Liverpool, Red dingue de Gérard Houllier
Pour mesurer l'aura de Gérard Houllier sur le milieu du football français et européen, il suffit de jeter un œil aux hommages qui lui sont rendus ce lundi depuis l'annonce de son décès. Outre-Manche, du côté de la Grande-Bretagne où Houllier a entraîné de 1998 à 2004, les messages saluant le parcours du technicien français se multiplient également. Liverpool a ainsi rendu un vibrant hommage à son ancien entraîneur, tout comme certains de ses anciens joueurs. "J'ai le cœur brisé en apprenant que Gérard Houllier est décédé. Un grand entraîneur et un homme attentionné", a ainsi publié Michael Owen sur son compte Twitter.
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Steven Gerrard, que Houllier a lancé en professionnel en 1998, a également rendu un hommage appuyé à son ancien entraîneur : "Dévasté d'apprendre la mort de Gérard Houllier. Je n'oublierai jamais ce qu'a fait cet homme pour moi et ma carrière". "J'ai aimé cet homme à la folie. Il m'a changé comme homme, comme joueur et a permis à Liverpool de gagner à nouveau des titres", a de son côté écrit Jamie Carragher. Si les hommages se multiplient de la sorte, de la part d'idoles des Reds, c'est bel et bien que Houllier a marqué l'histoire de Liverpool.
Une année 2001 au paradis
Sur les bords de la Mersey, Houllier a passé les six années les plus prolifiques de sa carrière, en remportant six titres en 304 matches disputés sur le banc de touche. Surtout, l'entraîneur français a su redonner à Liverpool le goût de la victoire alors que le club traversait une période compliquée depuis le début des années 1990. L'année 2001 à elle seule révèle le travail de Houllier chez les Reds : une saison au paradis au cours de laquelle Liverpool remporte la FA Cup, la Coupe de la Ligue, le Community Shield, la Supercoupe d'Europe et la Coupe de l'UEFA au terme d'une finale exceptionnelle contre Alavés (5-4 a.p.). "Gérard avait réussi à créer un collectif très fort, cette année était exceptionnelle et ce que j'ai vécu en 2001 en tant que joueur et en tant qu'homme était incroyable", explique, ému, Grégory Vignal, qui avait signé en 2000 à Liverpool à l'âge de 19 ans après que Houllier soit venu le convaincre de rallier l'Angleterre.
"J'étais déjà fan de Liverpool et je repars encore plus fan du club, si cela est possible", déclarait Houllier lors de son départ en 2004. Six ans plus tôt, le Français débarquait à Liverpool après dix années passées à la FFF, pour devenir co-entraîneur aux côtés de Roy Evans. Ce dernier, déjà manager des Reds depuis quatre saisons, quitte rapidement le navire pour laisser Houllier seul à la barre. Ancien professeur d'anglais, son adaptation se fait rapidement et facilement. "Gérard maîtrisait la langue, donc il a directement eu le respect des journalistes, des joueurs, des propriétaires. Il a également rapidement maîtrisé le poste de manager à l'anglaise, avec des compétences élargies", souligne Vignal.
Après une première saison compliquée, les résultats s'améliorent et Houllier peut compter sur une génération dorée et la présence dans son effectif des jeunes Robbie Fowler, Owen, Carragher et Gerrard. L'ancien sélectionneur des Bleus y ajoute une touche plus Frenchie avec les arrivées de Bruno Cheyrou, Florent Sinama-Pongolle, Anthony Le Tallec, Nicolas Anelka ou encore Bernard Diomède.
Le début de son combat contre son cœur
L'année 2001 marque l'apogée de son passage à Liverpool et de sa carrière d'entraîneur, faisant de lui le deuxième technicien français, après Luis Fernandez, à remporter une Coupe d'Europe. Mais cette année mouvementée et pleine de joies marque également le début de son combat face à son propre cœur. Le 13 octobre 2001, à l'issue d'un match de Premier League à Anfield contre Leeds (1-1), Houllier est transporté à l'hôpital en urgence et opéré de l'aorte. Pendant plusieurs mois, son adjoint le supplée sur le banc de touche.
Son retour a lieu le 19 mars 2002, alors que Liverpool affronte l'AS Roma en Ligue des champions pour une place en quarts de finale. Le stade d'Anfield lui rend un vibrant hommage qu'il évoquait dans une interview lors de son départ du club en 2004 : "C'était très émouvant de voir les fans et Fabio Capello me saluer de la sorte lors de mon retour !" À nouveau vainqueur de la Coupe de la Ligue en 2003, Houllier ne parvient cependant pas à faire gagner la Premier League aux Reds. "Il ne lui a manqué que le championnat pour être au sommet", regrette Vignal, qui souligne "toutes les qualités de cet homme au grand cœur". "Il était très fort dans le management. Il était capable de passer du rôle d'entraîneur au rôle de confident. Pour moi, c'était comme un second père. Si Michael (Owen, ndlr) est devenu Ballon d'Or, c'est grâce au management de Gérard. Si Steven Gerrard est devenu le joueur qu'il était, c'est grâce à Gérard", ajoute l'ancien latéral français des Reds.
Un entraîneur précurseur
"Nous avons probablement eu des bons résultats trop tôt, et les supporters en attendaient davantage très rapidement", regrette Houllier alors que Liverpool décide de ne pas renouveler son contrat à l'issue de la saison 2003-2004.Son départ en catimini n'est pourtant pas à la hauteur de son passage au sein du club de Liverpool, que le Français a su modifier en profondeur. "Il a apporté énormément de choses à Liverpool et a terminé de le professionnaliser", explique Grégory Vignal. En février dernier, The Guardian consacrait un article à Houllier pour démontrer que l'ex-entraîneur méritait davantage de crédit dans la mémoire collective des supporters. Premier manager non-britannique de l'histoire de Liverpool, ses succès ont convaincu la direction du club de confier le poste à d'autres étrangers par la suite.
L'Espagnol Rafael Benitez a ainsi profité de ces évolutions pour remporter la Ligue des champions une saison après le départ de Houllier, profitant des bases posées par le Français pendant six saisons. Et l'autre C1 remporté par les Reds au 21e siècle l'a été grâce à Jürgen Klopp, autre entraîneur étranger venu s'installer à Liverpool. Lors de son départ, après six années d'intenses joies chez les Reds, Houllier se confiait ainsi : "Je veux souligner que personne ne pourra m'enlever ces souvenirs de mon passage à Liverpool. Les moments fantastiques passés avec les supporters, les joueurs et le staff resteront toujours dans mon esprit, et si je quitte le club, cela ne veut pas dire que je laisse ces souvenirs derrière moi". Ce lundi, Houllier a une fois de plus emmené ces souvenirs de Reds avec lui, dans l'au-delà.
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