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Les enseignements du transfert raté de David De Gea

Le transfert de David De Gea de Manchester United au Real Madrid a capoté à la dernière minute. La raison? Le contrat du portier espagnol aurait été envoyé trop tard à la ligue espagnole. Si le Real croit détenir la preuve que le transfert est valide, De Gea semble bien parti pour rester au moins six mois à Manchester, dans une équipe où il n'est plus apparu sur la feuille de match depuis six rencontres et où les relations avec Louis Van Gaal sont au point mort. Voici les conséquences d'un des plus gros ratés de l'histoire des mercatos.
Article rédigé par franceinfo
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Le portier de Manchester United, David De Gea

A qui la faute ?

C'est la première question. Et on ne sait pas si on aura un jour la réponse définitive. Aucun des deux clubs ne voudra perdre la face dans ce dossier en avouant l'avoir mal gérer. Si on fait l'historique depuis les premières rumeurs, on constate que le Real s'est très vite mis d'accord avec le joueur qui était décidé à quitter Manchester. Ferme, le club mancunien ne voulait pas brader son meilleur joueur de la saison écoulée et attendait une offre d'une cinquantaine de millions d'euros au début du mercato.  Trop cher pour le Real qui s'est tourné vers d'autres dossiers. Les dirigeants madrilènes ont engagé Kiko Casilla comme doublure de Keylor Navas, numéro 1 qui ne devait l'être que par interim.

Car pendant tout l'été, la piste De Gea n'a jamais été abandonnée, le Real s'accrochant à la volonté du joueur de le rejoindre. Les semaines ont passé et le 31 août, dernier jour du mercato est arrivé. Jour choisi par ManU pour réouvrir les négociations pour un joueur écarté du groupe. Pourquoi le garder six mois, ou un an de plus, pour le voir partir libre l'an prochain alors que sa vente cet été aurait pu rapporter au moins 30 millions d'euros? Le board des Red Devils s'est réveillé et a relancé le Real Madrid qui raconte la journée du 31 août dans un communiqué. Un accord entre les deux clubs pour les deux joueurs (De Gea à Madrid, Navas faisant le chemin inverse) a été trouvé à 23h53 selon le Real mais l'horloge a joué contre les Merengue.

S’en suit une histoire de contrat qui arrive trop tard, des formulaires à remplir via un logiciel fermé car le délai est dépassé, bref "un joyeux bordel" qui a abouti à cette situation, De Gea est toujours à Manchester, Navas à Madrid. Le gardien de Manchester United "simplement, n'est pas inscrit" au championnat espagnol comme joueur du Real Madrid, a affirmé mardi à l'AFP un porte-parole de la ligue. D’après son communiqué, le Real a reçu, après minuit, une invitation du système informatique du TMS – ce logiciel qui permet de renseigner les transferts – de la FIFA. Mais il ne l’a pas fait. Pour éviter qu’on lui reproche et que le transfert soit annulé d’après le club. 

Premier échec pour Pérez

On a souvent encensé Florentino Pérez, le président du Real Madrid, pour son savoir-faire en matière de transfert. Faire venir Luis Figo du FC Barcelone, le grand rival, en 2000 après un Euro exceptionnel, confinait au génie. Attirer Zidane en lui faisant signer un bout de serviette (*) aussi. En 2009, les transferts du trio Ronaldo-Kaka-Benzema ont marqué son retour aux affaires. Puis il y a eu Bale, James, ou encore Kroos, autant de noms clinquants achetés à coups de millions d'euros, qui ont continué à faire la réputation du président espagnol. Quand il veut un joueur, généralement le président madrilène l'obtient.

Cet été, Pérez avait promis aux socios de rapatrier David De Gea dans la capitale espagnole. Le portier de 24 ans, ancien de l'Atletico, était son objectif numéro 1. La légende Iker Casillas poussée vers la sortie, le Real avait jeté son dévolu sur celui qui était destiné à lui succéder dans les buts de la Roja. Convaincre le joueur n'a pas été compliqué. En froid avec Van Gaal, lassé du climat de Manchester United, De Gea voulait revenir chez lui à Madrid, sa petite amie, la chanteuse espagnole Edurne Garcia, trépignait aussi. Mais l'intransigeance de Manchester United et le timing ont fait capoter une affaire qui semblait entendue.

 De Gea, dans l'impasse

Tout était prêt de son côté. David De Gea avait fait ses valises, il allait quitter le nord de l'Angleterre auquel il ne s'était jamais acclimaté, retrouver la capitale espagnole et atterrir là où il le désirait, au Real Madrid. Tout était prévu aussi du côté Real. La présentation du joueur était prévue ce mardi à 13h, selon le journaliste espagnol Guillem Balague, et le joueur avait déjà choisi son costume. De Gea peut le ranger au moins pour six mois puisqu'il ne devrait pas signer au Real - à moins d'un revirement de situation exceptionnel - avant janvier 2016, au minimum. Pour lui, c'est le pire scénario. Il ne voulait plus entendre parler des Red Devils. Aveuglé par sa volonté de rejoindre le Real, il a refusé un pont d'or de Manchester United qui lui proposait 14,5 millions d'euros par an. A Madrid, il aurait touché entre 5 et 6 millions d'euros par an.

David De Gea serre la main de son entraîneur Louis Van Gaal

Son obstination a contribué à détérioré ses relations avec Louis Van Gaal qui se sont tendues jusqu'à aboutir à une impasse. Depuis le début de la saison, De Gea est écarté par son entraîneur, il est en tribunes pour voir les matches où il patientait en attendant son transfert. De son siège, il a vu son remplaçant Sergio Romero aligné des prestations loin d'être convaincantes. C'est la principale chance du joueur espagnol. Son concurrent argentin n'a pas son niveau et Van Gaal pourrait se lasser assez vite si Man U perdait trop de points à cause de l'international albiceleste. De Gea pourrait alors retrouver une place de titulaire à condition d'apaiser les tensions avec l'entraîneur hollandais. Et partir au Real dans six mois ou un an. En tout cas, si rien ne bougeait d’ici l’été prochain, De Gea verrait l'Euro en France s'envoler. Dernier détail, s'il venait à rejouer avec Man U et notamment en Ligue des Champions, il ne pourrait pas disputer la C1 avec le Real s'il débarquait en janvier. 

Des soucis en moins pour Benitez

Au Real Madrid, cette affaire De Gea fait plusieurs heureux. Keylor Navas tout d’abord. Le gardien du Costa Rica, arrivé après le Mondial 2014, a vécu du banc la dernière saison d’Iker Casillas au Real. Avec le départ de San Iker à Porto, son heure avait sonné. Mais la volonté de Florentino Pérez de s’offrir David De Gea semblait une nouvelle fois lui boucher l’horizon. Il avait même fini par accepter de rejoindre Manchester United pour laisser la place à l’Espagnol alors qu’il ne voulait pas quitter Madrid. Puis l’horloge a tourné trop vite pour tout le monde et Navas est toujours au Real. Une aubaine pour lui. Le malheur des uns…

Impeccable depuis le début de la saison, il a convaincu. L’exigeant public madrilène, qui l’a acclamé après son penalty arrêté contre le Betis, mais aussi Rafa Benitez, son entraîneur, qui lui a fait confiance dès le début de la saison. Benitez aussi doit être soulagé d’une telle issue car il aurait voulu compter sur De Gea dès le début de la préparation estivale. A la fin du mois d’août, il aurait eu du mal à comprendre pourquoi son club se débarrassait d’un gardien opérationnel et qui donne entière satisfaction (Navas) pour un autre loin d’être prêt et laisser en tribunes depuis un mois (De Gea).

Que va faire Louis Van Gaal?

Louis Van Gaal n’est pas réputé pour sa tendresse. Ses effectifs, il les mène comme il l’entend et bien souvent à la baguette. Ceux qui n’entraient pas dans le moule (Dugarry à Barcelone, Ribéry au Bayern Munich) l’ont payé. "Le Pelican" comme on le surnomme s’était trouvé des nouvelles têtes de turc à Manchester, ses deux portiers espagnols, Victor Valdes et David De Gea. Le premier a été prié d’aller voir ailleurs, le second était puni en attendant que sa situation se régularise et que son départ au Real ne soit officialisé. Finalement De Gea n’est pas parti et a vu l’Argentin Sergio Romero débarqué. Le portier de l’Albiceleste est un ancien protégé de Van Gaal à l’AZ Alkmaar. Le Néerlandais a donc décidé de lui faire confiance. Après deux premiers matches rassurants, Romero est passé au travers notamment face à Swansea laissant la porte ouverte à la concurrence.

La destinée de De Gea est donc dans les mains de son entraîneur. Celui-ci acceptera-t-il de passer l’éponge sur leur relation tendue et sur un été mouvementé ? Rien n’est moins sûr, mais si Romero venait à coûter trop de points aux Red Devils, Van Gaal serait obligé d’y penser.

Le gardien espagnol David De Gea

(*) Lors d'un dîner où ils partagaient la même table début 2001, Florentino Pérez, président du Real, avait fait passer un bout de papier à Zidane, alors joueur de la Juventus, où il était écrit en français "veux-tu venir jouer au Real Madrid?". Le milieu de terrain français avait répondu "yes". "C’a été l’un des jours les plus heureux de ma vie", a raconté ZZ au quotidien AS.

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