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Baisser le salaire d'un joueur sans son accord en cas de relégation, la Cour de Cassation dit non

Dans un arrêt du 14 septembre, la Chambre sociale de la Cour de Cassation, saisie par un ancien joueur de Guingamp, a remis en cause indirectement la Charte du football professionnel et son article 761. En effet, la plus haute juridiction de l'ordre judiciaire a estimé qu'un club ne peut pas imposer, sans l'accord du joueur professionnel, une baisse automatique de 20% de son salaire en cas de relégation du club dans lequel il évolue. Or, c'est ce que dit la Charte, qui a valeur de convention collective du football professionnel.
Article rédigé par Thierry Tazé-Bernard
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 3min
L'attaquant Mathieu Scarpelli, sous le maillot de Guingamp en 2010 (JEAN-FRANCOIS MONIER / AFP)

Mathieu Scarpelli va-t-il être à l'origine d'un grand bouleversement dans le foot français ? Joueur de Guingamp entre 2009 et 2011, il avait refusé la baisse de salaire imposée par son club au moment de sa relégation en Ligue 2. L'En Avant s'appuyait sur la Charte du football professionnel, qui autorise les clubs de Ligue 1, relégués en Ligue 2, à baisser les salaires jusqu'à 20%: "En cas de relégation en division inférieure, le club a la faculté de diminuer le montant des contrats de ses joueurs professionnels", indique le texte. Pour ceux descendant de Ligue 2 en National, c'est jusqu'à 15%, ou jusqu'à 10% s'il s'agit d'un premier contrat pro.

Les partenaires sociaux voulaient ainsi offrir une possibilité aux clubs relégués, qui bénéficient de moins de rentrées financières en raison d'une rétrogradation, de réduire leur masse salariale. Car avec des personnes sous contrat à durée déterminée, la rupture du contrat est particulièrement encadrée, et soumise à des règles strictes. Le joueur avait engagé une procédure judiciaire en 2011, sur ce point mais aussi sur d'autres (notamment une prolongation automatique de contrat d'une année), pour lesquels il a été débouté par les différentes juridictions.

La Cour de Cassation avait déjà jugé de la même manière en février dernier

Mais, alors que les Conseils des Prudhommes puis la Cour d'Appel de Rennes avaient donné tort au joueur en première instance, la Cour de Cassation lui a donné raison sur la question de sa rémunération. Elle a rappelé que les dispositions du Code du travail s'impose sur la convention collective lorsqu'elles sont plus favorables aux salariés: "Sauf disposition légale contraire, une convention collective ne peut permettre à un employeur de procéder à la modification du contrat de travail sans recueillir l'accord exprès du salarié", précise l'arrêt. Une décision qui suit le même chemin emprunté en février dernier, entre le club de Nantes et un de ses joueurs. Antoine Semeria, avocat expert en droit du sport, rappelle que les conventions collectives ne peuvent être dérogatoires au droit commun que si les dispositions sont favorables au salarié. Ce n'est évidemment pas le cas en l'espèce. Du coup, l'article 761 de la Charte du football professionnel est indirectement épinglé par la plus haute juridiction de France. 

La Cour de Cassation renvoie ainsi l'affaire devant la cour d'Appel d'Angers. C'est désormais elle qui reprendra l'affaire, et devra de nouveau juger en droit et en fait. Si elle va dans le sens de l'arrêt de la Cour de Cassation, la cour d'Appel d'Angers remettra en cause le principe de cet article 761. Cela pourrait alors contraindre la Ligue de football professionnelle (LFP) à revoir, à terme, cet article faute de pouvoir être appliqué. Et cela obligerait les clubs à revoir également leur copie, pour ne pas risquer d'avoir une masse salariale bien trop importante en cas de relégation.

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