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Barça-PSG : vous connaissez la légende de Lionel Messi ? Découvrez les faits

Le séjour du prodige argentin au FC Barcelone, qui affronte le PSG en 8e de finale retour de Ligue des champions, mercredi, s'accompagne de petits accomodements avec la réalité sur l'autel du storytelling.

Article rédigé par Pierre Godon
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 11min
L'attaquant argentin du FC Barcelone Lionel Messi lors d'un match de championnat contre La Corogne, le 15 octobre 2016 au Camp Nou.  (DAVID RAMOS / GETTY IMAGES EUROPE)

"Quand la légende est plus belle que la réalité, imprimez la légende", édictait un des personnages du western L'homme qui tua Liberty Valance. Cette maxime est aussi valable pour l'histoire de Lionel Messi, le quintuple Ballon d'or, joueur du Barça depuis toujours (ou presque) et dont le chemin va croiser le PSG en 8e de finale retour de Ligue des champions, mercredi 8 mars. Franceinfo revient sur la carrière du footballeur en confrontant le conte de fées aux faits.

Un traitement médical en contrepartie de son recrutement ?

La légende. Petit, Lionel Messi souffre d'un spectaculaire retard de croissance. Celui que ses partenaires du club de Rosario surnomment "El Enano" – "le nain" – ne peut être soigné que via un traitement coûteux à base d'injections d'hormones de croissance. Plus de la moitié du salaire de son père Jorge y passe : 900 dollars par mois. Cela n'empêche pas plusieurs clubs argentins de faire les yeux doux au (très) petit prodige. Dont celui de Rosario, les Newell's Old Boys, qui commence par avancer quelques billets à la famille, avant de couper les vivres. "Ils m'ont dit 'on va payer pour le traitement, ne vous inquiétez pas', raconte Jorge Messi dans le livre du journaliste espagnol Guillem Balagué, sobrement intitulé Messi. S'ils avaient payé, bien sûr que nous serions restés à Newell's." D'après la famille Messi, c'est même le club qui a bénéficié des talents du jeune attaquant, en l'utilisant comme une bête de foire à multiplier les jongles avant les matchs, raconte le Daily Telegraph (en anglais). Les gens lui jetaient des pièces de monnaie. L'offre du Barça, arrivée alors que la famille était officiellement en visite chez des cousins éloignés en Catalogne, était la seule à couvrir intégralement les frais du traitement. 

La réalité. Ce joli conte de fées ne tient pas compte de la Sécurité sociale argentine qui, couplée à la mutuelle du père de Lionel Messi, parvient à rembourser intégralement les frais, a dénoncé le docteur Miglietta, membre de l'organisme national venant en aide aux enfants souffrant de problèmes de croissance dans le journal Le Capital (en espagnol). L'ex-entraîneur de River Plate, Galdino Luraschi, se souvient avec précision de sa rencontre avec Jorge Messi, désireux de placer son poulain dans une grosse écurie : "A aucun moment lui ou son père ne nous ont parlé de son problème de croissance, confie-t-il dans le livre Insubmersible Messi. Donc je trouve un peu fort qu'on prétende que Messi ne soit pas venu à River car le club ne voulait pas payer ses hormones de croissance." Ce qui est avéré, en revanche, c'est que le père du joueur a mandaté un agent introduit auprès de plusieurs grands clubs européens pour trouver un point de chute prestigieux à son rejeton. 

Le contrat écrit sur une nappe ?

La légende. Une fois arrivé en Catalogne, en 2000, Lionel Messi poireaute plusieurs mois, le temps que le patron du recrutement chez les jeunes, Carles Rexach, parti superviser le tournoi olympique de Sydney, daigne jeter un œil sur le prodige pour un essai. A l'époque, le club teste plusieurs jeunes du monde entier chaque semaine. Rexach tombe sous le charme du prodige argentin. "Au bout de deux minutes, je savais [que ce serait un crack]", raconte-il au Guardian (en anglais). Problème : la règlementation interdit de débaucher un enfant de 12 ans de son club, sans même parler de lui faire changer de pays. Qu'à cela ne tienne : sous la pression de Jorge Messi, Rexach improvise un contrat sur une nappe en papier, où il s'engage à faire signer le jeune prodige "dès que les conditions seront réunies". Le bout de nappe, encadré depuis, trône sur un mur du bureau de son agent de l'époque, Horacio Gaggioli.

Le contrat signé par Lionel Messi sur une nappe en 2000. (MANU FERNANDEZ/AP/SIPA / AP)

La réalité. La nappe en papier n'a aucune valeur juridique. Le FC Barcelone a surtout pu conserver Lionel Messi... en offrant un emploi fictif de recruteur à Jorge Messi. Si le père vient en Catalogne pour travailler, le fils a le droit de porter les couleurs du Barça. Après avoir envisagé de le parachuter dans une brasserie où se reconvertissaient d'anciens joueurs du club, le Barça achète la famille Messi 45 000 euros par an et lui fournit une maison. "[Jorge Messi] n'a jamais rien fait", résume Horacio Gaggioli dans Insubmersible Messi. Sauf se reconvertir en agent exclusif de son fils. Les deux intermédiaires à l'origine de son arrivée au Barça n'ont jamais reçu un sou. Gaggioli ne désespérait pas de faire un peu d'argent sur la légende... en cédant la nappe en papier au musée du Barça. "C'est là qu'elle devrait être, raconte-t-il au journal émirati The National (en anglais). Mais ils ne m'ont jamais appelé."

Son lien irréversible avec le Barça ?

La légende. Les aficionados des Culés (le petit surnom des joueurs du Barça) portent Messi dans leur cœur, au même titre que les Catalans pur jus que sont Xavi et Iniesta. Le petit Argentin est un pur produit de la Masia, le centre de formation du club. Et puis il est difficile de faire la fine bouche quand le meilleur joueur du monde porte vos couleurs. Messi est la preuve vivante que le Barça est "mes que un club", plus qu'un club, le village d'Astérix résistant encore et toujours au foot-business.

Lionel Messi serre le logo de son club, le FC Barcelone, lors de la finale de la Ligue des champions contre Manchester United, à Londres, le 28 mai 2011. (EDDIE KEOGH / REUTERS)

La réalité. Sur le papier, Lionel Messi n'a connu qu'un club depuis son premier contrat pro, en 2004. On sait peu qu'il a failli voir ailleurs. Devant la lenteur des tractations au Barça, son agent l'a proposé à plusieurs autres clubs espagnols. "Si les choses ne s'étaient pas décantées à Barcelone, il aurait probablement fini à Madrid, au Real ou à l'Atletico", confie-t-il au site de la Fifa. Lionel Messi sous le maillot blanc du Real Madrid ? On se pince pour y croire. Alors qu'il tape à la porte du groupe pro à l'été 2005, le coach blaugrana de l'époque, Frank Rijkaard, n'en veut pas : "Ce n'est pas possible de jouer avec autant de joueurs aussi petits [Xavi, Andrés Iniesta et le Français Ludovic Giuly]." Porte de sortie : le club voisin – et beaucoup moins prestigieux – de l'Espanyol de Barcelone.

Le prêt est quasiment ficelé quand Lionel Messi est aligné par Rijkaard lors du trophée Gamper, match amical de début de saison. L'Argentin réalise un tel festival que... l'entraîneur adverse, Fabio Cappello, veut le recruter à la Juventus Turin. "Si vous n'en voulez pas, je le prends", lance le technicien italien, qui sait que Messi, avec son seul passeport argentin, est empêché administrativement de jouer dans un Barça où évoluent déjà trois joueurs extra-communautaires. La démonstration face à la Juventus a du bon : deux mois plus tard, il obtient la double nationalité argentino-espagnole. Ce qui ne l'empêche pas de signer un pré-contrat avec l'Inter Milan à l'intersaison suivante, confie, dix ans après les faits, un ancien dirigeant intériste, cité par ESPN (en anglais). Papier sans valeur juridique, mais qui atteste d'une fidélité toute relative au club catalan. 

Erigé au rang de porte-drapeau de la nation catalane, sans jamais avoir baragouiné plus de deux phrases dans la langue régionale – en état d'ébriété, en plus –, Lionel Messi aurait uniquement résisté à la cour du PSG et de Manchester City en 2014 pour respecter une promesse faite à son entraîneur Tito Vilanova, quelques jours avant sa mort, affirme l'ex-entraîneur adjoint du club à l'époque, Henk ten Cate, au Telegraaf (en néerlandais).

Ses relations idylliques avec ses équipiers ?

La légende. Lionel Messi a toujours su se fondre dans le collectif barcelonais. Jamais un de ses entraîneurs n'a eu à se plaindre de lui, il compte de nombreux amis dans le circuit, comme son partenaire en club ou en sélection Javier Mascherano et l'expérimenté défenseur de Manchester City Pablo Zabaleta. Et la cohabitation avec les deux autres stars qui composent le trio d'attaque du Barça, Luis Suarez et Neymar, se passe harmonieusement.

Luis Suarez, Lionel Messi et Neymar, le trio de l'attaque du Barça, lors d'un match de Ligue des champions à Manchester City, le 1er novembre 2016. (REUTERS)

La réalité. Après avoir rongé son frein comme ailier à ses débuts barcelonais, Lionel Messi a bien vite récupéré le centre de l'attaque, et les prérogatives qui vont avec. Il s'est débarrassé de la concurrence de Zlatan Ibrahimovic en un SMS adressé à Pep Guardiola, l'entraîneur. "Bon, je vois bien que je ne suis plus vraiment important pour l’équipe, donc..." La menace est claire, le coach catalan obtempère et se met à dos pour de bon le volcanique Suédois : "Je fixe du regard la boîte en métal dans laquelle nous jetions nos affaires sales, écrit Zlatan dans son autobiographie. Je donne un coup de pied dedans. Je suis allé vers Guardiola et j'ai hurlé : 'Tu n’as pas de couilles !'"

Tout sauf un cas isolé. David Villa débarque à la pointe de l'attaque ? "Il a essayé de jouer comme s'il était la star de l'équipe, mais au bout de quatre entraînements, il a fini par comprendre [qui était le patron]", confie un proche de l'équipe dans Insubmersible Messi. Le placide argentin a lâché à son jeune coéquipier Cristian Tello : "Tu n'es personne, tu n'as rien prouvé. Passe-moi le ballon, tu es ici pour jouer pour moi", selon El Confidencial (en espagnol). Mêmes amabilités pour Alexis Sanchez, depuis exilé à Arsenal : "Compte tenu du déchet dans ton jeu, je ne comprends pas comment tu as pu coûter si cher !" Prévenu, Neymar a passé sa première année au Barça à ne prendre aucune initiative et à donner le ballon à Messi. Jusqu'à ce qu'il reçoive le feu vert du patron. "Nous avons créé un monstre", conclut un ancien membre du staff de Guardiola dans El Confidencial.

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