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Foot : le juste prix de la Ligue 1, c'est combien ?

La L1 vaut-elle 600 millions d'euros par saison, comme aujourd'hui ? "C'est plus", affirme Frédéric Thiriez, qui a lancé les enchères entre Canal+ et beIN Sports le 10 mars. Et tout porte à croire que la balle est dans son camp.

Article rédigé par Pierre Godon
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Le président de la Ligue de football professionnel, Frédéric Thiriez, le 3 octobre 2013, à Paris. (MEIGNEUX/SIPA)

La vitrine est alléchante. Ibrahimovic, Falcao et Cavani sont désormais les têtes de gondole de la Ligue 1. Le président de la Ligue de football professionnel, Frédéric Thiriez, a donc anticipé l'appel d'offres des droits télé du championnat, pour la période 2016-2020, lundi 10 mars. Tel Philippe Risoli sur le plateau du "Juste prix", pour lui, la Ligue 1, c'est plus que les 600 millions versés actuellement par Canal+ et beIN Sports. Beaucoup plus ?

C'est plus, car la Ligue 1 est sous-évaluée

"La Ligue 1 vaut beaucoup plus cher que ce qu'elle vaut aujourd'hui, clame haut et fort Frédéric Thiriez sur Europe 1, mercredi 12 mars. Sur la période 2012-2016, nous avons subi une baisse des droits télé, c'est unique au monde. Il faut que la France se trouve enfin à son niveau, troisième des grands championnats européens." 

Pour le moment, la L1 se traîne derrière la Premier League anglaise (1,2 milliard), la Série A italienne (850 millions) la Liga espagnole (650 millions) et même la Bundesliga allemande (630 millions). Ces chiffres ne représentent que les droits domestiques, objet du prochain appel d'offres.

"Sportivement, la Ligue 1 n'est pas sous-évaluée, en tenant compte du spectacle et des performances de ses clubs en Coupe d'Europe, analyse l'économiste Lionel Maltese, professeur de marketing sportif à l'université d'Aix-Marseille, interrogé par francetv info. Mais la tendance est à la hausse, à cause des investissements au PSG ou à Monaco."

C'est plus, car le contexte est favorable

"Le contexte est très favorable, commente Vincent Chaudel, économiste chez Kurt Salmon, contacté par francetv info. Les deux acteurs [Canal+ et beIN Sports] sont en bonne santé, s'intéressent grandement au produit et sont en capacité d'enchérir." Ce qui ne sera peut-être plus le cas dans quelques mois : Canal+ réclame 300 millions d'euros à beIN Sports pour concurrence déloyale, et la chaîne qatarie a contre-attaqué en réclamant 60 millions d'euros pour dénigrement (elle pourrait par ailleurs lancer une attaque contre la procédure en faveur de Canal + pour les droits du rugby).

C'est plus, car la procédure est très courte

La fin des enchères est prévue début avril, les deux chaînes (et d'éventuels autres candidats) n'ont donc qu'un mois pour peaufiner leurs propositions. C'est très court, et ce n'est pas un hasard. A la LFP, on table sur ce "sentiment d'urgence" pour obtenir de bonnes propositions. Particulièrement chez Canal+, où le conseil de surveillance a changé de tête il y a peu.

C'est plus, car aucune des deux chaînes ne peut se permettre de perdre

D'après France Football, la LFP rêve d'obtenir 800 millions d'euros annuels. Un montant qui pourrait même être dépassé. "C'est un actif stratégique pour les deux chaînes. Dans ces cas-là, il n'y a pas que la règle à calcul qui compte, renchérit Frédéric Bolotny, économiste du sport, contacté par francetv info. Canal et beIN sont en position de concurrence frontale, c'est Canal + vs TPS puissance 2. A mon avis, on ne sera pas loin du milliard d'euros."

C'est plus, car le système des lots aux enchères a été modifié

La procédure a été simplifiée. Terminés, les droits segmentés par terminaux (tablettes, mobiles...), place à six grands lots. Le prix des deux premiers pourrait atteindre des sommets. "Les lots sont segmentés de manière à ce que celui qui aspire à diffuser le meilleur de la L1 doit acheter les deux premiers", note Frédéric Bolotny. 

C'est plus, car l'Euro se profile à l'horizon

L'Euro 2016 se déroulera en France... et coïncide avec le début de la période couverte par le nouvel appel d'offres. "La Coupe du monde 2006 en Allemagne avait fortement renforcé l'intérêt médiatique pour le championnat allemand, rappelle Lionel Maltese. Par exemple parce que des joueurs qui s'étaient révélés en équipe d'Allemagne évoluaient en Bundesliga. La Ligue 1 est en mesure d'avoir plusieurs joueurs évoluant chez les Bleus au moment de l'Euro."

C'est moins, car personne ne veut l'exclusivité

En 2004, Canal+ avait raflé l'exclusivité de la Ligue 1 en alignant 600 millions d'euros, montant record à l'époque, entraînant la mort de TPS, son rival. Une période révolue. "Ni Canal+, ni beIN Sports, ni le foot français n'ont intérêt à voir un des deux prétendants mourir, ajoute Vincent Chaudel. Pour les clubs, parce qu'il est loin d'être sûr qu'un nouveau diffuseur aura émergé en 2020, date du prochain appel d'offres. Pour la chaîne survivante, car elle devra promouvoir le produit seule pendant cinq ans. 

C'est encore plus, mais pas tout de suite

"Le foot français peut aller chercher une croissance des droits télé non négligeable sur le marché des droits internationaux", conclut Vincent Chaudel. Valorisés pour le moment à 30 millions d'euros, propriété d'Al Jazeera jusqu'en 2018, ces droits (différents des droits domestiques actuellement mis aux enchères) figurent encore à des années-lumières de ce qu'obtient la Premier League anglaise : 900 millions d'euros annuels.

Si vous avez aimé la bataille beIN Sports-Canal+ pour les droits de la Ligue 1, vous adorerez la deuxième manche pour ceux de la Ligue des champions entre 2015 et 2018, qui commence dans quelques jours.

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