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REPORTAGE | A Rio, la prostitution explose pendant le Mondial

Depuis le début de la Coupe du Monde au Brésil, les prostituées observent une hausse de 30% de leur clientèle. Reportage à Rio, l'une des douze villes hôtes du Mondial.
Article rédigé par Germain Arrigoni
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
  (Bia se prostitue à la Vila Mimosa quelques jours lors du Mondial © RF/GA)

La Vila Mimosa est un bordel à ciel ouvert. Situé près du Maracanã à Rio, ce quartier misérable est une fourmilière où chaque ruelle mène le client vers des maisons closes devant lesquelles est posté un colosse chargé d'assurer la sécurité.

Alors que la prostitution est légale au Brésil, elles sont 2.000 "filles de joie" à travailler ici 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. "Si les commerçants se remplissent les poches grâce aux touristes venus pour le Mondial, il n'y a pas de raison qu'on n'en fasse pas autant" , résume froidement Bia.

Un tiers de clients en plus

A 19 ans, cette habitante d’une favela voisine est venue vendre son corps à la Vila Mimosa au début du Mondial parce qu’elle était "sûre qu'il allait y avoir plus de clients que d’habitude" . A Rio, un million de touristes est attendu pendant la compétition. Et donc mécaniquement plus de demande. "En moyenne, à Rio, on fait 30% de clients en plus que les jours ordinaires" , lâche-t-elle.

Des clients au profil très différent : "Il y a beaucoup de Sud-américains, des Chiliens, des Argentins, un peu d'Européens notamment les Anglais" , poursuit-elle. Cette orpheline reçoit les hommes dans une "chambre" de 6m² qui a pour seul décor un matelas et un ventilateur.

  (Bia reçoit les clients dans une "chambre" © RF/GA)

Nourrir la famille

Pour la durée de la Coupe du Monde, les prix ont quasiment triplé. "C'est désormais 50 reais (16 euros, ndlr) la passe de vingt minutes", calcule-t-elle. "Certaines journées, j'arrive à me faire 900 reais" . Soit plus que le salaire mensuel minimum. "Je ne viens travailler que deux jours par semaine, c'est suffisant pour payer mes dettes et mon loyer" . Des journées rythmées par le son d’une cloche métallique qui indique la fin de la passe avant d'enchaîner la suivante.

Camilla, son amie âgée de 20 ans, est également venue pour se faire de l'argent. "J'ai un enfant de quatre ans à nourrir ", reconnaît-elle. Et une autre prostituée d'ajouter : "Moi je vis avec ma mère et je l'aide à payer son appartement. Mais elle ne sait pas ce que je fais" , lâche-t-elle émue.

  (Camilla a un enfant en bas âge qu'elle doit nourrir © RF/GA)

Anglais et carte bancaire

Avec la venue de touristes étrangers, les prostituées ont appris quelques rudiments d'anglais. "La langue universelle pour qu'il n'y ait pas de malentendus" , précise Mara, l'une des maquerelles de la Vila Mimosa . "D'autant que le préservatif est obligatoire ici" , tient-elle à préciser.

Du bout des lèvres, certaines travailleuses du sexe avouent prendre des risques pour quelques reais supplémentaires. Mais ici l’argent est roi. "La carte bancaire est même acceptée pour faciliter le paiement des touristes" , précise Mara.

Des télévisions ont également été installées aux quatre coins de la Vila Mimosa pour qu’ils puissent regarder les matches du Mondial. Une curieuse ambiance où se mêlent les envolées lyriques des commentateurs sportifs et les cris venus des chambres.

  (Une télévision diffuse les matches du Mondial dans un bordel de la Vila Mimosa © RF/GA)

Vidéo. La Vila Mimosa.

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