Ça s'est passé le 18 mai 1997 : Éric Cantona surprend tout le monde en annonçant sa retraite
"J'ai été footballeur professionnel pendant treize ans, ce qui est très long. Maintenant, je souhaite faire d'autres choses. J'ai toujours prévu de prendre ma retraite en étant au sommet, et à Manchester United j'ai atteint l'apogée de ma carrière." Ce sont les mots d'Éric Cantona à l'issue de la saison 1996-1997, couronné d'un nouveau sacre de champion d'Angleterre avec Manchester United, son cinquième sur la terre de Sa Majesté.
Pour l'enfant terrible du football français, cette décision est le dernier coup d'éclat d'une immense carrière. De ses titres à ses buts légendaires en passant par ses gestes d'humeur, retour sur la conquête d'un royaume qui avait fait de lui le meilleur joueur de l'histoire des Red Devils, devant George Best et Bobby Charlton, selon un vote des supporters en 2001.
"Je t'aime, moi non plus"
Avant de se rendre outre-Manche, Canto a connu une véritable déchirure avec la France. L'homme qui devait incarner le futur des Bleus va connaître un avenir tourmenté avec sa sélection et son pays natal.
Formé à l'AJ Auxerre et promu en D1 à seulement 17 ans sous les ordres de Guy Roux, le natif de Marseille va se révéler en prêt à Martigues (6 mois) puis à l'AJA durant deux saisons. Des prestations qui vont lui permettre de goûter à l'équipe de France. De retour dans sa ville natale, le "King" va faire parler de lui. Déjà connu pour son caractère sanguin, l'attaquant va littéralement sortir de ses gonds quelques mois plus tard. Il va se permettre de qualifier le sélectionneur Henri Michel de "sac à merde" pour ne pas l'avoir sélectionné en 1988. Par la suite, il jettera son maillot sur le sol pour montrer son mécontentement lors d'un changement dans un match amical. Deux gestes d'humeur qui seront sanctionnés par une exclusion de toute sélection national pendant 1 an.
Il retrouve finalement le chemin de Clairefontaine en août 1989. Remportant la Coupe de France avec Montpellier, il revient à Marseille sous la houlette de Franz Beckenbauer. La doublette avec Jean-Pierre Papin est magistrale. Mais une blessure l'éloigne des terrains Raymond Goethals, remplace Beckenbauer et Cantona reste sur la touche. Malgré le titre de champion de France, le célèbre numéro 7 va connaître une énorme désillusion : il ne participera pas à la finale de la Coupe des clubs champions perdue face à l'Étoile Rouge de Belgrade (1-0).
Canto va rebondir à Nîmes afin de retrouver du temps de jeu. Chasser le naturel, il revient au galop. L'aventure va tourner court dans le Languedoc. Furieux contre une décision arbitrale, le buteur lance le ballon sur le juge de la rencontre et se dirige vers les vestiaires. La Fédération voit rouge face à cette scène surréaliste. Mais le joueur tumultueux va surenchérir en qualifiant les dirigeants de la FFF "d'idiots." Deux mois de suspension sont donc proclamés à l'encontre du footballeur. Dans la foulée, il annonce sa retraite. Une première fois donc en 1991...
Amour, gloire et kung-fu
Sur les conseils d'un certain Michel Platini, le Français rechausse les crampons et se rend en Angleterre. En seulement neuf mois du côté de Leeds, il met l'Angleterre à genoux. Sa technique foudroyante et son charisme implacable permettent aux Peacocks de tutoyer les sommets de la Premier League. Son équipe sera championne au terme de la saison 1992, son dernier titre. Les clubs anglais du pays tout entier font les yeux doux au Tricolore. A ce petit jeu de séduction, c'est Manchester United qui en profitera.
Avec à sa tête Alex Ferguson, les Red Devils sont en construction. Le manager écossais voit en Cantona, le joueur parfait pour que la légende mancunienne retrouve de sa superbe. Et il ne regrettera pas. Le serial buteur soulève le trophée de champion pour la deuxième année consécutive. Une saison impressionnante qui lui permettra de terminer sur le podium lors du Ballon d'or 1993, derrière Roberto Baggio et Dennis Bergkamp.
Col relevé, démarche assurée et numéro 7 dans le dos, Cantona devient le "King" Éric. Une histoire idyllique puisque United va rafler la coupe et le championnat en 1994. Mais quelques mois plus tard, le capitaine de Manchester montrera qu'il n'a pas besoin de ballon pour frapper fort et faire mal.
Le 25 janvier 1995, son équipe fait face à Crystal Palace. L'attaquant, qui se fait insulter depuis le début du match, va se faire justice lui-même. Canto fonce sur un supporter des Eagles avec le pied en avant. Une scène aussi rocambolesque que violente. Le verdict tombe : neuf mois sans football. Mais le "King" reste digne et avouera en 2011 "avoir donné ce coup de pied parce que ce genre de personnes ne doit pas être présent à un match… C'était comme un rêve de pouvoir frapper ce type."
À jamais dans le cœur des supporters
Si l'institution le soutient dans cette affaire, l'équipe de France d'Aimé Jacquet, se désolidarise complètement et décide de se séparer définitivement de Cantona.
Cette fois, pas question d'abandonner. Le Lion va de nouveau rugir, pour le plus grand bonheur des fans. Il signe son retour le 1er octobre 1995, jour de derby contre le grand rival Liverpool. Un but et une passe décisive plus tard, Old Trafford est en fusion et la saison se conclue par un nouveau doublé coupe-championnat.
Rongé par une certaine lassitude, le milieu du football ne lui correspond plus. Moins performant mais toujours aussi talentueux, Cantona va décrocher un dernier titre de champion d'Angleterre en 1997 avec, en prime une célébration qui restera gravée d'une pierre blanche dans l'histoire du club lors d'un match à Old Trafford contre Sunderland (victoire 5-0).
Le "King" enlève sa couronne en annonçant de façon inattendue sa retraite. Tous les tabloïds anglais font alors leur Une sur le joueur français. Il endossera par la suite une nouvelle carrière aux multiples facettes : cinéma, publicité, peinture, etc. Aujourd'hui encore, La Marseillaise est entonnée par les supporters de Manchester United à Old Trafford pour lui rendre hommage lors de ses apparitions.
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