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Coupe du monde : pourquoi les stades ne font pas le plein ?

Depuis le début de la compétition, les tribunes sont souvent clairsemées. Même des affiches prestigieuses comme Pays-Bas-Espagne sont concernées.

Article rédigé par Fabien Magnenou
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
L'Uruguayen Diego Godin (G) face au Costaricain Celso Borges lors d'un match de Coupe du monde disputé à Fortaleza (Brésil) le samedi 14 juin 2014. (MARCELO DEL POZO / REUTERS)

L'ambiance est là, le spectacle aussi, les supporters portent des tenues bariolées... Et pourtant, depuis le début de la Coupe du monde, quelque chose chiffonne les téléspectateurs. Lors de la plupart des matchs, les gradins apparaissent clairsemés, si ce n'est plus. L'événement passionne pourtant la planète entière et la Fifa elle-même assurait avoir reçu 11 millions de demandes de billets. Alors quoi ?

Plus de 3 000 sièges vides pour Pays-Bas-Espagne

Certes, certains stades ont fait le plein, comme à Fortaleza ou à Sao Paulo, pour le match d'ouverture Brésil-Croatie. Mais lors de la rencontre entre les Pays-Bas et l'Espagne, 3 500 places sont restées vides. Une situation d'autant plus improbable que ce soir-là, des billets se sont arrachés jusqu'à 500 euros au marché noir, rapporte le Daily Mail (en anglais), soit dix fois leur prix initial. La rencontre – l'une des plus belles de ce début de tournoi – affiche ainsi un record d'absentéisme.

Rebelote lors d'une autre grande affiche du tournoi : Angleterre-Italie. Comme le rapporte Bloomberg (en anglais), les supporters ont eu la surprise de découvrir des centaines de sièges vides, alors même que les organisateurs assurent depuis plusieurs mois que tout a été vendu. Encore un exemple ? Lors de Suisse-Equateur, le stade de 72 000 places n'était rempli qu'aux deux tiers au coup d'envoi. Les retardataires ont, peu à peu, garni les gradins, mais il manquait toujours 4 000 personnes en seconde période. Et 2 300 sièges n'ont pas vu de postérieur lors de Côte d'Ivoire-Japon, selon l'agence AP (en anglais).

Des stades au goût de bouchon

Premier constat, les stades se remplissent au fil des matchs. Comme le fait remarquer le journaliste de la BBC dans son tweet, les retards sont ainsi responsables en grande partie de l'impression de vide laissée sur les téléspectateurs. Au Brésil, les embouteillages peuvent prendre des proportions importantes, comme à Sao Paulo où, le 23 mai, 344 km de bouchons ont été enregistrés. 

Le jour de Brésil-Croatie, les embouteillages ont commencé cinq heures avant le match, selon Yahoo Sports (en anglais). Et les taxis n'avaient aucun moyen d'aller jusqu'au stade, puisque la Fifa interdit la circulation dans un rayon de 2 km autour des enceintes, excepté pour les véhicules officiels. Bref, arriver à sa place à l'heure relève du parcours du combattant.

Carton jaune pour le système de réservation

Mais les bouchons n'expliquent pas tout. La situation est d'autant plus paradoxale que la Fifa avait annoncé, début juin, avoir vendu 2,9 millions de billets, dont 2,2 au grand public. Mais comme le fait remarquer The Independent (en anglais), les places évoquées par la Fifa ont été simplement allouées, ce qui ne veut pas nécessairement dire qu'elles aient été vendues. Alors que la fédération anglaise a écoulé ses 2 500 billets pour le match de Manaus, la fédération italienne, elle, n'en a vendu que 200. Le reste a donc été remis dans le circuit par la Fifa à la dernière minute. 

Mais à en croire plusieurs médias britanniques, le site de réservation en ligne a rejeté de nombreuses tentatives d'achat. Des critiques écartées par le porte-parole du comité organisateur local (COL) Saint-Clair Milesi, qui a tout de même reconnu quelques dysfonctionnements. Sachez donc qu'il reste toujours des places. Au 15 juin, les Brésiliens pouvaient acquérir des billets pour 18 des 51 matchs restants, notamment pour Honduras-Suisse et Bosnie-Iran (258 euros). Quant aux étrangers, ils avaient encore le choix entre 18 rencontres, avec Russie-Corée du Sud en plus des deux matchs déjà évoqués (129 euros). Le prix des places et l'affiche proposée ne sont guère attractifs.

Les sponsors pointés du doigt

La Fifa estime qu'il ne restait plus que 7 000 billets à vendre, lundi. Selon la fédération, "les sièges vides correspondent à la fois à des spectateurs qui ne se sont pas présentés et à des personnes qui n'ont pas récupéré leur billet". Il est pourtant difficile d'imaginer un particulier bouder la place qu'il a payée si cher. Et si la Fifa distribuait trop de billets aux sponsors de la compétition ?

Lors des Jeux olympiques de Londres, en 2012, le problème s'est déjà posé, notamment lors des compétitions de handball, de badminton ou de volley-ball. De nombreuses critiques ont alors visé les partenaires privés, accusés de ne pas utiliser leurs billets. "Je ne suis pas sûr que les sièges vides relèvent simplement de la responsabilité des sponsors", s'était alors défendu le PDG de Coca-Cola, Muhtar Kent. Pour prévenir de tels écueils, le directeur du marketing de la Fifa avait demandé aux sponsors en octobre "d'indiquer quelques jours avant le match s'ils prenaient bien les billets ou non", afin de pouvoir les revendre le cas échéant. Message reçu ?

Vers une enquête interne de la Fifa ?

Pour comprendre les raisons d'un tel échec, notamment lors de la rencontre entre l'Espagne et les Pays-Bas, la Fifa aurait l'intention d'ouvrir une enquête, selon Yahoo Sports (en anglais). "Il y a sans doute quelque chose qui va être examiné", explique un proche du dossier, car "il est rare qu'une telle chose se produise".

Vraiment ? En 2010, déjà, la Fédération internationale avait été critiquée pour l'absence de public pour le Mondial en Afrique du Sud. Lors du match Algérie-Slovénie, quelque 11 000 sièges étaient restés inoccupés à Polokwane, soit près du quart du stade, écrivait Le Monde. Avant cela, des volontaires avaient même été rappelés en renfort pour occuper une section du stade lors de la cérémonie d'ouverture. La Fifa avait alors évoqué des problèmes de distribution de billets et de transports publics.

On pourrait multiplier les exemples, comme lors du match d'ouverture de la Coupe du monde de 2002. A l'époque, déjà, le directeur de la communication de la Fifa, Keith Cooper, avait annoncé l'ouverture d'une enquête. Douze ans plus tard, il semble que la fédération internationale cherche toujours des réponses.

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