REPORTAGE | "Crackolandia", l'enfer du crack au Brésil
Ce sont plusieurs petits villages implantés aux coins des rues, sur les places et sous les ponts de Rio. Connus de tous, les habitants les appellent les Crackolandia . Plusieurs dizaines de Brésiliens - parfois quelques centaines - se regroupent à ciel ouvert pour fumer du crack, cette pierre dérivée de la cocaïne dont ils inhalent les vapeurs.
"Je n'arrive même pas à calculer combien de temps je passe à fumer" , lâche Carlos. "Ce que je sais, c'est que j'utilise deux briquets par jour" . Et pour cause, le crack n'est pas cher : la pierre vaut cinq reais, soit moins de deux euros.
Ils sont une cinquantaine à s'être approprié cette rue située au nord de Rio. Tous ont entre 25 et 40 ans et à plus ou moins le même profil, à l'image de Vanessa. "Je suis ici depuis un an et demi" , lâche cette mère d'un fils de quatre ans. "J'ai quitté ma famille pour me droguer" , continue-t-elle le regard dans le vague.
Certains dorment dans la rue et se prostituent pour payer leur crack, d'autres continuent de rentrer chez eux et de venir à Crackolandia la journée. "Avec tous les problèmes que j'ai à la maison, je ne vois pas le temps passer en fumant' , résume Pedro.
Brésil, plus gros consommateur de crack
Alors que le Brésil est le plus gros consommateur de crack au monde avec un million de fumeurs, la police ne fait rien contre eux. "Elle essaie de s'attaquer à la source, aux narcotrafiquants qui vendent le crack" , explique Jaina Ribeiro, la coordinatrice d'un projet local qui a pour but de réinsérer ces fumeurs dans la vie active. "C'est pour ça qu'ils consomment sans se cacher", ajoute-t-elle.
Ils font partie du paysage depuis des années. On ne les voit même plus."
A quelques rues de là, un foyer géré par la préfecture accueille une vingtaine de mineurs qui fumaient du crack. Ils ont entre 7 et 17 ans et ont été placés par la justice. "J'ai commencé à fumer du crack, j'avais dix ans" , confie Hélio qui en a treize aujourd'hui. "J'ai fait ça pour imiter les grands. Mais aujourd’hui, ça ne me manque pas" , jure-t-il avec ses yeux de gosse.
"Nous leur réapprenons le b.a.-ba : manger, se coucher, se laver, faire les devoirs" , détaille Alice, la directrice de l'établissement. "Objectif : qu'ils se réinsèrent rapidement dans la vie." Et pourtant. Quand ils sortent de ce foyer au bout de six mois, seul un quart de ces jeunes retournent dans leur famille, les autres dans la rue. Et la plupart finissent par craquer et replonger dans l'enfer de la drogue.
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