Ligue 1 : Monaco, une demi-saison en enfer
"Elle a été catastrophique", reconnaît le vice-président Vadim Vasilyev. Monaco, 19e avec 13 unités et seulement deux points d'avance sur la lanterne rouge, continue de s'enfoncer vers la L2. "La crise est grave. D'abord il faut récupérer les blessés. Ensuite, se renforcer fortement. Enfin, ne rester qu'avec les joueurs qui en ont envie", a analysé Vasilyev. Lui qui pensait recruter deux éléments en janvier, songe désormais à renouveler en profondeur les 62 pros de l'effectif. Le mal est abyssal.
Mal embarquée dès l'été, avec de nombreux acteurs du Mondial (Subasic, Sidibé, Glik, Chadli, Golovin) en souffrance, l'équipe, alors dirigée par Leonardo Jardim, n'a pas su intégrer les nouveaux, ni effectuer une bonne préparation. Encore une fois, la direction avait décidé de vendre ses cadres pour recruter des jeunes à fort potentiel. Sans Fabinho, Moutinho et Lemar, l'instabilité a été chronique. D'autant que Monaco s'est aussi séparé d'éléments initialement recrutés pour faire une année supplémentaire (Kongolo, Diakhaby, Meité, Baldé et Ghezzal) et permettre aux jeunes de s'épanouir.
Erreurs de casting
Monaco a dépensé 40 millions d'euros sur Geubbels, Matazo, Panzo, Navarro, Diop, Isidor, Colina, Ribeiro et Ayiah. Tous mineurs à leur signature. Or, le groupe regorgeait déjà de pépites à polir (Mboula, Pellegri, Sylla, Serrano ou Traoré), et de premiers contrats professionnels maison (Badiashile, Massengo, Gouano, Thuram, Faivre). Un trop-plein de jeunes, qui fait dire à Vasilyev: "Le futur du club est assuré. Maintenant, il faut assurer le présent".
Golovin, recruté 30 millions d'euros, Aholou (14), Barreca (12), Pelé (9), voire Pierre-Gabriel (6) et Grandsir (4) auraient dû être des hommes de base. Bilan: 75 millions sur six joueurs proches de l'erreur de casting. A l'arrachée, en fin de mercato, les signatures de Henrichs et Chadli devaient corriger: 32 millions dilapidés! "On a commis des erreurs dans le recrutement ces deux dernières saisons, souligne Vasilyev. Je les assume. On va réfléchir à ce sujet et tirer les bonnes conclusions."
Pas étonnant donc que la campagne européenne et le quotidien aient tourné à la débâcle. Rapidement, Jardim a vu qu'il n'y arriverait pas. Il a lâché et s'est assuré 9 millions d'euros d'indemnités. Son successeur, le champion du monde 98 Thierry Henry, a donné l'illusion d'un nouveau départ. Mais le challenge était compliqué pour quelqu'un d'inexpérimenté. Laissé sur le devant de la scène, il a longtemps été esseulé. De son président, le milliardaire Dmitry Rybolovlev, au directeur sportif Michaël Emenalo, tous l'ont laissé se débrouiller dans l'arène médiatique comme sur le terrain.
Mises en examen
Ce n'est que fin décembre que les choses ont bougé. Le secteur médical a été renforcé d'un pôle "préparation mentale, réathlétisation et performance". Franck Passi, entraîneur adjoint d'expérience a été recruté. En attendant qu'il devienne le Gasset de Blanc ou le Stéphan de Deschamps, les trois mois de passage à vide pourraient coûter cher. Si Henry a été lâché par sa direction, c'est aussi car celle-ci a failli chavirer. Jamais depuis son rachat du club en décembre 2011, Rybolovlev n'a autant été attaqué.
Les révélations des "Football Leaks" ont empoisonné le quotidien de Vasilyev, qui dit "mal vivre la situation", et de ses directeurs généraux Nicolas Holveck et Bruno Skropeta. Elles ont aussi alourdi une ambiance interne déjà très pesante. Mais Rybolovlev a surtout été ébranlé par sa mise en examen pour "corruption" et "trafic d'influence" par la justice monégasque pour une affaire hors football, qui l'oppose au marchant d'art suisse Yves Bouvier. Mais dont les ramifications touchent de hautes sphères en Principauté. Avec Rybolovlev, son avocate, l'ex-garde des Sceaux, l'ex-ministre de l'Intérieur et trois hauts dirigeants policiers ont été mis en examen.
A tel point que, malgré ses démentis, la rumeur de vente du club gonfle. Le Prince Albert a même déclaré à Médiapart mi-novembre: "Si jamais tout cela était avéré, je pense qu'il se retirera de lui-même". En bon soldat, Vasilyev conclut: "Tout tombe en même temps. Ce qui se passe autour du président n'aide pas beaucoup. Mais je suis convaincu qu'il sera blanchi et que l'affaire n'aura pas de suite. Tout ce qui ne tue pas, rend plus fort". Pour l'instant, Monaco agonise...
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