Mondial 2018 en Russie : entre les JO et le foot, comment le sport dope l'économie à Sotchi
Avec le tirage au sort du Mondial 2018 de football, vendredi, les projecteurs sont braqués sur la Russie. Parmi les villes hôtes, Sotchi va à nouveau tenter de jouer la ville vitrine, trois ans après ses JO d'hiver.
Avec le tirage au sort du Mondial 2018 de football, vendredi 1er décembre, les projecteurs sont braqués sur la Russie. Parmi les sites hôtes de la compétition, Sotchi va à nouveau tenter de jouer son rôle de ville vitrine, sur les rives de la mer Noire. La ville va s'appuyer sur les infrastructures de ses JO d'hiver de 2014.
Une cité balnéaire, revue pour les JO et corrigée pour le foot
À l'occasion des JO d'hiver de 2014, le parc olympique de Sotchi avait grandi sur un marais, refuge des oiseaux migrateurs. Le secteur est désormais hérissé de plusieurs dizaines de petits immeubles bien alignés. Après les Jeux, les logements des athlètes ont été reconvertis en hôtels.
En ce mois de novembre, creux de la saison touristique, les lieux ne sont guère occupés. Le parc d’attraction du site olympique est fermé. Les autres infrastructures tentent de trouver une seconde vie. On fait un peu de gymnastique dans l’ancien stade de curling. Un circuit automobile de F1 serpente au milieu de cette grande zone. Et une immense coquille blanche, comme fendue en deux, apparaît.
Philipp Léouss, guide et professeur d’histoire, détaille les transformations du stade olympique Fisht, où se dérouleront des rencontres du Mondial de football 2018.
Il avait juste servi pour les cérémonies d’ouverture et de clôture des Jeux. On a enlevé la patinoire qu’il y avait au milieu, pour y mettre une pelouse. Et on a fait passer le stade de 40 000 à 47 000 places.
Philipp Léouss, guide à Sotchià franceinfo
Sotchi n'ayant pas de club de football professionnel, l'enceinte a été testée en accueillant des matches de la Coupe des confédérations, il y a quelques mois. La ville semble désormais rodée pour l’accueil des grands événements sportifs avec un vaste aéroport et un réseau routier rénové
Un site pour le Mondial, sans grande équipe locale
La fierté d'accueillir la Coupe du monde 2018 se ressent notamment du côté de Verkhniy Yurt, une banlieue modeste de Sotchi, à l’écart des immeubles en verre et des palmiers du centre-ville. Sur un petit terrain de foot synthétique, une trentaine d’enfants tapent dans le ballon, dès 8h tous les matins.
L'entraîneur du petit club de Verkhniy Yurt reconnait que c’est un peu une surprise d’avoir obtenu une partie du Mondial à Sotchi, puisqu'il n'y a pas de club professionnel, mais il s'en réjouit.
À Krasnodar, la capitale régionale, ils ont des équipes pro, mais ils n’accueillent rien du tout. Sotchi est une ville expérimentée pour les événements sportifs, donc il est normal qu’elle soit impliquée dans la Coupe du monde.
Mika, entraîneur d'un petit club de foot en banlieue de Sotchià franceinfo
Dans ce club, on espère que la compétition internationale de 2018 va doper les inscriptions.
Une effervescence dans les starting-blocks
Au pied d’un centre commercial clinquant, personne ne se presse aux guichets de distribution des "passeport du supporter", le sésame indispensable pour entrer dans les stades. La responsable du site des supporters, Irina Bogdanova, qui a travaillé pour les JO de 2014 et la Coupe des confédérations, est optimiste et remercie le Président russe.
Une cinquantaine de personnes ont été embauchées ici. J’espère qu’on va bien travailler pendant le Mondial. Évidemment qu’on est reconnaissant pour tout ça envers Vladimir Poutine !
Irina Bogdanova, au centre de distribution des billetsà franceinfo
À Sotchi, Vladimir Poutine dispose d’une résidence d’Etat pour ses vacances ou des sommets diplomatiques. Il était présent la semaine dernière encore avec ses homologues iraniens et turcs. Par ailleurs, un Centre des congrès accueille régulièrement des forums internationaux.
Sotchi est un point important sur la carte du monde, explique Helena Zatvorska, à la tête du pôle des excursions dans un vaste complexe hôtelier en bord de mer. "On avait déjà des touristes qui venaient ici pour la montagne, la nature et la mer. Mais depuis les JO, on a connu une croissance de 30%", souligne-t-elle. La hausse des réservations a d'ailleurs entraîné la construction cette année d'une extension de l'hôtel.
La marina, symbole du renouveau de Sotchi
Cependant, les touristes restent essentiellement russes. Les étrangers ne représentent que 10% des deux millions de visiteurs annuels de la station de ski flambant neuve de Roza Khutor, à proximité de Sotchi. Ce qui n’empêche pas une montée en gamme, particulièrement visible du côté de la marina.
Anton Peskov travaille depuis 12 ans à la marina de Sotchi. Il vient de prendre le poste de capitaine d'un yacht.
Aujourd’hui, on accueille 300 yachts. Avant 2014, on n’en avait qu’une dizaine, mais on a construit les équipements nécessaires. Les gens aisés dont les bateaux stationnaient en Europe, en Turquie ou en Croatie, ont été attirés.
Anton Peskov, capitaine de yacht à Sotchià franceinfo
Encore surmontée de statues soviétiques, la capitainerie héberge désormais des boutiques de marques de luxe comme Vuitton et Gucci.
Des voix discordantes face aux louanges du boom
Dans l’ensemble, les habitants de Sotchi se réjouissent du développement lancé à très grande vitesse. Toutefois, certains mettent un bémol à l'enthousiasme. C'est le cas d'Alevtina, retraitée des télécom en balade sur la marina.
Ils construisent des gratte-ciel au bord de la mer, mais pas de piscine gratuite pour les enfants. Et ceux qui travaillent peuvent se permettre d’aller au parc olympique, mais quand on est retraité, on doit se serrer la ceinture.
Alevtina, retraitée à Sotchià franceinfo
Même du côté des actifs, certains habitants déplorent que de gros entrepreneurs aient écrasé les petits. D'autres n'apprécient pas que les prix, disent-ils, soient désormais plus élevés ici qu’ailleurs en Russie. La défense de la nature est aussi montrée du doigt. Yuliana Naberejna, militante écologiste, regrette que le souci de l'environnement ait été laissé de côté.
Au moment des JO, le slogan, c’était zéro déchet, mais c’est de la supercherie. On transporte les détritus sur un autre territoire.
Yuliana Naberejna, écologisteà franceinfo
Selon Yuliana Naberejna, pendant les grands événements, des poubelles de tri sélectif sont installées, mais la plupart des déchets, affirme-t-elle, vont dans une décharge, près de Krasnodar, située à près de 300 km par la route. La militante écologiste, qui vient de participer à une réunion à la mairie de Sotchi sur la gestion des déchets, espère toutefois que les choses vont aller dans le bon sens, lors du rendez-majeur de 2018.
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