Ligue des champions : Rudi Garcia, l'heure de la reconnaissance a enfin sonné
"Être le vilain petit canard" : individu qui suscite le mépris, celui dont on a honte, le souffre-douleur. Une expression qui, à l'automne dernier, semblait encore sur-mesure pour Rudi Garcia.
Transfuge de l'OM, il débarquait à la mi-octobre dans le Rhône pour prendre la succession de Sylvinho sur le banc lyonnais. Forcément pas du goût des supporters de l'OL qui voyaient, quelques mois plus tôt, l'homme élégant de 56 ans multiplier les piques envers les protégés de Jean-Michel Aulas, en même temps - affront suprême - qu'il monopolisait le Groupama Stadium pour une finale de Ligue Europa avec Marseille. Dès lors, pas question de dérouler le tapis rouge pour le traître. Très vite, les sorties de son équipe sont scrutées, le moindre impair critiqué, ses choix tactiques mis au banc des accusés.
Garcia, de bricoleur à bâtisseur du plus bel exploit européen de l'OL
Dix mois après que Rudi Garcia ait posé ses valises, l'heure est à la rédemption. Enfin, à la compréhension tout du moins. Peu de suiveurs de l'OL auraient imaginé telle épopée en C1. Remettons tout de même les choses dans leur contexte : la victoire en quart de finale face à Manchester City (3-1) samedi dernier a signé le plus bel exploit européen du club jusqu'alors. La qualification aux dépends de Bordeaux il y a dix ans n'avait ni la même saveur, ni la même dimension. Toujours est-il que cet exploit porte bel et bien sa signature. De bricoleur du 4-3-3 à ses débuts, il est devenu le bâtisseur de ce 3-5-2 qui fait trembler l'Europe.
Bien sûr, il y a des choses à redire sur le parcours lyonnais en Ligue 1 cette saison, conclu par une 7e place - après clôture anticipée du championnat en raison de la pandémie - privant de fait l'OL de coupes continentales l'année prochaine. Mais qu'est-ce qui restera, fatalement, de cet étrange exercice 2019-2020 ? Probablement le meilleur, la substantifique moelle, on prend les paris...
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Le supplément d'âme qui manquait aux Gones ?
Pourtant, Rudi Garcia est, à y regarder de plus près, simplement en train de suivre sa ligne de conduite. Lors de son discours d'intronisation sur le banc de l'OL, l'ex-coach de Lille (2008-2013) et de la Roma (2013-2016) tenait, peu ou prou, le même discours qu'aujourd'hui face aux médias : "Tout le monde a envie d'une chose, que l'Olympique Lyonnais se remette à gagner (...) J'espère inculquer ma culture de la gagne au groupe. C'est à moi de convaincre les joueurs de mon projet de jeu, qu'ils aient envie de gagner à travers ce projet-là. Je n'oublie pas que mon équipe devra courir, être équilibrée, collective. Je sais où je suis. J'espère que cet Olympique Lyonnais, le mien, aura une âme."
Au regard de la performance collective de ses joueurs contre Pep Guardiola et ses ouailles, difficile de prétendre le contraire...
Des choix forts... et payants
C'est encore en s'appuyant sur la dernière rencontre des Lyonnais face à City que l'on peut se rendre compte des vrais choix forts effectués par le technicien français. En laissant le meilleur buteur de son équipe sur le banc au coup d'envoi d'un quart de finale de Ligue des champions, Garcia savait qu'il encourait une volée de noms d'oiseaux en cas de défaite.
Résultat : Moussa Dembélé a fait son entrée à la 75e minute, marqué un but quatre minutes plus tard avant de parachever la qualification des Gones en demi-finales de C1 à la 87e. "C'était une déception pour Moussa (Dembélé) de ne pas débuter, mais comme je lui avais dit, il allait être très important en entrant", expliquera-t-il après la rencontre. Un coup de maître, tout simplement.
Et que dire de la mise en avant parfaitement chronométrée du jeune homme aux trois poumons, Maxence Caqueret, 20 ans, devenu le fer de lance de l'entrejeu côté Lyon. C'est bien Rudi Garcia qui a donné sa chance au milieu de terrain originaire de Vénissieux. On mesure aujourd'hui à quel point le choix était judicieux.
Sans parler de cette défense à trois qui attire toutes les louanges : non content d'avoir totalement relancé Marcelo et Marçal, ce dispositif a redonné de la stabilité à une équipe qui en manquait tant. Repositionné couloir gauche, Maxwel Cornet n'a peut-être jamais été aussi heureux (et performant) sur son aile. Pareil à l'opposé avec Léo Dubois qui regagne en assurance après sa grosse blessure au ménisque. Des bonnes pioches tactiques qui trouvent un écho particulier en cette mi-août.
"Il nous reste des étapes à franchir"
"Je suis en train de vivre beaucoup de bonheur", laissait tout de même échapper celui qui voit tout à coup affluer les marques de reconnaissance. "Il est par procuration le bonheur d'un coach mais quand je vois la joie dans le vestiaire, je me dis que je suis dans le vrai. Il ne faut pas s'arrêter en si bon chemin. Ce n'est pas le soir de parler du Bayern Munich mais on n'est qu'en demi-finale, il nous reste des étapes à franchir." En cas de succès ce mercredi, c'est peut-être une place dans la légende qui l'attend.
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