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Du bonheur plein de regrets pour les Bleues

"La vie est toujours belle", lance Bruno Bini, le sélectionneur de l'équipe de France féminine, éliminée en demi-finales de la Coupe du monde par les Etats-Unis. Une phrase habituelle pour lui, mais aussi reprise par ses joueurs lorsqu'Elodie Le Sommer dit que 'on n'a pas à rougir". Avec une pointe de frustration: "On a manqué de réalisme parce qu'on les a dominées et baladées dans le jeu, on a eu plus d'occasions", regrette Ophélie Meilleroux.
Article rédigé par Thierry Tazé-Bernard
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 5min
 

C'est la meilleure équipe du monde. Ce sont les doubles championnes olympiques en titre. Elles disputaient leur sixième demi-finale de Coupe du monde en autant d'éditions. Et la France a bien failli faire tomber l'ogre américain. Et les Américaines n'en disconvenaient pas, à l'image de la buteuse-tueuse Abby Wambach, rendant un hommage vibrant: "La France est une des meilleures équipes contre qui j'ai eu à jouer depuis très longtemps. Leurs cinq ou six joueuses offensives sont très fortes. Par moments, elles jouaient comme j'aurais aimé que l'on joue. Elles ont été tellement bonnes... Il faut leur reconnaître cela. Il y a eu près de 50 minutes où c'était elles qui donnaient le tempo, elles étaient au-dessus. Et je me demandais vraiment comment nous allions pouvoir marquer. Mais c'est notre expérience qui a prévalu."

De l'expérience, du réalisme, voilà le cocktail qui a mis fin au parcours de ces Bleues qui découvraient pour la première fois une demi-finale d'une compétition internationale. "Elles ont tellement de puissance", admirait Bruno Bini. "Nous nous sommes battus avec nos armes. Techniquement on a été bien, on a péché dans les tirs, on n'a pas assez cadré. Au bord du terrain, on sentait une intensité exceptionnelle. On a eu notre chance. On a fait du jeu, il ne nous a pas récompensé. J'accepte ce que le jeu nous donne." Du jeu, les Françaises en ont fait durant pratiquement tout ce match, mais plus encore pendant tout ce Mondial et avant-même avec les qualifications. Des performances qui ont ouvert les yeux du grand public, qui ont attiré l'intérêt et la sympathie, elles dont on ne parlait pas voici quelques semaines (près de 2.5 millions de téléspectateurs sur Direct 8 avec une pointe à 3.2 millions). De l'ombre, elles sont passées à la lumière, et c'est logique et mérité.

Deux ans après avoir découvert les quarts de finale d'un Euro, elles ont atteint le très haut niveau mondial. "Je suis fier depuis 2007", glissait Bruno Bini. "Le jour où un entraîneur n'est plus fier de son équipe, il faut qu'il s'en aille." La capitaine Sandrine Soubeyrand, et ses 165 sélections, affichait sa frustration, mais également sa lucidité: "Il n'y a pas grand-chose à dire, elles ont été plus efficaces, nous on a beaucoup tiré. Ca fait la différence. Elles ont l'avantage de leur histoire, c'est leur sixième demi-finale de Mondial en six éditions. Il faut passer encore un cap." Pour Gaëtane Thiney, qui a beaucoup couru sur le front de l'attaque, le discours était plus tranchant: "C'est moins drôle que contre l'Angleterre. Ca fait chier. Si tu perds en galérant, contre plus fort que toi, OK. Là, tu as la balle tout le temps, tu as des occasions, ça fout les boules. Ca n'est pas injuste, elles mettent un but de plus (deux, ndlr), c'est les règles. Mais on est fières d'avoir donné du plaisir aux gens. Je trouve ça mieux que de rester devant son but et de balancer pendant 90 minutes. Quand je prends le ballon à Solo de la tête, en fait je savais pas si j'avais le droit. Elles font aussi deux mains dans la surface. On gueule mais on a moins de voix que les garçons. Je trouve que c'est important de montrer qu'on est la 3e meilleure équipe du monde." Et si Bérangère Sapowicz faisait son auto-critique - "Je n'ai pas raté mon match, mais j'ai été en difficulté sur les balles aériennes, oui. Je ne crois pas avoir fait un match dégueulasse non plus mais je n'ai pas forcément rassuré ma défense" -, la suite était dans toutes les têtes.

"Il ne faut pas qu'elles baissent la tête", lance Bruno Bini. "Quand je vois tout le bazar que ça fait en France... Il y a deux mois, personne ne misait trois kopecks sur nous. On est qualifié pour les JO, on va jouer la 3e place, elle est pas belle la vie ? Mais bien sûr, on va aussi analyser, étudier. C'est dur pour tout le monde. On a un cerveau et un coeur. Il faut laisser les filles, chacune va vivre à son rythme. Si une veut rester dans sa chambre et pleurer, OK. Une autre échangera son maillot avec une Américaine, une autre appellera son copain. C'est OK. Voilà, la vie est toujours belle. Ce soir, on s'est qualifié pour le match pour la 3e place." Pour la première fois de son histoire, la France peut monter sur le podium d'une compétition internationale, un an avant les Jeux Olympiques de Londres pour lesquels elle s'est qualifiée. Un challenge qui vaut la peine d'être vécu: "Il y a une troisième place à jouer, autant finir sur une bonne note", scande Elodie Le Sommer. "Il faut se remettre au boulot."

Ce sera contre la Suède de Lotta Schelin, l'attaquante star de l'Olympique Lyonnais, coéquipière toute l'année des Laura Georges, Wendie Renard, Corine Franco, Sonia Bompastor, Sabrina Viguier, Louisa Necib, Camille Abily, Sandrine Brétigny, Eugénie Le Sommer, Elodie Thomis ou encore Céline Deville. Avec elle, elles ont remporté la Ligue des Champions voici quelques semaines, pour la première fois dans l'histoire du club lyonnais. Contre elle, elles tenteront de ramener une médaille d'Allemagne, la première dans l'histoire du football français féminin.

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