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Coupe du monde 2022 : "On ne demande pas aux joueurs de devenir gays", mais "dire qu'ils ne sont pas d'accord avec ce qui se passe au Qatar" s'agace une association

A quelques jours du début de la Coupe du monde de football au Qatar, Emmanuel Macron a appelé à "ne pas politiser le sport". Des mot qui ont attéré Yoann Lemaire, de l'association Foot Ensemble. 

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Des membres de l'équipe de France de football à leur arrivée à l'aéroport de Doha, au Qatar, le 16 novembre 2022. (ODD ANDERSEN / AFP)

"On ne demande pas aux joueurs de devenir gay, simplement de dire qu'ils ne sont pas d'accord avec ce qu'il se passe au Qatar", a estimé jeudi 17 novembre sur franceinfo Yoann Lemaire, footballeur amateur, fondateur de l’association Foot Ensemble et l'un des premiers footballeurs à avoir rendu publique son homosexualité dans les années 2000. Mercredi16 novembre, Emmanuel Macron a appelé à "ne pas politiser le sport", une phrase qui a "atterré" Yoann Lemaire. Le capitaine des Bleus Hugo Lloris avait également annoncé qu'il ne porterait pas de brassard inclusif lors de la compétition, alors que "des gens sont emprisonnés au Qatar en raison de leur homosexualité".

franceinfo : Est-ce une mauvaise idée, comme le dit Emmanuel Macron, de politiser le sport ?

Yoann Lemaire : C'est une mauvaise idée de le dire de cette façon. Je suis assez atterré d'entendre ça même si j'ai eu beaucoup d'admiration auparavant pour le président qui avait pris des positions très fortes pour lutter contre l'homophobie et le racisme dans les stades. On sait tous que les hommes politiques se servent du sport pour leurs intérêts personnels. Là, subitement, quand il s'agit de parler des droits de l'homme, du sexisme, de l'homophobie, du droit du travail, il doit y avoir un problème géopolitique car on baisse la tête, on fait le dos rond et le sport ne doit pas être politisé. Je suis atterré que ce soit dit comme ça. À mon sens, c'est très mauvais.

Trouvez-vous qu'il y a une frilosité générale ?

Oui, ça semble évident. On voit que le gouvernement fait un 180 degrés, on recule et c'est un très mauvais signal. Nous sommes un pays de droits de l'homme et nous sommes champions du monde de football. Pourquoi on ne pourrait pas simplement dire, sans foutre le bazar au Qatar, qu’on n’est pas d'accord avec les drames qui se passent là-bas ? La politique, dans le sens noble du terme, c'est tout ce qui concerne le citoyen. On ne peut pas laisser faire que des gens soient emprisonnés au Qatar en raison de leur homosexualité en disant, comme le capitaine des Bleus Hugo Lloris, que c'est leur culture et qu'il faut respecter. J'estime qu'il y a un devoir d'exemplarité pour, au moins, montrer l'exemple aux jeunes. Là, on a montré le très mauvais exemple.

N'en demande-t-on pas trop au sport par rapport aux autres domaines de la société ?

C'est réducteur et hypocrite de dire que les footballeurs doivent simplement jouer au foot et ne pas s'engager. Ils arrivent à s'engager dans des activités commerciales. Je pense qu'ils ont un devoir d'exemplarité. On ne leur demande pas grand-chose. On ne leur demande pas de devenir gay ou de militer, mais simplement de dire qu'ils ne sont pas d'accord avec ce qu'il se passe là-bas. Les footballeurs sont tous des citoyens. On ne va pas obliger Karim Benzema à s'engager. S’il ne veut pas parler, il ne parle pas. En revanche, ceux qui sont capitaines, sélectionneurs, ministres ou présidents, doivent vraiment s'engager.

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