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Méchouis, "survêt", champagne... Comment le prince Albert est devenu le meilleur serviteur de l'AS Monaco

Et si l'ultra le plus chaud côté monégasque n'était autre que son altesse sérénissime ? 

Article rédigé par Pierre Godon
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Le prince Albert de Monaco dans les tribunes du stade Louis-II avant Monaco-Arsenal, 8e de finale retour de la Ligue des champions, le 17 mars 2015. (VALERY HACHE / AFP)

Ses moulinets de bras font souvent désordre dans l'atmosphère guindée de la tribune officielle. "Je suis d'abord un supporter avant d'être le prince, pendant un match, je bous", reconnaissait Albert II dans Nice Matin. Mercredi 19 avril, il pourrait exulter autour de 22h35 si "son" AS Monaco écarte le Borussia Dortmund pour se hisser dans le dernier carré de la Ligue des champions. Un scénario probable, surtout après la victoire 3-2 des Monégasques à Dortmund lors du match aller.

Les méchouis du prince Rainier

Le prince Albert est tombé dans la marmite du football quand il était petit. Il use alors ses culottes courtes sur les chaises de la tribune officielle du vieux stade Louis-II aux côtés de son père Rainier III, qui a relancé le club de la principauté. A l'époque, hors de question de faire tourner les écharpes devant le gratin du Rocher. "Mon père avait la passion du football, mais l'exprimait avec plus de retenue que je ne le fais", constate pudiquement Albert dans une interview sur BeIN Sports.

C'est l'époque où le prince Rainier offre un méchoui aux joueurs de l'ASM à chaque tour de Coupe de France franchi, en 1974. Le jeune Albert en profite pour taquiner le ballon au milieu des pros. "Il se mettait dans les buts", se souvient Jean Petit, âme du club monégasque, un des rares qui tutoie toujours "Monseigneur" - le titre qui lui est réservé, selon le protocole. Pour la petite histoire, l'ASM s'arrêtera au cinquième méchoui, après sa défaite en finale face aux Verts (1-2).

Le Prince Albert joue gardien au jardin d'enfants, le 6 octobre 1962. (KEYSTONE-FRANCE / GAMMA-KEYSTONE)

Dans le bain à remous de Louis-II

Ado, il se rêve footballeur professionnel. C'est en survêtement bleu pâle qu'il se dévoile sur TF1 en 1977, tapant un ballon dans les rues de la principauté avec Henri Biancheri. "J'avais un niveau très modeste", euphémise le prince. Son formateur se souvient dans L'Express : "Il ne cherchait jamais à se distinguer des autres apprentis footballeurs". Longtemps, il a enfilé le maillot des Barbagiuans - au départ, une pâtisserie du cru, mais aussi le surnom de l'équipe de célébrités constituée autour du prince - avec un style plus physique que technique.

Rainier ne se déparait pas de la hauteur imposée par sa fonction dans ses rapports avec les joueurs du club dont le Palais est propriétaire. Avec ses faux airs de Marlon Brando dans Le Parrain, il avait ainsi appelé Jean-Luc Ettori, gardien du club, avant la finale de la Coupe de France 1992, lui lâchant avant de raccrocher :  "Je vivrais mal une défaite contre Marseille." Albert l'a joué plus complice à de nombreuses reprises. Un soir de titre de champion, en mai 1997, après un dernier match contre Nantes, "le prince avait fini avec nous à boire du champagne dans un jacuzzi", raconte l'ex-défenseur Franck Dumas à So Foot

Un an plus tard, devinez qui déboule dans les vestiaires après la qualification historique acquise face à Manchester United en quarts de finale de la Ligue des champions ? "C'est le prince qui a annoncé qu'on toucherait une double prime", raconte le défenseur belge Philippe Léonard. Et d'ajouter, énigmatique : "Il n'est pas le dernier à faire la fête."

Piste d'athlé et concert des Eagles

Albert II n'est jamais directement aux responsabilités, mais garde un droit de veto sur la vie du club. On murmure qu'il a tenté d'empêcher l'arrivée de trois joueurs marseillais au club (Porato, Luccin et Perez) peu après les échauffourées dans le tunnel du Vélodrome lors d'un OM-Monaco qui avait dégénéré sous l'œil des caméras. Seul Porato rejoindra la principauté. Le prince veille aussi à installer ses proches au club. Jérôme de Bontin, président de 2008 à 2009, ironisait dans Libération : "J'ai connu le prince Albert au collège. Je lui disais : 'Un jour, tu
me confieras la direction du club.'" Jusqu'à mandater un espion pour enquêter sur un possible repreneur du club, retoqué pour ses liens supposés avec la mafia.

Le Prince Albert de Monaco joue au foot lors d'un match de charité à Bilje, en Slovénie, le 21 juin 2015. (JURE MAKOVEC / AFP)

Chercher son crâne dégarni dans la tribune officielle de Louis-II est devenu un rituel. Malgré son emploi du temps surchargé, il parvient souvent à se libérer pour couver son club. Et ne lui parlez pas du faible taux de remplissage du stade, avec ces sièges jaunes vides qui crèvent l'écran lors des retransmissions télé : "On est dans une bonne moyenne au regard de notre bassin de population. Il faudrait 400 000 spectateurs au Paris SG pour être en phase avec ce ratio." Hors de question pour lui de toucher à la piste d'athlétisme, qui repousse les spectateurs loin des joueurs et contribue à l'ambiance tristounette des soirées monégasques. "Cette piste sert aussi pour le sport scolaire", argue son altesse sérénissime, avant de rappeler aussi que le meeting de Monaco rassemble chaque année le gratin de l'athlétisme mondial. Louis-II, il l'aime tel quel. Au point d'avoir demandé pour son mariage à son groupe favori, les Eagles, de jouer dans l'enceinte.

L'homme qui a convaincu Falcao

En 2011, Albert doit céder le club pour y injecter de l'argent frais. Pour un euro symbolique, il passe la main à l'oligarque russe Dmitri Rybolovlev, tout en conservant un tiers des parts. Signe de son engagement intact derrière le club, il a ainsi reçu personnellement Falcao au moment de convaincre l'attaquant colombien d'embarquer dans le projet monégasque. "Cette rencontre privée a fini de convaincre Falcao", raconte le n°2 de l'ASM, Vadim Vasilyev, dans le livre Secrets de présidents.  

Le prince se trouvait encore à Dortmund mardi 11 avril, quand la rencontre a été reportée à cause d'explosions près du bus de l'équipe allemande. Malheureusement, il était pris le lendemain, et n'a pu suivre le match qu'à distance. "Vous savez, le prince Albert demande toujours à son aide de camp de
l'informer de l'évolution du score, lorsqu'il ne peut pas assister à un match", confiait à So Foot l'animateur Stéphane Bern, proche du Palais. Depuis la naissance de ses jumeaux, en 2014, le prince s'est même muni d'un téléphone portable...

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