A Lens, la Ligue 1 et ses retombées attendues par tout le bassin minier
Confinement oblige, Lens et ses supporters n’ont pu fêter le retour du club en Ligue 1. "Ce n’est que partie remise, la fête n’en sera que plus belle pour le premier match de la saison en public", prévient Jean-Paul Dambrine, dont les friteries Sensas sont une institution locale : "Je sers des frites au stade depuis 1976, et j’ai fêté mes 51 ans de métier le jour de l’annonce de la montée, comme quoi…", sourit le roi de la frite. "A Lens, deux choses influent sur le moral : la météo, et surtout le RCL. Là, tout est au beau fixe", résume Sophie Wilhelm, directrice de l’office du tourisme Lens-Liévin. Propriétaire d’un gîte, Pierre Delroise évoque son soulagement, tandis que le directeur de l’hôtel du Louvre, Antoine Bouihol, raconte : "J’échangeais par mail avec le président du club au moment de l’annonce. On a sabré le champagne à distance".
Une montée qui donne la frite
Après une décennie de galère avec 8 saisons en L2, le RC Lens va retrouver la Ligue 1. Et c’est toute une ville et ses habitants qui s’en réjouissent, qu’ils aiment le football ou non. "Même si, quand on est Lensois, aimer le foot, c’est un trait d’ADN", sourit Sophie Wilhelm. Et pour cause, jouer en première division draine des retombées positives pour tous les secteurs. Et à Lens, au cœur de l’ancien bassin minier, peut-être encore plus qu’ailleurs. "Le club a un réel impact direct et indirect sur la vie économique de Lens, en plus du musée", considère le directeur de l’hôtel du Louvre. "La ville n’a jamais perdu espoir. Et même en Ligue 2, le foot l’a beaucoup aidée. Il y avait encore du monde au stade", assure Jean-Paul Dambrine. En moyenne, le RC Lens jouait devant 25 000 spectateurs, soit la cinquième affluence de France tout championnats confondus.
On va s’adapter en augmentant nos quantités dans chaque baraque à frites, et aussi en terme de personnel. En Ligue 2, on avait une trentaine de vendeurs, en L1 ce sera cinquante, minimum.
Avec la Ligue 1, les 38 000 places du stade Bollaert devraient trouver preneur à chaque rencontre, ou presque."La L2, c’est champêtre. C’est sympa au début, mais accueillir l’OM, Saint-Etienne ou Paris, c’est autre chose", concède Pierre, dont les chambres d’hôtes ont vu passer de nombreux supporters de L2 : "On s’est fait de très bons amis strasbourgeois", raconte-t-il. "On a un stade de 38 000 places dans une ville de 30 000 habitants, alors forcément, un jour de match offre des journées records aux commerçants, même si ce n’est que toutes les deux semaines", assure Jean-Paul Dambrine, qui connaît bien le marché local. "On va s’adapter en augmentant nos quantités dans chaque baraque à frites, et aussi en terme de personnel. En Ligue 2, on avait une trentaine de vendeurs, en L1 ce sera cinquante, minimum". Et il n’y pas que les friteries Sensas qui vont créer de l’emploi chaque week-end de match.
Supporters, joueurs et journalistes attendus dans les hôtels
Du côté des hôtels, la nouvelle est aussi accueillie à bras ouvert : "En général, dans le stade, il n’y a que 15% de vrais lensois. Le reste des supporters vient de tout le Nord, et de plus loin", précise Pierre Delroise. "Des personnes vont venir redécouvrir Bollaert, son ambiance et ses frites : des Parisiens, des Marseillais, des Lyonnais", imagine déjà Jean-Paul Dambrine. "Et ces personnes, en plus de tous les journalistes etc, elles doivent bien se loger. Ça tombe bien : jusqu’ici on est plein en semaine, mais pas le week-end", éclaire le directeur de l’hôtel du Louvre, Antoine Bouihol. "On a aussi de plus en plus d’anglais qui viennent retrouver à Lens ce que leurs stades ont perdu aussi", ajoute Pierre.
A l’annonce de la montée, certains employés se sont imaginés voir le PSG, l’OM ou Lyon dans notre hôtel. C’est hors de question : je ne veux pas de Neymar dans mon hôtel.
Et il n’y pas que les supporters qui investiront les chambres. Il faudra aussi héberger les journalistes, les techniciens, ainsi que les équipes et leur staff technique. Ouvert il y a un an et demi, l’hôtel de Louvre Lens est ainsi devenu le QG des Sang & Or : "On accueille les mises au vert du club depuis cette saison. Le RCL a pris ses habitudes, et le club se sent chez lui ici", apprécie Antoine Bouihol, qui prévient : "Cela veut dire qu’on refusera d’accueillir tout autre équipe. A l’annonce de la montée, certains employés se sont imaginés voir le PSG, l’OM ou Lyon dans notre hôtel. C’est hors de question : je ne veux pas de Neymar dans mon hôtel. Je n’ai rien contre lui ou le PSG (rires), c’est juste qu’on doit soutenir le club à notre façon, même si économiquement on pourrait faire payer les gros clubs plus cher". Les supporters adverses seront toutefois bienvenus dans les établissements lensois.
Plus qu’un club, un pilier touristique
Cette vague « Ligue 1 », la ville Lens compte bien la surfer au quotidien. Ou du moins, au delà des jours de match. "Nous, commerçants, on ne sera pas les seuls à en profiter. Tout l’argent amené par le foot va être redistribuer en ville, sur le commerce local, affirme Jean-Paul Dambrine. Il faut voir le centre-ville un jour de match : ça grouille de monde dès le matin". Surtout, avoir un club à ce niveau implique une médiatisation nationale et internationale inestimable. "C’est bien plus fort pour nous que n’importe quelle campagne publicitaire", se réjouit Sophie Wilhelm. "Le club et son public donnent une image beaucoup plus positive du bassin minier que ce qu’on entend parfois", appuie Pierre Delroise. "Le bassin minier a beaucoup changé, et c’est une région pleine de trésors qui vont être redécouverts grâce à la médiatisation du club", ajoute Antoine Bouihol.
Vanté pour la ferveur unique de son public, le Racing Club de Lens est ainsi devenu bien plus que le club de la ville. "C’est notre plus belle vitrine", estime Pierre Delroise, conforté par Sophie Wilhelm : "C’est un symbole, et un atout très, très attractif et un pilier de notre offre touristique. Avec le Louvre Lens, les sites miniers classés à l’UNESCO, et ceux de la Première Guerre Mondiale. C’est un tout, mais que le RCL sublime en étant en Ligue 1". Pour preuve, à chaque visite de bloggers ou journalistes lointains, Sophie et ses équipes s’arrangent pour les accueillir un jour de match. "Ces jours-là, Lens revêt ses plus beaux habits Sang & Or", justifie la directrice de l’Office du tourisme. "Notre stade est très proche du centre-ville, donc les jours de match, c’est la fête toute la journée", témoigne Pierre Delroise.
Au delà des jours de match
Pour que la fête se prolonge au quotidien, les acteurs du tourisme lensois s’organisent déjà. "On réfléchit à des packages nuit d’hôtel, repas, billet pour le stade et musée", avance ainsi Antoine Bouihol. Il explique "Le but, c’est réussir à fixer les gens tout un week-end sur Lens. Autour du match, il y a d’autres choses à faire ici, et ce tourisme sport-culture se développe". Le directeur d’hôtel étudie notamment une offre clé en main pour les touristes venus d’Angleterre, de plus en plus nombreux à redécouvrir le RC Lens et son ambiance, notamment depuis le match Pays de Galles - Angleterre de l’Euro 2016, disputé à Bollaert. Guide amateur, Pierre Delroise sent déjà cette tendance : "Il n’y a pas que le stade. Les gens vont venir à Lens pour voir Bollaert, mais aussi le reste. Les demandes de visites des corons, des mines ou des sites de la guerre vont exploser".
Le RC Lens en L1, ça nous rend notre fierté, mais c’est surtout la dernière pièce du puzzle après l’UNESCO, le Louvre et le redressement économique. Maintenant, toutes les planètes sont alignées pour le bassin minier.
Justement, les choses évoluent du côté de l’office du tourisme, qui pour le moment ne propose que des visites guidées du stade : "On avait déjà des projets de nouvelles visites et packages en développement, ils seront officiels bientôt. Notre objectif est de multiplier les expériences entre Bollaert, les mines, les sites de la Grande guerre, les brasseries… Souvent, en partant les gens nous disent qu’ils ne pensaient pas qu’il y avait autant de choses à faire à Lens et autour", éclaire Sophie Wilhelm, qui décrit des possibilités de week-ends entre amis ou en famille. "Le bassin minier ne demande que cela. On est une population très accueillante, et la région relève la tête depuis dix ans", avance Pierre Delroise, qui conclut : "Le RC Lens en L1, ça nous rend notre fierté, mais c’est surtout la dernière pièce du puzzle après l’UNESCO, le Louvre et le redressement économique. Maintenant, toutes les planètes sont alignées pour le bassin minier".
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