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Coupe du monde : les petits joueurs obtiennent-ils davantage de coups francs ?

Le Français Mathieu Valbuena est souvent accusé d'inciter les arbitres à siffler des fautes. Obtient-il gain de cause grâce à sa petite taille ? Francetv info s'est plongé dans les travaux de deux chercheurs en psychologie cognitive.

Article rédigé par Fabien Magnenou
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Le milieu de terrain français Mathieu Valbuena à la lutte avec le Hondurien Wilson Palacios, dimanche 15 juin à Porto Alegre (Brésil). (RODRIGO ARANGUA / AFP)

Contact, roule-boulé, galipette, faute. Mathieu Valbuena (1,67 m) a la réputation de tomber facilement et d'obtenir de nombreux coups francs. Au classement des footballeurs ayant subi le plus de fautes lors des éliminatoires pour la Coupe du monde, le milieu offensif tricolore se classe d'ailleurs 26e, quand Franck Ribéry (1,70 m) est 2e. Les joueurs petits seraient-ils les victimes des grandes brutes sans cœur ? Pour y répondre, francetv info a exhumé une étude parue en 2010 (en anglais) dans le Journal of Sport Exercise Psychology.

La taille, ça compte

A l'époque, les chercheurs néerlandais Niels van Quaquebeke et Steffen R. Giessner obtiennent une liste de 123 800 fautes compilées pendant plusieurs années, commises lors de la Bundesgliga (le championnat allemand), la Ligue des champions et la Coupe du monde. Après traitement des données, il apparaît que "l'agresseur" mesure en moyenne 1 cm de plus que "la victime". Une différence ténue, certes, mais il ne s'agit que d'une moyenne. La probabilité qu'une faute soit sifflée augmente avec la différence de taille entre les deux joueurs impliqués. Et quand il y a faute, la probabilité moyenne que l'arbitre sanctionne le plus grand atteint 58% lorsque "l'agresseur" toise sa "victime" de 10 cm ou plus.

Faut-il s'en étonner ? A priori, les attaquants sont souvent plus petits que les défenseurs, lesquels ont pour mission de les bloquer, notamment grâce à leur impact physique. Faux, répondent les chercheurs, chiffres à l'appui. La plupart des fautes sont commises par des milieux de terrain "relativement petits" sur d'autres milieux de terrain. Enfin, si les défenseurs commettent principalement leurs fautes contre les attaquants, la réciproque est vraie.

Une conséquence de nos représentations mentales

Pour corroborer ces chiffres, les chercheurs ont ensuite soumis un dessin à 120 volontaires, sur lequel figurent deux footballeurs de taille différente. Les participants doivent indiquer lequel des deux va tomber par la suite. Sans surprise, 85 d'entre eux pensent qu'il s'agit du plus petit. Et parmi eux, 47 auraient sifflé faute... alors que les deux joueurs sont simplement debout sur le dessin, sans la moindre action litigieuse. 

"Il y a trois étapes pour un arbitre : une phase de perception, une phase de catégorisation et une phase de décision. C'est lors de cette deuxième étape que la taille des joueurs peut avoir un rôle, de manière plus ou moins consciente", commente Fabrice Dosseville, membre de l'association des chercheurs francophones en football et spécialiste de la prise de décision dans le football. Les recherches en psychologie cognitive soulignent, d'ailleurs, que la taille est perçue comme un facteur de domination et de puissance.

Toutefois, comme le rappellent les auteurs, le critère essentiel de décision reste la faute elle-même. "La taille des joueurs devient une information supplémentaire à condition que l'information première – à savoir le déroulé concret de la faute – n'appelle pas de décision claire." Et même dans ce cas, il faut prendre en compte d'autres critères, comme le passif arbitral du joueur en question, précise Fabrice Dosseville. "Si Mathieu Valbuena se fait bousculer par un joueur adverse, l'arbitre va également tenir compte de la réputation du joueur, de manière plus ou moins consciente." Les petits filous n'obtiennent pas toujours gain de cause.

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