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Ligue 1 - Droits TV : après Roland-Garros, Amazon étend un peu plus son empire médiatique

Après Roland-Garros, le géant Amazon frappe un coup énorme dans le paysage du sport français en s'attribuant les droits de diffusion de la Ligue 1.

Article rédigé par Loris Belin, franceinfo: sport
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 4 min
Amazon et la Ligue de Football Professionnel, deux nouveaux partenaires pour la diffusion de la Ligue 1 et de la Ligue 2 (MARTIN BUREAU / AFP)

Du commerce de livres depuis un petit bureau de l'Etat de Washington à la diffusion de Clermont – Reims, Amazon en a fait du chemin. Fermement installée comme la principale plateforme de e-commerce dans le monde, l'entreprise américaine étend un peu plus ses pouvoirs jusque dans le Championnat de France de football. La Ligue de football professionnel a ainsi retenu, vendredi 11 juin, l'offre du "petit nouveau" face aux habitués Canal + et BeIN Sport, snobés et particulièrement agacés. La Ligue 1 et la Ligue 2 se regarderont au moins majoritairement sur Prime Video à compter de la saison prochaine. Après ses débuts autour des courts de Roland-Garros cette année, la montée en puissance de la plateforme dans le marché des droits sportifs n'a rien d'anodine.

La stratégie d'acquisition d'Amazon consiste à frapper fort, mais avec précision sur des compétitions de grande envergure. L'inverse en somme d'un BeIN Sports, qui avait cherché à ses débuts à faire autant dans la qualité de sa programmation, que dans la quantité. Et alors que Canal +, par la voix de son grand patron Maxime Saada, n'a cessé de clamer qu'il ne sortait le chéquier que pour des affiches premium, faute de rentabilité, Amazon ne fait pas tant de manières. Notamment parce que ses intérêts sont ailleurs.

Prime Video, une des nombreuses constellations de la galaxie Amazon

Sa plateforme de diffusion Prime Video s'inscrit dans un large écosystème, nommé Amazon Prime, qui comprend aussi bien Prime Video, son foot, ses séries et films à volonté, que la livraison gratuite de colis sur le site marchand d'Amazon par exemple. Exactement le genre de services qui font fureur autour de Noël, le moment où les Anglais se réunissent autour du sapin puis de leur TV pour suivre le Boxing Day de Premier League, qu'Amazon avait récupéré outre-Manche en 2019 contre 100 millions d'euros.

La plateforme Prime Video sur mobile et sur TV connectées (INDRANIL ADITYA / NURPHOTO)

Aller chercher un nouveau public pour ses services par le biais du sport, Amazon s'en est fait un crédo. Aux Etats-Unis, la firme de Jeff Bezos avait fait sensation en s'octroyant en 2017 les diffusions de plusieurs rencontres de saison régulière de NFL, le championnat de football américain, ligue sportive la plus suivie dans le pays. Plutôt que de s'aligner sur les milliards de dollars posés sur la table pour le Super Bowl, Amazon vise des droits plus ciblés, à l'image des principales affiches de la Ligue des champions en Allemagne, et en Italie dès la saison prochaine. Et peut aller ensuite draguer des spectateurs plus jeunes grâce à son autre plateforme de diffusion Twitch.

Le site de streaming, originellement destiné à la diffusion de sessions de jeux vidéo, est un des autres confins de la galaxie Amazon. La firme pourrait bien utiliser le football français comme un produit d'appel sur Twitch, comme elle l'a fait avec la NFL avec un match diffusé sur la plateforme cette saison, et capter son public jeune (notamment par le biais d'influenceurs), celui-là même que l'on dit de moins en moins intéressé par le ballon rond.

Des fonds et des opportunités pour le football français

Après le désastre Mediapro, fiasco économique et d'image, la venue d'Amazon comme nouveau partenaire a des airs d'aubaine pour la Ligue 1 et la Ligue 2. Le site américain a su se montrer convaincant grâce à une offre synonyme de stabilité après des mois de chaos : un montant total plus faible que celui du binôme Canal – BeIN, mais une part fixe plus élevée et le gage de sérieux financier d'une des plus grosses entreprises au monde. Alors que la LFP court encore après les centaines de millions promises par Mediapro, cet apport immédiat estampillé Prime Video est une respiration financière bienvenue pour les clubs.

En coulisses, la venue des géants du numérique est une hypothèse évoquée depuis déjà quelque temps dans le football français. En 2018 déjà, quand Mediapro avait surpris tout le monde par une offre mirobolante, les premières voix officielles se réjouissaient, sans le crier trop fort, du possible intérêt de Google ou Amazon pour les droits sportifs. Les GAFA étaient alors vus comme un concurrent de plus sur le marché pour tirer les négociations vers le haut et un partenaire aux reins suffisamment solides comme solution de secours si le modèle de diffusion classique "télévisuel" venait à péricliter.

La montée en puissance de la marque d'e-commerce dans l'Hexagone, avec son arrivée retentissante à Roland-Garros cette année (diffusion des “night sessions” et du court Simonne-Mathieu), ne l'a rendu que plus crédible aux yeux de la LFP au moment d'envisager sa candidature. Sa capacité à dépoussiérer son audience est un argument de plus en sa faveur. Intérêts financiers, placement face à la concurrence (alors que Netflix n'a pas investi le domaine des droits sportifs)... à croire que pour une fois, quand on parle de droits TV dans le foot français, un accord fait principalement des heureux.

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