Coupe du monde 2018 : ces militants LGBT ont défié la censure russe en formant le drapeau arc-en-ciel avec leurs maillots
Pendant le Mondial de foot, six militants réunis par une association espagnole se sont baladés dans les rues de Moscou pour recréer avec leurs maillots les couleurs du drapeau arc-en-ciel, emblème de la communauté LGBT.
Rouge, orange, jaune, vert, bleu, violet... Sur la place Rouge, les passants n'y ont vu que du feu. Et pourtant, Marta, Eric, Eloi, Guillermo, Vanesa et Mateo sont devenus les ardents porte-drapeaux de la communauté lesbienne, gay, bisexuelle et transgenre (LGBT) en Russie, le temps d'un week-end. Pendant la Coupe du monde de foot, samedi 30 juin et dimanche 1er juillet, ils se sont baladés dans les rues de Moscou avec leurs six maillots pour recréer avec leurs maillots les couleurs du drapeau arc-en-ciel.
Une façon astucieuse de dénoncer la politique de la Russie, pays où l'homophobie est très ancrée et où les autorités ont pris ces dernières années des mesures réprimant la "propagande" de l'homosexualité auprès des mineurs, une formulation floue qui permet en théorie de punir toute expression publique. L'initiative a été largement relayée sur les réseaux sociaux, où des militants ont salué "la plus belle image de la Coupe du monde".
La plus belle image de la #CoupeDuMonde2018 : des supporters portent les maillots de l'Espagne, des Pays-Bas, du Brésil, du Mexique, de l'Argentine et de la Colombie pour former un drapeau arc-en-ciel sur la Place Rouge de Moscou ️ pic.twitter.com/i5s149S5xk
— Yohann Roszéwitch (@YRoszewitch) 8 juillet 2018
Derrière cette campagne se cache l'association FELGBT, la fédération espagnole des associations LGBT, qui voulait profiter du Mondial pour attirer l'attention sur les discriminations dont sont victimes les homosexuels en Russie. C'est l'agence de pub LOLA MullenLowe qui a été chargée d'organiser le projet. "Nous devions trouver une idée efficace et impertinente, tout en garantissant la sécurité des participants", explique Pancho Cassis, le directeur artistique de l'agence.
Une stratégie pour passer incognito
Pour participer à cette aventure, l'agence a contacté six personnes venant de pays dont les couleurs correspondent à celui du "rainbow flag". Le casting a donc rassemblé une Espagnole (maillot rouge), un Néerlandais (orange), un Brésilien (jaune), un Mexicain (vert), une Argentine (bleu) et un Colombien (violet).
Quand l'agence l'a contacté, via l'un de ses amis, Mateo Fernandez n'a pas hésité. "J'ai tout de suite dit oui, même si ma famille avait quelques craintes au début", raconte ce Colombien gay de 29 ans, qui vit à Paris. Comme les autres participants, qu'il ne connaissait pas du tout, il a donc posé le pied à Moscou le vendredi 29 juin. Et dès le samedi matin, l'équipe a commencé à arpenter la ville, sur la place Rouge, au Kremlin, dans des stations de métro et dans d'autres lieux emblématiques de la capitale russe.
A aucun moment les gens n'ont remarqué que nous étions en train de mener une action pro-LGBT. Pour eux, nous étions juste six supporters de six pays différents qui faisaient des photos dans la rue.
Mateo Fernandezà franceinfo
Ne pas se faire remarquer, c'était précisément le but de l'opération. En Russie, un tel activisme aurait pu leur valoir une arrestation. "Nous nous étions préparés à cette éventualité", explique Mateo. "Si nous nous étions fait arrêter, on avait décidé de tous raconter que nous étions juste des amis qui nous retrouvions ensemble."
Avant de partir en Russie, Mateo, qui dit n'avoir jamais rencontré de problèmes liés à son homosexualité, n'était pas spécialement un militant de la cause LGBT : "Au début, j'étais surtout curieux de participer à cette expérience. Mais une fois sur place, en seulement trois jours, je me suis rendu compte du manque de représentation des personnes LGBT dans ce pays. Alors je me suis dit que je faisais quelque chose d'important."
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