Coupe de France : comme les habitués Granville ou Linas-Montlhéry, ces Petits Poucets des 32e de finale qui n'en sont plus vraiment
"Je ne pense qu’à ça, je n’en dors plus depuis deux jours". A l’aube des 32e de finales de la Coupe de France, qui marquent l’entrée en lice des clubs de Ligue 1 dans la compétition, l’excitation grimpe pour Anthony Milliot, capitaine de Loon-Plage, et pour tous les footballeurs amateurs qui affrontent un club professionnel à ce stade de la compétition, samedi 7 et dimanche 8 janvier. La même excitation qu’avant un nouveau tour de manège, dont on connaît déjà les sensations, puisque plusieurs clubs amateurs encore en lice sont des habitués des 32e de finales de la compétition, qu’ils abordent avec toujours autant d’envie, mais aussi plus d’expérience.
Le PSG et Angers (Ligue 1), Amiens (Ligue 2 ) et Dunkerque (ex-Ligue 2)… Depuis trois ans, l’ESA Linas-Montlhéry, qui évolue en cinquième division (N3), a pris l’habitude de s’offrir des rencontres de prestige en Coupe de France. Le club francilien dispute les 32e de finales de la compétition pour la troisième fois en quatre éditions. "Lors de notre première épopée, en 2020, on termine sur un match de gala contre le Paris Saint-Germain. On a donc goûté à cette saveur si particulière et c’est comme toutes les bonnes choses, on a toujours envie d’y retourner, raconte Michael Bertansetti, le président du club. Donc on aborde cette compétition d’une façon différente depuis trois ans, on la joue beaucoup plus sérieusement".
Comme Linas-Montlhéry, le club de Loon-Plage (Régional 1, sixième division), a longtemps attendu avant de tenir sa première épopée, en 2020-2021. L’équipe nordiste avait alors atteint les 32e de finale pour la première fois, après plusieurs échecs aux portes de ce stade de la compétition. "Cette saison-là, en raison du Covid-19, la fédération avait réorganisé le tournoi avec une voie pour les clubs amateurs, et une autre pour les clubs professionnels, qui ne se rejoignaient qu’en 16e de finale. On avait réussi à atteindre les 32e, contre Boulogne-sur-Mer, mais c’était une grande déception de ne pas tomber contre un club professionnel", explique Anthony Milliot.
Alors deux ans plus tard, revoilà les Nordistes, qui défieront le Stade de Reims (Ligue 1) . "Ce n’était pas forcément un objectif en début de saison, on voulait se concentrer sur le championnat et monter en N3, concède Franck Milliot, père du capitaine, et président du club. Finalement, avec l’enchaînement des victoires en Coupe de France, ça a pris le pas sur le championnat puisque les joueurs avaient la coupe en tête."
Des tours précédents passés avec sérieux
Des 32 clubs au statut amateur encore en lice dans cette Coupe de France, seuls dix découvriront pour la première fois les 32e de finale de la prestigieuse compétition. L’ES Thaon (N3), qui défie Amiens (Ligue 2) samedi, y était quant à lui déjà présent la saison dernière et avait même réussi à atteindre les seizièmes de finale. Mais selon son capitaine, William Rother, il n’y a pas de recette miracle pour réaliser un beau parcours en Coupe. "Pour en arriver là, il faut surtout être sérieux durant les tours précédents et ne pas tomber dans les pièges tendus par des équipes de divisions inférieures. A l’ES Thaon, cela fait cinq ou six ans qu’on n’a plus perdu contre ce genre d’équipes, on n’est éliminé que par des clubs de notre division ou de divisions supérieures", note-t-il.
Et si le club lorrain espère s’inviter de nouveau dans les derniers tours de la Coupe de France au cours des prochaines années, l’US Granville (N2, quatrième division) a lui gagné son statut d’"habitué" des épopées. Le club normand va disputer, contre Niort (Ligue 2), son cinquième 32e de finale depuis 2016, année marquée par un parcours jusqu’en quart de finale. "Cela fait partie de l’ADN du club de bien savoir appréhender les matchs de coupe. Il y a l’engouement de notre public, une part de chance forcément, et des joueurs avec de l’expérience en Coupe de France, à Granville ou ailleurs, qui se donnent les moyens de franchir les tours", explique Sébastien Bahu, président du club.
"Une préparation plus sereine"
De l’expérience, c’est justement ce qu’a engrangé l’ES Thaon depuis plusieurs saisons, avec un groupe de joueurs qui est resté quasiment inchangé, et qui a donc connu plusieurs matchs contre des clubs professionnels. "En 2018, lors du 8e tour contre Valenciennes (Ligue 2), on avait pris trois buts en quelques minutes, on était vraiment fébriles, se souvient Wilfried Rother, capitaine de l’équipe. L’année dernière, on a poussé Reims (Ligue 1) et on s’est incliné seulement au bout du temps additionnel, et cette saison, contre Sochaux, on a fait jeu égal avec une Ligue 2 et on a réussi à l’éliminer (au 8e tour)."
A Linas-Montlhéry, Michael Bertansetti, président du club, dresse le même constat : "On a acquis de l’expérience et la préparation de ces matchs de gala se fait dans un climat plus serein, avec moins d’affolement, ce qui permet d’être plus performant". Parmi les joueurs qui ont affronté le PSG en 2020, et qui ont éliminé Dunkerque puis Angers la saison dernière, 60% font toujours partie de l’effectif qui affronte Lens samedi (à 15h30, en direct sur France 3 et France.tv). "L’expérience doit jouer dans la préparation d’une telle rencontre, mais attention, cela peut aussi avoir l’effet de se dire qu’on connaît déjà ça et donc un peu moins de motivation", prévient Sébastien Bahu.
Avec les gains engrangés, un cercle vertueux de performance
Motivation supplémentaire pour ces clubs amateurs : une qualification pour les 32e de finale de la Coupe de France leur rapporte 52 500 euros de dotations de la part des fédérations (en additionnant les 7500 euros perçus au 7e tour, les 15 000 euros perçus au 8e tour, et les 30 000 euros de dotations pour une participation aux 32e de finale). Des gains financiers réinvestis dans l’organisation des matchs de Coupe de France notamment, mais qui entrent aussi dans un cercle vertueux pour reproduire de belles performances sportives.
"Ces mannes d’argent qui découlent de la billetterie et de la fédération nous ont permis d’investir dans nos installations mais aussi de continuer à bâtir notre équipe, en agrandissant le staff, en investissant dans une salle de sport, en achetant du matériel de kinésie, et tout cela contribue donc aux réussites des saisons suivantes", assure Michael Bertansetti. Ces "Petits Poucets", qui ont déjà disputé six ou sept tours dans la compétition et se sont hissés parmi les 64 dernières équipes, sur les plus de 7000 clubs engagés, rêvent désormais d'un parcours à la calaisienne, pensionnaire de 4e division et finaliste en 2000 puis quart de finaliste en 2006.
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