Le Bayern, victime du syndrome Barca
Cela devait bien arriver un jour. Pep Guardiola n’avait encore jamais perdu en tant qu’entraîneur à Santiago Bernabeu. Avec le FC Barcelone, le Catalan restait sur cinq victoires et deux nuls dans l’antre du Real Madrid. Sa venue avec le Bayern a donc coïncidé avec son premier revers en Castille. Une défaite concédée contre le court du jeu, Benzema inscrivant le but de la victoire à la 19e minute sur son seul ballon de la rencontre touché dans la surface de Manuel Neuer. En ne laissant que 28% de possession aux Merengue, le Bayern s’exposait à un "match de handball". Un attaque-défense que les Madrilènes négocient à merveille.
"Le Real Madrid est une équipe de contre-attaque, la meilleure du monde", a assuré l’entraîneur catalan après la rencontre. "Je connaissais les risques en venant ici", a-t-il ajouté. Il connaissait le scénario mais n’a rien fait pour l’éviter. Et les attaques allemandes (18 tirs) sont venues se fracasser sur une défense madrilène parfaitement organisée autour de sa charnière Sergio Ramos-Pepe. Un duo qui a tout nettoyé, à terre comme en l’air, repoussant les 15 corners (à trois !) obtenus par le Bayern. "Jamais une équipe du Bayern n'a autant dominé le Real au Bernabeu", a souligné le directeur sportif allemand Matthias Sammer, mais cela n’a pas suffit.
La machine s’est cassée
La formidable machine à broyer ses adversaires du printemps dernier n’est plus. Celle qui avait triomphé sur la scène européenne sous Jupp Heynckes, celle qui avait étrillé le FC Barcelone sur la double confrontation (7-0 au total), mettant en lumière la stérilité offensive des catalans, a disparu Ou alors elle est en sommeil. En allant chercher Guardiola, celui qui avait construit l’identité du Barca, les Bavarois savaient que les choses allaient changer en Bavière. Le jeu direct et rapide du Bayern allait disparaître au profit d’un jeu plus posé, plus patient, fait de passes, de redoublements et de dédoublements. Au début la greffe a fonctionné, les prestations étaient abouties et les louanges pleuvaient sur le génie Guardiola.
Mais depuis ce titre de champion conquis à la fin du mois de mars, la machine n’est plus aussi écrasante. Le football des Bavarois ronronnent et ils ont appris à perdre à nouveau en Bundesliga. Ils se sont inclinés deux fois en trois rencontres après 53 matches sans défaite. De quoi soulever des critiques des anciennes gloires du club. "Je ne suis pas satisfait de la manière dont nous jouons. Il y a beaucoup trop de sautes de concentration et pas assez de dynamique de groupe. Je pense que nous sommes trop positifs et trop gentils les uns avec les autres", avait déclaré Matthias Sammer après la qualification en finale de la Coupe d’Allemagne. Une déclaration qui faisait écho à celle beaucoup plus virulente de Franz Beckenbauer.
Guardiola dans l’œil du cyclone ?
Le Kaiser a une voix qui pèse au sein du club de Bavière. Et quand il n’aime pas, il le dit. Fort. "On va finir par ressembler à Barcelone et plus personne ne voudra nous voir jouer. On risque d’ennuyer les fans. On dit à ces joueurs de se faire des passes jusqu’à la ligne de but. Si maintenant c’est ça la philosophie du Bayern, cela nous apportera peut-être des moments de joie mais nous allons finir par jouer comme le Barca et, quand on sera juste devant la ligne de but, on repassera la balle en arrière plutôt que de marquer. J’ai une autre vision du football. Si je peux tirer de loin, surtout face à une défense regroupée, alors je le fais. C’est une approche efficace". C’est clair, net et précis. Et le "mal" est bien identifié. Le tiki-taka du Barca, Beckenbauer n’aime pas. Dans la ligne de mire du Kaiser, Pep Guardiola, l’instigateur de cette nouvelle philosophie. Les critiques de la presse commencent aussi à poindre. Zeit Online résumait parfaitement la soirée en comparant le Bayern à "une abeille sans son dard, un taureau sans les cornes".
Des failles collectives et individuelles
Le Bayern est moins dangereux dans son expression collective, moins tueur. L’équipe se caricature à multiplier les passes selon ses détracteurs. Mais la raison est aussi à aller chercher du côté des intéressés. Quand la défense ne prend pas l’eau à l’image d’un Rafinha qui a sombré à Bernabeu sur son côté droit ou d’une charnière centrale en souffrance devant l’intelligence des déplacements de Benzema ou la vitesse de Ronaldo, c’est l’attaque qui pose problème. Bastian Schweinsteiger, qui était le premier à porter le danger l’an dernier, est dans le dur.
Et que dire de Franck Ribéry ? Le troisième du dernier Ballon d’Or a raté son match mercredi soir. Il n’a jamais pris le meilleur sur son vis-à-vis Daniel Carvajal, n’a adressé que quatre centres et n’a pas tiré une seule fois au but. Guardiola n’a pas hésité à le sortir avant le dernier quart d’heure. Le Français aura trouvé du réconfort auprès de ses coéquipiers et de son patron Karl Heinz Rummenigge qui a déclaré après la défaite que le Bayern avait "besoin de lui". Tout comme il aura besoin de retrouver son jeu offensif pour espérer retourner en finale.
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