Ligue des champions : Mathys Tel, itinéraire d'un prodige francilien qui a échappé au PSG et séduit le Bayern
Sept kilomètres. C'est la distance qui sépare le Parc des Princes, dont Mathys Tel foulera la pelouse mardi 14 février, du stade Jean-Lezer de Montrouge (Hauts-de-Seine), où il évoluait il y a trois ans. Né à Sarcelles, cet enfant de région parisienne, un des grands talents de sa génération, a été recruté par le Bayern Munich à seulement 17 ans, alors qu'il ne comptait que 79 minutes disputées avec les pros du Stade Rennais, où il a fini sa formation sans jamais être passé par le Paris Saint-Germain. Du poste de défenseur à celui d'attaquant, il a joué partout, au long de sa progression pour exploser devant le but.
Ses premiers pas en crampons, il les effectue à Villiers-le-Bel (Val d'Oise), à l'âge de six ans. "Il était déjà en avance d'un point de vue athlétique. Il dégageait une certaine facilité alors qu'il jouait dans un groupe que je surclassais toujours, avec une très bonne génération dont deux autres joueurs ont signé dans un club professionnel en formation", se souvient Eric Campaner, son premier entraîneur pendant cinq ans.
Les entraînements ne suffisent pas à Mathys Tel, qui fréquente le stade régulièrement après l'école. "Son père était sa victime préférée. Il le mettait dans les buts et le bombardait de frappes surpuissantes. Je peux vous garantir que le père avait les mains en feu à la fin du supplice", se souvient le responsable de l'école de foot de Villiers-le-Bel.
Des recruteurs qui n'ont d'abord "pas cru en lui"
Malgré ses qualités offensives, Eric Campaner fait jouer Mathys Tel en défense centrale. "Les terrains étaient trop petits pour lui. Ça lui donnait la possibilité de partir de plus loin balle au pied pour mieux mettre son potentiel en lumière", justifie-t-il. À l'époque, son talent n'éveille pas encore l'attention des recruteurs de la région. "À Villiers-le-Bel, nous n'avons pas d'équipes de jeunes en division régionale. Donc si on n'appelait pas les recruteurs, ils ne venaient pas, explique l'éducateur. On a fait une finale de challenge départemental en U10-U11, je suis allé voir les recruteurs du PSG pour leur signaler nos joueurs et qu'ils viennent les voir. Mathys y a fait un essai, mais ils n'ont pas cru en lui. Il a fait un essai à Lille aussi, mais il était un peu blessé, donc il n'a pas pu donner le meilleur de lui-même."
Finalement, Mathys Tel intègre un autre club parisien, le Paris FC, à 11 ans. Il n'y reste qu'un an avant de rejoindre l'Institut national du football de Clairefontaine (INF), sans attirer davantage l'intérêt du Paris Saint-Germain. "Il n'est pas passé sous les radars du PSG, qui l'avait bien identifié, mais qui lui a préféré d'autres profils, explique l'un de ses conseillers sportifs au sein de l'agence Clever One, qui gère ses intérêts. L'Île-de-France est un énorme bassin avec beaucoup de talents. Au moment d'entrer en préformation, tous n'ont pas encore développé toutes leurs qualités. Quand on recrute à l'âge de 12 ans, il y a forcément une marge d'erreur."
Rennes plus prompt et convaincant
Comme à Villiers-le-Bel, Mathys Tel s'entraîne au poste de défenseur à Clairefontaine la semaine, mais évolue désormais en tant qu'attaquant le week-end avec son nouveau club, la Jeunesse d'Aubervilliers. C'est à ce moment-là qu'il commence à éveiller l'attention de clubs professionnels. "Dès sa première saison à l'INF, en 2018, à treize ans, il signe un accord de non-sollicitation avec le Stade Rennais. Leur projet, les interlocuteurs et le côté scolaire ont plu à ses parents. Rennes sait très bien y faire dans ce domaine, puisque le club fait éclore beaucoup de jeunes", raconte son conseiller sportif. Cet accord permet au club breton de s'assurer qu'aucun autre club français ne proposera de contrat à Mathys Tel pendant trois ans. Le joueur ne peut cependant rejoindre la Bretagne qu'à l'âge de 16 ans, selon le règlement de la Fédération Française de football (FFF), résidant à plus de 50 kilomètres de Rennes.
Mathys Tel poursuit donc sa progression à Aubervilliers, mais quitte le club en 2019, frustré de ne pas assez jouer en U17 nationaux, dans une équipe qui joue le maintien. Il tape à la porte du Montrouge FC, sans plus d'assurance de temps de jeu. "Son agent m'a sollicité, et je rencontre donc Mathys et ses parents, se remémore Thomas Berlette, le coach des U17 Nationaux du club. Je leur explique que je le rencontre parce que j'ai entendu parler de lui, mais qu'on est deuxièmes du championnat, que je n'ai pas forcément besoin de lui, et qu'il ne jouera peut-être que des bouts de matchs. Il m'a répondu qu'il allait se battre à l'entraînement et qu'il jouerait. C'est ce qui s'est passé."
Loyal, il repousse l'intérêt de clubs étrangers
D'abord sceptiques à l'idée d'accueillir un nouveau coéquipier plus jeune de deux ans, les joueurs de Thomas Berlette comprennent vite à qui ils ont affaire : "Il était très professionnel à l'entraînement, focalisé sur sa progression, et posait beaucoup de questions pour s'améliorer", souligne le coach, qui le fait évoluer au poste d'attaquant. "Certains encadrants du Stade Rennais voulaient que je le fasse jouer au milieu, mais il faisait des différences et il n'y avait pas de raison de le faire descendre. Le but, c'était de lui apprendre les déplacements, les prises de balles offensives et comment se comporter dans la surface", décrit l'entraîneur.
Sa période montrougienne s'arrêtera de manière précoce avec le confinement en mars 2020. Elle aura néanmoins laissé le temps à des recruteurs étrangers de venir l'observer. "Des clubs allemands, anglais ou espagnols proposaient de le signer en cassant le contrat avec Rennes. Seuls des clubs étrangers en avaient la possibilité, mais Mathys et sa famille sont droits. Ils n'ont pas donné suite", assure l'éducateur.
Mathys Tel rejoint donc Rennes, en tant qu'attaquant, en 2020, et y gravit les échelons à une vitesse record. À 16 ans et 110 jours, en août 2021, il devient le plus jeune joueur à porter le maillot du club breton en championnat. La suite ? Avec seulement 79 minutes disputées en professionnel, le Bayern Munich le recrute l'été dernier. En septembre, le Francilien entre dans l'histoire du club bavarois, en devenant, contre Stuttgart, le plus jeune buteur du club bavarois en Bundesliga, à 17 ans et 136 jours. Auteur de quatre réalisations en 17 apparitions, il rêve désormais d'inscrire son premier but en Ligue des champions. Peut-être contre le PSG...
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