Bundesliga : Les coulisses d'une reprise spéciale avec Jonathan Schmid, joueur de Fribourg
“On porte des masques toute la journée. Je ne sais pas combien on en utilise, mais je n’en peux plus. Dès que je rentre, je m’en débarrasse vite fait”, raconte Jonathan Schmid. A 29 ans, l’Alsacien de naissance qui a fait toute sa carrière en Allemagne vient de vivre un moment historique : la reprise de la Bundesliga, après le confinement lié à la pandémie de Covid-19. “C’était bizarre. Le fait de retrouver les terrains, de jouer, c’est le plus important. Ce n’est pas facile sans supporters, mais l’essentiel c’est de finir la saison et que la vie reprenne”, glisse-t-il.
Quarantaine, Mario Kart et buffet interminable
En vérité, ce week-end de reprise est l’aboutissement de quatre semaines de préparation, pendant lesquelles les joueurs étaient en quarantaine. “On est resté à Fribourg dans un hôtel très bien, mais c’était comme la prison (rires). On s’ennuyait toute la journée dans la chambre d’hôtel, ce n’est pas facile”, témoigne Jonathan Schmid, qui précise toutefois : “C’était le prix à payer pour jouer, on est prêt à cela”. A l’entraînement, les séances par groupes de 2 puis de 4 ont aussi été particulières à vivre assure le Français : “Depuis une semaine, on a repris l’entraînement collectif : cela fait du bien !”.
Pour Schmid comme pour tous les joueurs de Bundesliga, la libération a eu lieu ce week-end, avec la reprise du championnat. Pour le Français et son équipe de Fribourg, cela se passait à Leipzig, ce samedi à 15h30. “On est parti vendredi en avion privé, avec le port du masque obligatoire. On avait le droit d‘être côte à côte vu qu’on est testé deux fois par semaine. C’était un voyage classique, avec des gars qui jouaient aux cartes ou à Mario Kart. La seule différence c’était le port du masque”, précise l’Alsacien.
"La plus grosse différence, c’est au niveau du buffet, on ne pouvait entrer que par 5 joueurs, et on devait se servir chacun son tour. C’était un peu long…"
Autre différence : la mise au vert à l’hôtel, adaptée aux contraintes liées au Covid-19. Ainsi, les joueurs avaient chacun leur chambre, et n’avaient aucun contact avec les employés de l’établissement. "La plus grosse différence, c’est au niveau du buffet, on ne pouvait entrer que par cinq joueurs, et on devait se servir chacun son tour. C’était un peu long…", glisse Schmid. Masque sur la bouche, les joueurs ont ensuite pris la direction du stade en bus, comme à l’accoutumée.
Deux vestiaires par équipe
“C’est choquant de ne voir personne dehors quand on arrive, ni tout le monde qui s’agite normalement dans les coulisses. Surtout, ce qui m’a marqué, c’est l’absence des supporters, parce qu’en Allemagne on est habitué à jouer dans des stades pleins à chaque match”, raconte le joueur de Fribourg, pourtant averti par son entraîneur : “A la causerie, il nous a dit de nous habituer tout de suite aux tribunes vides et au silence, dès l’arrivée au stade”. Un discours utile, selon le joueur, qui confie : “Plus que le contexte, ce qui a été le plus dur à gérer, c’est le manque de compétition depuis huit semaines. On n’avait plus l’habitude des duels, plus le rythme”.
"Les titulaires, on était dans un vestiaire, les remplaçants dans un autre, et entre chaque joueur il y a une paroi de plexiglas. Chacun avait aussi sa gourde numérotée. C’est bizarre tout ça."
Difficile pour autant d’oublier le contexte, alors que les équipes sont réparties dans deux vestiaires chacune : “Les titulaires, on était dans un vestiaire, les remplaçants dans un autre, et entre chaque joueur il y a une paroi de plexiglas. Chacun avait aussi sa gourde numérotée. C’est bizarre tout ça. Le foot c’est collectif : ne pas avoir les remplaçants dans le même vestiaire, c’est étrange. Comme le fait de ne pas pouvoir faire de cri de guerre avant le match, ou de tous se prendre par les épaules pour se motiver”, regrette le joueur passé par Strasbourg dans sa jeunesse.
Et ce n’est pas le seul manque pour Jonathan Schmid, privé d’un moment qu’il apprécie particulièrement : “J’aime bien les quelques minutes où l’on se retrouve dans le tunnel pour entrer sur le terrain, mais là c’est une équipe après l’autre. On n’a pas pu regarder les adversaires comme d’habitude. C’est quelque chose que j’apprécie, avant le match, de les regarder, d’essayer de leur faire peur”. Une fois sur la pelouse, pas de serrage de main non plus. Les joueurs se positionnent tout de suite et doivent rentrer dans leur match en quelques instants : “Tout était un peu chamboulé mais on le savait. On a fait quelques matches entre nous dans notre stade vide pour s’habituer, ça nous a aidés”, avoue l’attaquant de Fribourg.
Attention aux micros
Une fois le coup d’envoi donné, Jonathan Schmid assure que le contexte est vite oublié. Il reconnaît toutefois que pour les équipes visiteuses, jouer à l’extérieur devient plus facile : “Par exemple, aller à Dortmund aujourd’hui ou face à 80 000 personnes, ce n’est pas du tout la même pression. En Allemagne, les supporters ont toujours eu leur place et leur importance dans un match. A huis clos, c’est plus facile pour les visiteurs, mais je préférerai jouer devant les milliers de fans adverses et avec plus de pression”. Un facteur à double tranchant puisque Schmid est bien conscient que ce sera aussi plus facile pour les équipes qui viendront jouer à Fribourg.
Dans un stade vide, où quelques ramasseurs de balles constituent le rare public en nettoyant régulièrement les ballons, le match se déroule bien pour Jonathan et ses coéquipiers qui accrochent un match nul contre le RB Leipzig, troisième au coup d’envoi. “Quand on a marqué, j’avais envie d’aller vers le buteur mais on sait que c’est télévisé, que ça peut faire polémiquer. Tout le monde se contrôle. Le club a insisté : on doit montrer l’exemple. Et il faut si on veut finir la saison”, raconte le Français.
En toute fin de match, Schmid fait partie des cinq joueurs remplacés, comme le permet exceptionnellement le règlement : “Dès la sortie du terrain, il a fallu mettre le masque, et rester à distance des coéquipiers. Mais avec le masque et la chaleur, c’était vraiment difficile de bien respirer”, assure-t-il. Le masque a au moins l’avantage de cacher ce que les joueurs disent, autrement qu’avec leur main. “Oui, mais il faut faire attention à ce qu’on dit parce qu’on entend tout, et les micros aussi”, en rigole Jonathan.
De retour aux vestiaires, après le passage à la douche quatre par quatre, Jonathan et ses coéquipiers quittent le stade, sans passer par l’habituelle zone mixte avec les journalistes. “Certains coéquipiers ont donné quelques interviews, mais je ne sais pas où, je ne les ai pas vus”, sourit le Français, qui avoue : “Moi, ce n’est pas trop mon truc, donc j’étais tranquille au moins”. Suite à ce premier match, les joueurs ont pu rentrer chez eux, enfin. “J’étais hyper crevé, mais cela fait du bien”, avoue Jonathan Schmid qui, comme tous, attend vivement le retour des stades pleins et du foot comme on l’aime. “Mais pour cela, on doit se plier à toutes ces mesures”, conclut, lucide, l’attaquant de Fribourg.
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