Comment les Pays-Bas sont redevenus les Hollandais volants
24 mai 2016. Le football hollandais est en deuil. Son plus grand chantre s’en est allé. Johan Cruyff a cédé dans son ultime combat, contre le cancer. Avec lui, c’est tout un pan de l’histoire du sport hollandais qui s’envole : les années 80, celles du football total, du panache, du champagne. Aux côtés des Johan Neeskens, Ruud Krool et autres Barry Hulshoff, il a incarné l’âge d’or du foot "Oranje" . Les supporters de foot hollandais sont d’autant plus nostalgiques qu’ils assistent, cette année-là, à la lente mort de leur équipe, et avec elle, de l’héritage de Cruyff.
En 2016, c’est la catastrophe des qualifications pour l’Euro : les Pays-Bas, éliminés, terminent derrière l’Islande, la Turquie et la République Tchèque. En 2018, rebelote. Ils ratent le coche pour la Coupe du Monde, terminant derrière la France et la Suède. Le doute s’instillait alors dans l’esprit des suiveurs : les Oranges parviendraient-ils un jour à retrouver leur lustre ?
Revenons quelques décennies en arrière. En 1989, plus précisément. Le classement du ballon d’or tombe : quatre des cinq premiers sont hollandais (Van Basten, Gullit, Rijkaard, Koeman). Sur le plan individuel, ils sont au sommet de la pyramide. Personne ne leur arrive à la cheville. Le vivier hollandais paraît sans fin, puisque très vite arriveront les Denis Bergkamp et autre Robin Van Persie. En 2018, qu’en est-il ? Pas un seul Hollandais dans les 30 premiers du classement. La nation orange a disparu des radars. Définitivement ?
Le nouveau souffle Ronald Koeman
Apparemment pas. Depuis septembre dernier, les Oranges ont brillé, se qualifiant pour les demi-finales au nez et à la barbe des deux derniers champions du monde. Plus que le résultat, c’est le jeu qui a étonné. Du panache, de la cohérence, de la fluidité, voire de la beauté ; depuis quand n’avait-on pas vu les Hollandais si virevoltants ?
En tout cas, Ronald Koeman a décidé de privilégier les jeunes. Il n’a pas hésité à confier les rênes de la sélection à des joueurs de moins de 20 ans. "Sur les dernières années, c'est la meilleure génération, mais ils n'en sont qu'à leurs débuts", a commenté Koeman dans une interview au quotidien londonien The Guardian. "Nous sommes sur la bonne voie pour que notre pays retrouve le niveau où nous aimerions être."
De Jong, De Ligt : Les diamants Oranges
Il s’est en fait appuyé sur une ossature largement composée de joueurs de l’Ajax, héroïque en Ligue des Champions. Matthijs de Ligt forme avec Virgil Van Dijk, la meilleure charnière défensive des Pays-Bas depuis 1998 et la paire Jaap Stam et Frank de Boer. De Ligt, régulièrement annoncé à Barcelone ou, plus encore, à Liverpool ces dernières semaines, a illuminé les huitièmes et les quarts de finale de Ligue des Champions par sa solidité et sa maturité.
Le génial Frankie De Jong muscle l’entrejeu. En attaque, les Oranges devront faire sans les Ziyech, Tadic ou Neres de l’Ajax, tous étrangers. Mais la génération dorée ne vient pas exclusivement des rangs de l’Ajax. Memphis Depay, de l’Olympique Lyonnais, sera en renfort, tout comme Quincy Promes du FC Séville. Steven Bergwijn, l’ailier du PSV Eindhoven, pourrait être appelé à droite. Le Red Georginio Wijnaldum est indispensable au milieu.
"Les gagnants de demain" ?
Est-ce déjà une grande équipe ? Non. Pas encore. Pour l’instant, ils n’ont marqué les esprits qu’en Ligue des Nations et lors de matches amicaux. Mais ils posent les fondations d’une nouvelle histoire.
Il y a quelques mois, les dirigeants du foot hollandais étaient sceptiques. Ils ne voulaient prendre des mesures radicales pour redonner un coup de fouet à l’équipe nationale. Dans un rapport appelé "les gagnants de demain" ils ont évoqué le besoin de développer chez les jeunes "une mentalité de gagnant". Le grand chambardement devait aussi concerner l’entraîneur : ils étaient à la recherche d’un grand coach étranger, capable de se détacher des principes considérés vieillissants de Johan Cruyff. Pourtant, c’est bien avec ces mêmes ingrédients que les Hollandais sont en train de retrouver la lointaine saveur de l’excellence.
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