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De retour en Ligue des champions, l'OM ne doit pas se voir trop beau

Muet depuis plusieurs semaines, l’Olympique de Marseille est sorti de son silence via un communiqué ce samedi, dans lequel le président Jacques-Henri Eyraud et le propriétaire Frank McCourt prennent la parole. L’objectif : rassurer les supporters, se réjouir des résultats de club et étouffer au passage les rumeurs de vente. Qualifié en Ligue des champions, l’OM a de quoi être heureux. Mais derrière les sourires de façade, attention à ne pas se voir trop beau. 
Article rédigé par Adrien Hémard Dohain
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 4 min
 

Le plan com’ est lancé. Samedi sur les réseaux sociaux de l’OM, une vidéo “We are back” annonce fièrement le retour du club en Ligue des champions. Oui, l’OM va retrouver la scène européenne, après un an d’absence. Mieux encore, Marseille disputera la C1 pour la première fois depuis 2013-2014. Sept longues années pendant laquelle la reine des coupes d’Europe a autant manqué à l’OM que l’inverse, tant le club phocéen sait y faire avec les soirées européennes. Car au delà de son titre de 1993, de sa finale perdue en 1991 et des trois autres en Europa League (1999, 2004, 2017), l’OM, comme sa ville, est tourné vers l’Europe. Mais à l’heure de célébrer ce retour, le plus européen des clubs français ne doit pas se voir plus beau qu’il ne l’est.

L’illusion de la formation

D’abord, cette qualification sera toujours entourée d’interrogations, étant donné son contexte. Deuxième depuis le 10 novembre, invaincu pendant 14 matches et capable de battre tous les cadors du championnat sauf le PSG, Marseille mérite indéniablement sa qualification. Là n’est pas la question. Toutefois, les Marseillais avaient une fin de saison compliquée à négocier avec, entre autres, des déplacements à Montpellier, Lyon et Reims, et les réceptions du PSG, Nice et Monaco. Et le retour de Florian Thauvin n’assurait pas de sortir indemne de cet enchaînement même si, avec 7 points d'avance sur Lille (4e), l'OM pouvait voir venir.

Au delà ces questions dont personne n’aura jamais la réponse, c’est surtout la communication du club qui est à relativiser. Dans le communiqué, le président Jacques-Henri Eyraud souligne ainsi “à quel point la formation de l’Olympique de Marseille a franchi une nouvelle dimension et se situe désormais au centre du projet”.  Si de vrais efforts ont été faits en ce sens, les effets ne se feront sentir qu’à moyen terme. Cela peut donc être difficile à entendre pour les supporters olympiens, alors que le diamant de ce même centre de formation, Isaac Lihadji, s’apprête à signer libre à Lille, un concurrent direct. Certes, Boubacar Kamara s’est affirmé cette saison, mais la formation olympienne est encore loin des références françaises en la matière. Si tant est qu’elle joue dans la même cours.

Des finances dans le rouge

Cela peut d’autant plus prêter à sourire lorsque l’on sait que la plupart des jeunes intégrés au groupe le sont faute de moyens financiers pour attirer des éléments reconnus. L’argent, ou plutôt son absence, c’est justement ce qui devrait pousser l’OM à faire profil bas. Comme répété plusieurs fois par André Villas-Boas et Dimitri Payet cette saison, se qualifier pour la Ligue des champions, c’est un chose, bien y figurer, c’en est une autre. Une leçon que Marseille avait appris à ses dépends en 2013-2014, avec un zéro pointé dans le groupe de la mort contre Naples, Arsenal et Dortmund.

Or, l’argent, l'OM n'en a plus. Le club est dans le viseur du fair-play financier de l’UEFA à cause de ses déficits à répétition. Pour se refaire une santé, Marseille compte sur les revenus de la Ligue des champions (environ 50 millions d’euros, minimum), mais ils ne suffiront pas. Après avoir beaucoup investi sur le mercato, l'OM espérait réaliser de belles ventes cet été (Sanson, Caleta-Car, Kamara ?). Or, en plus d’affaiblir un effectif déjà trop juste pour la C1, ces ventes sont en suspend à cause de la pandémie de Covid 19. En effet, la crise actuelle a fait chuter la valeur des joueurs de 28% selon le CIES. Et plus encore pour l’OM, forcé de vendre, ce qui n’aide jamais dans une négociation.

La C1 comme sauveur

Alors, le club phocéen peut toujours se targuer d’être dans le top 20 européens sur les réseaux sociaux ou en terme d’affluence au stade (53 039 de moyenne, un record), ces chiffres flatteurs ne masquent pas ceux qui inquiètent. Là est tout le paradoxe de l’OM, exprimé par son président : “Après avoir achevé la première phase de notre plan, avec des investissements massifs pour relancer le club, nous entamons à présent la deuxième phase avec des performances sportives, une qualité d’infrastructures et un centre de formation en très net progrès”, prétend Jacques-Henri Eyraud. 

Pour le centre de formation, les efforts - réels et conséquents - menés se verront d’ici quelques années. En ce qui concerne les performances sportives, la qualification de cette année ne garantit rien pour le futur proche. Privés de coupe d’Europe la saison prochaine, Monaco et Lyon risquent de revenir forts dans la course au podium, comme Lille, vexé par sa quatrième place cette saison. Pour y faire face, l'OM doit se mettre au niveau économiquement car, après avoir beaucoup dépensé, le club se retrouve là où il voulait être, mais avec les caisses vides. Et cela, Eyraud le sait. La preuve, dans le communiqué, il ne nie pas le problème : “Nous devons désormais relever le défi de la pérennité économique de notre modèle”.  Ce qui passe par une campagne européenne réussie.

Après tout, avec un bon tirage et une ou deux belle ventes, l’OM pourrait se redresser financièrement grâce à la C1, sans résoudre tous ses problèmes. A l’inverse, un parcours aussi catastrophique qu’en 2013 ferait très mal à Marseille et à la crédibilité de son projet. Autrement dit, si Frank McCourt a vraiment l’intention de “partager les années à venir aux côtés de ces supporters magnifiques”, comme il l’a répété pour couper court aux rumeurs de ventes, il risque de remettre la main à la poche. Parce qu'aujourd’hui, Marseille est en Ligue des champions, Marseille a mérité cette qualification, mais Marseille ne semble pas avoir les moyens de ses ambitions. 

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