Dopage : des propositions, mais pas de noms
Cette audience au Sénat était attendue. Les noms d'Ullrich et de Pantani avaient déjà filtré dans la presse mardi soir, mais la lumière sur la totalité des sportifs concernés par ce rapport, espérée, n'est pas venue. "Je ne connais pas les noms de personnes qui y figuraient", a déclaré Jean-François Humbert, son président. "Cette fameuse liste n'est pas une liste de sportifs. C'est la publication des bordereaux de prélèvements concernant les Tours de France 1998 et 1999. Nous avons à l'unanimité décidé de publier en annexe cette liste de bordereaux concernés", a précisé dans la foulée le rapporteur de la Commission, Jean-Jacques Lozach. Récupérés grâce au concours du ministère des Sports et mis en relation avec les résultats des réanalyses effectuées de manière anonyme fin 2004 par le laboratoire de Châtenay-Malabry à des fins de validation de son test de détection de l'EPO, ces bordereaux n'ont pas été évoqués ou seulement en surface par la commission.
Après des mois de travail, 63 auditions pour près de 70 heures de conversations, les révélations n'ont donc pas été celles attendues. Pendant près d'une heure, Jean-François Humbert et Jean-Jacques Lozach ont multiplié les sous-entendus sur le cyclisme et les autres sports - "afin de lever le nez du guidon" - sans aller au bout de leur démarche. "Nous ne sommes ni policiers, ni magistrats", a souligné le président qui laisse donc le soin aux journalistes de faire ces révélations. Elles sont tombées quelques heures plus tard: Erik Zabel (maillot vert 98), Mario Cipollini (deux fois vainqueur d'étapes en 98 et quadruple vainqueur d'étapes en 99) Andrea Tafi, Bo Hamburger, Abraham Olano (6e du Tour en 99), les Français Laurent Desbiens, maillot jaune pendant deux jours, Jacky Durand, qui avait publié une tribune mardi soir et Laurent Jalabert... En revanche, contrairement à l'information parue dans Le Monde mardi soir, le troisième du Tour 98, l'Américain Bobby Julich ne fait pas partie des cyclistes ayant eu recours à l'EPO avec certitude, a indiqué l'AFP après avoir pris connaissance du rapport.
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Sept piliers pour 60 propositions
Malgré "les difficultés du monde du sport à parler de ses pratiques" et le sentiment d'injustice éprouvé par certains sports "particulièrement ciblés" comme le football et le rugby - et finalement peu abordés par les sénateurs - , la commission a pu présenter le résultat de son travail. Ces 60 propositions pour améliorer la lutte anti-dopage qui s'articulent autour de 7 piliers : la connaissance ("on ne combat bien que ce que l'on connaît bien") ; la prévention et la sensibilisation des sportifs amateurs et professionnels notamment dans les salles de musculation, cible de la commission ; la politique des contrôles ; les analyses ; les sanctions disciplinaires ; les politiques pénales et la coopération.
Au coeur de leur étude, l'AFLD, l'Agence Française de Lutte contre le Dopage, basée à Chatenay-Malabry. Il faut "confier à l'AFLD la compétence en matière de prévention du dopage, en la chargeant de la coordination des politiques régionales, de l'animation des AMPD (Antennes Médicales de Prévention du Dopage, ndlr) via son correspondant interrégional, et de la gestion du numéro vert", ont proposé les sénateurs. L'AFLD changerait de nom pour devenir "l'Agence de prévention et de lutte contre le dopage". Les sénateurs souhaitent également que, dans un souci d'impartialité, les fédérations sportives se désengagent du processus de sanctions pour confier à l'AFLD le pouvoir de sanction "dès la première instance", évitant ainsi les fréquents aller-retour entre les fédérations et l'agence.
Des pressions, donc pas de pression
Interrogés sur cette "fameuse liste", les sénateurs ont exprimé leur peu d'intérêts "à révéler ces informations et à salir (des) réputations, si réputation il (y) avait". Quant aux suspicions nées du "niveau de performances" de Christopher Froome, vainqueur du 100e Tour de France dimanche, ils ont déclaré qu'elles n'étaient "pas légitimes, ni justifiées". "Mais qui sait si dans 3 ans, 5 ans, elles seront peut-être légitimées. Par quoi? Par des contrôles et des analyses" a insisté Jean-Jacques Lozach, le député de la Creuse et rapporteur de la Commission. Un moyen de mettre l'accent sur la nécessité de l'existence des contrôles rétrospectifs. Enfin, les sénateurs ont tenu à mettre les choses au clair sur d'éventuelles pressions. "Je n'ai subi aucune pression, si ce n'est journalistique pour donner des noms", a martelé Jean-François Humbert. Au contraire du rapporteur Jean-Jacques Lozach qui lui en a reçu "beaucoup, mais des contradictoires". "Les unes pour publier les noms et les autres pour ne rien dire, du coup elles s'annulaient", s'en est-il amusé. Des pressions vaines donc, qui n'ont, toutefois, pas empêché les fuites dont le président de la commission s'est agacé. Et presque inutiles devant le peu de révélations de cette commission.
Le Sénat révèle son rapport sur le dopage
Le sénateur Lozach parle du dopage
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