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Coupe du monde 2018 : près de 400 hooligans russes déjà interdits de stade

Comment la Russie, pays hôte de la prochaine Coupe du monde de football, va gérer les éventuelles violences entre supporters ? La question a émergé après les affrontements entre des hooligans russes et anglais à Marseille lors de l’Euro en 2016. 

Article rédigé par Jérôme Jadot
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Des heurts ont éclaté à Marseille avant le match Angleterre-Russie entre des supporters russes et anglais, le 11 juin 2016.  (MAXPPP)

La Russie accueille l'an prochain la Coupe du monde de football, qui se déroulera du 15 juin au 15 juillet. Après les affrontements entre des hooligans russes et anglais à Marseille lors de l’Euro en 2016, le pays hôte du Mondial 2018 a décidé de prendre des mesures préventives, en interdisant notamment de stade près de 400 hooligans identifiés.

Le "hooliganisme" russe se développe dans les années 90 à la faveur de l’ouverture au monde de l’ex-URSS. On voyage et on s’inspire d’exemples étrangers, notamment anglais. C’est à cette époque que Sergueï Smirnov dirige l’association des supporters de Torpeda, un club moscovite. Aujourd’hui journaliste, il ne s’adonne plus aux bagarres entre ultras, mais il comprend ceux qui ne se sont pas arrêtés.

'C’est l’envie de prouver que tu es plus fort que ton adversaire, c’est l’adrénaline, c’est le sentiment d’appartenance à un groupe, de sortir du lot, de faire partie des gens dangereux

Sergueï Smirnov

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Mais le hooliganisme a ses codes. "En principe, il y a beaucoup de règles, comme ne pas frapper un homme à terre. Mais si deux groupes se détestent, les règles ne sont pas respectées. J’ai été blessé, mais pas grièvement. Je me battais à l’époque où l’on n’utilisait pas encore les barres de fer", raconte-t-il.

De la tolérance aux sanctions après l'Euro 2016

Dans les années 2000, les supporters ultras, les "fanats" en russe, se structurent dans des groupes bien hiérarchisés. Le pouvoir laisse faire ces bagarres organisées, des free fights à l’écart dans des parcs ou des forêts avec en contrepartie des stades relativement sécurisés.  

La donne change avec les événements de Marseille lors de l'Euro 2016 et le choc des images de supporters anglais en sang après avoir été laminés par des ultras russes. Pas moins de 20 d’entre eux seront expulsés de France, dont Alexandre Chpryguine, auto-proclamé président de l’Association des supporters russes. Il fanfaronnera en twittant une photo de lui pour un match à Toulouse quelques jours plus tard.

Alexandre Chpryguine, supporter russe expulsé de France après les affrontements entre Russes et Anglais lors de l'Euro 2016, à Marseille. (JÉRÔME JADOT / RADIO FRANCE)

Avec ses 1m 90, son visage et son ventre arrondi, il donne rendez-vous au sous-sol d’un pub de Moscou. Pour les violences de Marseille, l’ex ultra assure n’avoir rien à se reprocher et ne rien regretter, même s’il déchante un peu.  "Quand on est rentrés de Russie, on a d’abord été accueillis comme des héros nationaux. Mais un mois après, ça a changé. On nous a tout mis sur le dos. Comme l’image du pays avait été ternie à Marseille, la Russie a dû réagir vis-à-vis de l’Europe", se souvient Alexandre Chpryguine, amer.

On était les seuls à pouvoir être punis, puisqu’on est la seule organisation officielle de supporters. On a été des boucs émissaires

Alexandre Chpryguine, supporter russe

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Alexandre Chpryguine a été écarté du comité d’organisation du Mondial. L’été dernier, son "ID Fan", son laisser-passer pour la Coupe des confédérations a été annulé, dit-il. L’homme, qui posait ces dernières années aux côtés de Vladimir Poutine ou du ministre des Sports, n’exclut pas de fuir à l’étranger pendant la Coupe du monde pour éviter des soucis avec les forces de l’ordre.  

Sécurité renforcée dans les stades

Les autorités ont voulu diffuser un message de dissuasion, avec des mesures concrètes comme la présence de vigiles privés dans les stades ou des "prises de contact" des forces de sécurité avec certains supporters, explique Ronan Evain, directeur du Football Supporters Europe (FSE), un réseau européen de supporters, spécialiste des "fanats" russes. "Des services de renseignements et des services de police contrôlent, rendent visite aux supporters radicaux identifiés pour simplement leur rappeler les risques qu'ils prennent s'ils devaient se livrer à une démonstration de violence pendant la Coupe du monde", explique Ronan Evain. Ces mesures semblent surtout viser à limiter les dégâts.

L'idée, ce n'est pas une solution de long terme, ce n'est pas d'éradiquer ces pratiques, c'est de mettre une couverture par-dessus pendant la Coupe du monde

Ronan Evain, directeur du Football Supporters Europe

franceinfo

Les interdictions de stade sont une autre mesure de court terme. La liste atteint désormais près de 400 noms. Les supporters susceptibles de prendre part aux violences seraient toutefois 10 fois plus nombreux, selon Ronan Evain, et les interdictions de stade n’empêchent pas les débordements ailleurs. Il y a deux semaines, un supporter ultra est mort lors d’un affrontement organisé dans un bois de Novossibirsk.      

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