afrique du Sud, c'est assez joli de plonger dans son monde. C'est comme si je découvrais son pays que je n'ai jamais visité," explique la chanteuse à propos de l'esthétique de Robyn Orlin. "Je travaille avec une chorégraphe et... il n'y a pas de chorégraphie" s'amuse-t-elle avant de s'élancer dans d'improbables entrechats et autres figures de danse classique.
Sur scène, allongée sur le sol, pendue à un trapèze ou engoncée dans son costume de plastique trop lourd, Camille égrène a cappella un répertoire directement lié à l'eau. On y entend ses propres chansons, Jolie Bruine, Piscine, Wet Boy, mais aussi une comptine de notre enfance, un morceau rock du groupe Garbage, la chanson populaire américaine Cry me a river et le magnifique Lac Saint-Sébastien d'Anne Sylvestre. Captée par des caméras disposées en hauteur sur le plateau, la chanteuse n'hésite pas à jouer avec son image projetée sur un écran géant.
Interpellant avec humour le public, pleinement engagée dans sa performance ouverte à l'improvisation, à la fois immense et minuscule au milieu de cet océan abyssal, Camille nous embarque dans un conte où l'imaginaire ratrappe bien souvent la réalité. "Je suis une source qui chante, vous êtes tous des sources", souffle-t-elle en ultime message d'espoir.
La Biennale de la danse et les Nuits de Fourvière proposent deux autres spectacles en partenariat. "Omma" de Josef Nadj les 9 et 10 juin et "Room with a view" par la compagnie La Horde et le compositeur électro Rone, les 13 et 14 juin.
Quant au défilé qui se déroule habituellement dans les rues de la ville, il sera présenté cette année dans le théâtre antique de Fourvière les 5 et 6 juin, mais ouvert uniquement aux familles des participants. Il sera diffusé sur les antennes de France 3 Rhône Alpes Auvergne.
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