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"Le Stratège" : comment gagner avec une équipe de losers (et Brad Pitt)

Le film, en salle mercredi, raconte comment un entraîneur de base-ball a conduit son équipe au sommet grâce à une méthode révolutionnaire.

Article rédigé par Pierre Godon
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Brad Pitt dans le film "Le Stratège", sur les écrans le 16 novembre 2011. (SONY PICTURES RELEASING FRANCE)

Le nouveau film avec Brad Pitt sort mercredi 16 novembre. Ça s'appelle Le Stratège, et c'est l'histoire de Billy Beane, l'entraîneur d'une équipe de base-ball qui se rend compte qu'il peut bâtir l'équipe du siècle à moindres frais grâce à un statisticien un peu bedonnant rencontré par hasard. Contrairement à ce qu'on peut penser à première vue, ce long métrage n'est pas destiné qu'aux personnes qui passent leurs nuits à calculer les compétences techniques de leurs arrières gauches sur Football Manager.


Le film, réalisé par Bennett Miller, raconte l'histoire du club d'Oakland (Californie), qui, avec une masse salariale de seulement 40 millions de dollars, a dominé le championnat au début des années 2000. Y compris les New York Yankees et leurs joueurs payés 120 millions de dollars. Grâce à un usage poussé des statistiques, le club a découvert des joueurs sous-évalués par le marché (trop jeunes, trop vieux, avec des profils intéressants mais pas très vendeurs) et a assemblé une équipe de revanchards. Cette histoire, le journaliste Michael Lewis l'a racontée dans son livre Moneyball (lien en anglais) au sous-titre évocateur : "L'art de gagner un jeu injuste".

La méthode a fait école aux Etats-Unis, mais aussi en Europe

Cette approche "rapport qualité-prix" a fait grand bruit outre-Atlantique. Le statisticien de génie a été embauché par les New York Mets (article en anglais), une grosse équipe. Une discipline statistique a découlé du travail de Billy Beane, les sabermetrics, du nom de la SABR, Society for American Baseball Research (existe aussi en mode basket, les APBRmetrics [lien en anglais]). Aujourd'hui, revers de la médaille, les méthodes de Beane ont été largement copiées et le club d'Oakland se retrouve en difficulté (article en anglais) face aux grosses équipes.

Brad Pitt lors de la conférence de presse de sortie du "Stratège" à Séoul (Corée du Sud), le 15 novembre 2011. (JO YONG-HAK / REUTERS)

Outre-Manche, cette méthode a fait école dans le football. Les recruteurs s'appuient de plus en plus sur des programmes de bases de données exhaustives comme Scout Seven pour analyser la performance de leurs joueurs (article en anglais) et en recruter de nouveaux. Ainsi, Alex Ferguson, l'entraîneur de Manchester United, a vendu son défenseur vedette, le Néerlandais Jaap Stam, au sommet de sa gloire en 2001, parce que les statistiques montraient qu'il taclait de moins en moins.

La performance en football est moins facile à quantifier que dans les sports américains où chaque joueur est jugé sur ses stats à la fin du match. Au basket, les shoots, les rebonds, les passes sont décortiqués : allez donc voir les stats de la carrière de Michael Jordan ! Dans le foot, les joueurs sont notés sur 10, comme à l'école, à partir d'une impression générale (article en anglais). On dira plus facilement que Kevin Gameiro a fait un match faiblard (3/10 dans L'Equipe) face aux Etats-Unis vendredi 11 novembre en amical plutôt que d'insister sur le fait qu'il n'a touché aucun ballon dans la surface adverse en première période.

Les principes de Moneyball théorisés pour le foot

Le livre Soccernomics a tenté de transposer quelques règles de Moneyball dans le foot. Voici ce que ça donne :
- n'achetez pas de Brésilien, un sur deux ne s'acclimate pas en Europe
- n'achetez que des joueurs qui ont une petite vingtaine d'années. Pas plus (ils deviennent trop cher), pas moins (un sur deux ne confirme pas)
-  mâchez le travail à vos nouvelles recrues en dépêchant auprès d'elles un assistant pour les aider à trouver un logement, etc.
- les clubs qui paient le mieux leurs joueurs réussissent mieux que ceux qui les achètent très cher
- remplacez vos joueurs avant de les vendre.

Tout cela fait penser à la stratégie d'Arsenal : Arsène Wenger s'est fait une spécialité de dénicher des jeunes joueurs inconnus (souvent français) en Angleterre et de les emmener au sommet. Même Billy Beane a encensé Wenger (article en anglais).

 

Mais n'allez pas croire que Le Stratège est une ode aux statistiques. "C'est l'histoire d'amour entre un homme et son job", résume Rachael Horovitz, la productrice, au quotidien américain The Los Angeles Times (article en anglais). Et c'est aussi une des dernières occasions de voir Brad Pitt sur grand écran avant sa retraite...

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