: Reportage CAN 2024 : "Dieu est ivoirien", scandent les supporters de la Côte d'Ivoire avant la finale contre le Nigeria
La Côte d’Ivoire s’est qualifiée pour la finale de "sa" Coupe d’Afrique des nations de football (CAN) en dominant la République démocratique du Congo (RDC) 1 à 0, mercredi 7 février à Abidjan. Dimanche, les Éléphants affronteront le Nigeria pour la victoire. Dans un pays très religieux, nombreux sont ceux qui y ont vu une volonté divine.
Mercredi, dès la sortie de notre hôtel, une dame assez âgée, un maillot des Éléphants sur le dos, nous a apostrophés pour nous expliquer que la Côte d’Ivoire allait gagner contre la RDC parce que "Dieu est ivoirien". La discussion s’est poursuivie un moment : "Vous ne pouvez pas dire le contraire, c’est évident ! Vous avez bien vu : Dieu nous a sauvés. Il a fait gagner le Maroc pour qu’on aille en 8es de finale, il nous a offert le Sénégal, puis il nous a permis de renverser le Mali". Et maintenant, Madame, que va-t-il se passer ?
"C’est simple, Dieu va nous donner la force de battre la RDC et nous allons gagner cette CAN".
Une supportrice des "Eléphants"à franceinfo
Cet échange n’est qu’un exemple parmi des dizaines de ce qu’ont pu nous dire les Ivoiriens depuis les quarts de finale. Musulmans ou catholiques, dans un bel œcuménisme, ils sont globalement persuadés de jouer sous protection divine. Le problème, si c’en est un, c’est que leurs adversaires du soir en étaient tout autant convaincus.
Une prière par FaceTime
En arrivant au stade Alassane Ouattara, enfin aux abords du stade plutôt, parce que le périmètre de sécurité était tellement important que nous avons dû nous faire déposer très loin de l’enceinte. En arrivant à 3 kilomètres du stade, donc, nous avons dû commencer à marcher. Le soleil et l’humidité de l’air nous ont forcés à faire une pause dans un hôtel-restaurant des environs afin de reprendre quelques forces.
Heureux hasard, l’établissement était littéralement rempli de journalistes congolais avec lesquels nous avons évidemment discuté. Du match, tout d’abord, puis de Chancel Mbemba, lorsqu’ils ont compris que Marseille était notre club de cœur, puis du bon Dieu, très rapidement : nos nouveaux amis journalistes nous ont expliqué que dans quelques minutes, ils allaient devoir nous laisser parce qu’ils avaient rendez-vous avec un pasteur congolais pour une prière collective. Naïvement, nous avons alors pensé que ledit pasteur était lui aussi un pensionnaire de l’hôtel. Mais vérifications faites, l’homme d’Église se trouvait à Kinshasa, et la prière allait se dérouler par FaceTime. Nous nous sommes donc éclipsés en les laissant tous, assis autour d’un téléphone, les mains jointes, et recueillis.
"Dieu est là !"
Nous sommes arrivés au stade un peu transpirants, mais absolument persuadés que nos aventures mystiques allaient se poursuivre. Et cela n’a pas manqué ! Pendant tout le match, nos voisins de tribune n’ont pas arrêté d’implorer le bon Dieu, de le prendre à témoin, ou plus prosaïquement de lui demander des explications quand, par exemple, Sébastien Haller manquait un lob ou plaçait une tête à côté. Mais peu après l’heure de jeu, quand ce même Haller a manqué une reprise de volée qui a malgré tout terminé dans le but congolais, le divin est sorti des têtes, pour laisser place à une sorte d’hystérie collective, bruyante, mais extrêmement joueuse.
Dieu n’est revenu au stade d’Ébimpé qu’au coup de sifflet final, quand les Ivoiriens ont été certains de pouvoir crier victoire. À ce moment-là, tous les supporters des Éléphants ont tenu à remercier le bon Dieu. Dans les coursives, certains levaient les yeux au ciel, alors que d’autres sortaient leur livre de prières et nous le montraient en criant "Dieu est là !", quand les rares Congolais croisés nous expliquaient que la RDC avait "manqué son match", sans invoquer l’impuissance des cieux, les Orange répétaient à l’envi "Dieu est ivoirien". Ils en étaient persuadés. Persuadés également que le Tout-Puissant ne s’est jamais intéressé au Nigeria.
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