Brésil : la polémique sur le coût du Mondial de foot continue
Nous serons la semaine prochaine à neuf mois du coup d'envoi de la coupe du monde de football au Brésil, qui se déroulera du 12 juin au 13 Juillet. Après l'organisation de la coupe des confédérations en juin dernier, les brésiliens poursuivent les préparatifs.
La billetterie a été mise en place. Six des douze stades encore en construction devraient être achevés en décembre. C'est également en décembre qu'aura lieu le tirage au sort des différents groupes. Tout se met en place progressivement.
A Rio, où le stade Maracana va accueillir sept matchs, dont un quart de finale et la finale, les fans de foot ont retrouvé "le temple du football" où se déroulent jusqu'à trois matchs par semaines. Les chants des supporters résonnent comme aux plus belles heures du stade, construit en 1950 et totalement refait à neuf.
Les fans, notamment ceux de Flamengo, apprécient, à l'image de Joasié.
"Le stade est super, les infrastructures sont bonnes. On est bien accueilli quand on arrive en tribunes et on se sent en sécurité. Je pense que notre pays est prêt à recevoir les visiteurs du monde entier."
Environ 350 millions d'euros ont été consacrés à la modernisation du Maracana. Au total on évalue les dépenses pour cet événement à 10,5 milliards d'euros. "Avec les travaux d'améliorations des infrastructures, des transports publics, des aéroports ou des centre de sécurité, c'est toute la ville qui va en tirer les bénéfices" , explique Ricardo Trade, président du comité d'organisation du mondial brésilien.
Selon les chiffres communiqués par la Fifa, les retombées économiques liées à la compétition devraient être trois fois plus importantes que les investissements. Ce discours peine toutefois à convaincre tous ceux qui ont manifesté au mois de juin pendant la coupe des confédérations. Les mouvements de protestation n'ont en fait jamais cessé.
On est loin des 300.000 personnes qui ont défilé dans les rues de Rio le 20 juin ou les jours précédents, mais le climat est tendu. A dix mètres de Leblon, l'une des plages les plus célèbres de Rio, et presque sous les fenêtres du domicile du gouverneur Sergio Cabral accusé de corruption, une quarantaine de personnes squatte presque sur la route. Dans des tentes, sous des bâches, ils sont là depuis 39 jours. Parmi eux, Marina étudiante en philosophie âgée de 19 ans.
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"Au début, j'ai commencé l'occupation à cause de l'augmentation des titres de transports, je trouvais ça absurde. Mais en voyant les violences policières, les magouilles des politiques, l'état de l'éducation et de la santé, ça m'a encore plus convaincu de me battre"* , explique la jeune femme.
Le même type de squatt est organisé devant l'assemblée municipale dans le centre de Rio. A cela s'ajoutent les nombreuses manifestations chaque semaine. Mardi, entre 3.000 et 4.000 enseignants se sont rassemblés dans le centre de Rio. Il sont en grève depuis 37 jours pour demander plus de moyens et une hausse des salaires. Un débutant touche 400 euros par mois, 700 euros après 15 ans de carrière.
Pour eux, la coupe du monde n'est pas une priorité. "C'est de l'argent gâché alors que nous sommes dans une situation catastrophique au niveau de la santé et de l'éducation" , explique Rosa Maria, une institutrice de 46 ans qui enseigne habituellement dans une zone à risques, à des classes de 40 à 50 enfants.
Rosa Maria cumule deux emplois dans l'enseignement. Elle travaille 45 heures par semaine pour 3.400 reais, soit environ 1.100 euros. Elle n'est pas la seule à critiquer les sommes dépensées pour l'organisation du Mondial. Une partie de la classe politique dénonce une spéculation, réalisée grâce aux financements publics.
C'est le cas de Renato Cinco, conseiller municipal d'opposition, membre du parti Socialiste et Liberté à Rio: "La coupe du monde et les jeux olympiques ont été utilisés pour favoriser les entreprises qui travaillent dans la construction des stades (...) Il s'agit d'argent public, de l'argent du peuple brésilien qui est dépensé pour un événement qui va seulement profiter à certains groupes d'entrepreneurs ".
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Les prix de l'immobilier ont effectivement explosé ces dernières années. Arnaud Bughon a créé, il y a huit ans, Rio exclusive, une agence qui emploie une quarantaine de personnes et gère 150 propriétés et logements près de Copacabana. Selon lui, dans certains quartiers de Rio, le prix du m² a été multiplié par quatre ou cinq: "Dans la zone sud vers Copacabana, Ipanema et Leblon, il était de 3.500 euros il y a cinq ans. Il est aujourd'hui de 12.000 à 18.000 euros au même endroit ".
Les prix sont très élevés pour des logements de mauvaise qualité, et situés dans des immeubles vétustes. Du point de vue des infrastructures, en dehors du Maracana, les changements promis sont quasi invisibles. Le prolongement d'une ligne de métro ne sera, par exemple, pas achevé avant plusieurs années.
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