"Game Story", à vos manettes !
Non-art, loisir de jeunes ou d'ados attardés, violent, sans intérêt: le jeu vidéo doit souvent faire le dos rond face à la critique. Depuis le 10 novembre, il redresse la tête et fait le fier avec l'exposition baptisée "Game Story, une histoire du jeu vidéo" que lui consacre le Grand Palais jusqu'au 9 janvier 2012. Une explosion au grand jour et une forme de reconnaissance pour un mal aimé de la culture.
Transformée en salle de jeux géante, la Galerie sud-est du Grand Palais s'offre un coup de jeune. Trois ans de travaux, une restauration complète de la verrière et des murs, proche des plans réalisés en 1900, a été réalisée pour que les lieux soient mis aux normes muséales. C'est donc dans ce lieu majestueux que le passé du monument rencontre la modernité de l'art numérique.
L'exposition "Game Story" est la seconde partie d'un triptyque qui a débuté par l'exposition "Des jouets et des hommes" (14 septembre 2011 23 janvier 2012), avec plus de 1000 jouets de l'Antiquité à aujourd'hui exposés. "Jours de fêtes" (16 décembre 2011- 2 janvier 2012), où manèges, grande roue, barbe à papa seront au menu, viendra ponctuer la programmation commune à tout le Grand Palais (Galeries nationales, nef et Galerie sud-est) autour du jeu.
A vos marques, prêt, jouez !
Peu considéré, le jeu vidéo entre dans la cour des grands avec cette première exposition dans un musée national. C'est le ministre de la Culture Frédéric Mitterrand en personne qui a souhaité qu'une telle rétrospective ait lieu, appuyant un projet lancé par l'association MO5. "L'objectif était de faire connaître au plus grand nombre un patrimoine mésestimé et un art dans lequel le talent français est mondialement reconnu", explique-t-on du côté du Grand Palais. Mais des talents qui fuient bien trop souvent vers les Etats-Unis ou le Japon, berceaux du jeu vidéo.
Si les visiteurs ont l'habitude de déambuler devant les tableaux, mains dans le dos et yeux scrutateurs, cette fois-ci, ils sont actifs. Car les commissaires ne se sont pas contentés de placer sous verre les modèles exposés. Ils ont sorti les manettes et les vieux écrans TV. Au total, ce sont plus de 40 ans d'histoire du jeu vidéo qui sont retracés tout au long d'un parcours chronologique. Des premières bornes arcades dont les célèbres Pong (deux traits qui se renvoyaient une balle dans une simulation de tennis) et Pac-man, à Kinect, l'accessoire de détection des mouvements lancé en 2010 sur Microsoft Xbox 360, en passant par les antiques consoles Atari, Commodore et la Nintendo NES, il n'y a bien que l'horaire tardif de fermeture (22h) qui décollera certains des écrans.
Le jeu vidéo, miroir de la société
L'histoire du jeu vidéo, c'est aussi celle de la société. De son évolution technologique d'abord avec des consoles qui n'ont cessé de se réduire en taille et de gagner en puissance. Le simple bip sonore a, lui, cédé sa place à de véritables orchestrations symphoniques. Les personnages ont pris du relief et sont de plus en plus "humanisés". En proposant quelques-uns des jeux les plus célèbres (Mario Bros, Space Invaders, Final Fantasy, Tetris, etc.), "Game Story" relate aussi les évolutions sociétales, le déplacement des centres d'intérêt et l'influence de l'environnement culturel (cinéma, télévision, littérature, etc.) sur une industrie en pleine expansion. On s'amuse de revoir ce numéro du Nouvel Observateur consacré au phénomène Lara Croft, aux clins d'il de nombreux jeux au cinéma et de ce même cinéma qui alla adapter les uvres vidéoludiques.
C'est tout cela que Jean-Baptiste Clais, conservateur au musée des arts asiatiques Guimet, en charge des cultures transmédias japonaises contemporaines, a voulu transmettre sur près de 600m² d'exposition où les machines s'offrent aux novices et aux nostalgiques qui, manette en main, retrouveront avec bonheur les vieux réflexes de leur jeunesse. Le jeu vidéo comme véritable madeleine de Proust et un premier pas sur le chemin de la reconnaissance pour un loisir élevé là au rang d'art véritable.
Pour prolonger l'aventure
"Game Story", ce n'est pas seulement une grande aire de jeux. Le site Internet du Grand Palais a laissé libre cours à l'imagination des commissaires de l'exposition avec un site dédié qui reste dans l'ambiance ludique de la rétrospective: un monde imaginaire version vieux jeu vidéo pixellisé reprenant les infos pratiques, des liens vers les réseaux sociaux, des vidéos où des gamers célèbres ou non parlent de leur expérience.
Une application pour smartphone est aussi accessible. Inspirée des jeux des années 1980, elle propose infos pratiques et jeu concours.
www.rmngp.fr/game-story
Pour les fans comme les novices, des ateliers sont proposés aux plus jeunes (10-14 ans) les mercredis et samedis afin qu'ils découvrent les ficelles de création d'un jeu. Des conférences sur l'histoire du jeu vidéo et les jeux cultes (le jeudi), des tables-rondes sur la question du jeu vidéo en France (le lundi) sont également au programme.
Plus d'informations sur www.rmngp.fr
Nos jeux vidéo 70-90
De Marcus et Philippe Kieffer
Editions: Hors Collection
Prix: 25
Le jeu vidéo a eu une vie avant les consoles ultra-puissantes, les manettes sans fil, Kinect et sa reconnaissance gestuelle. Avant "Call of Duty", "Halo" ou "FIFA", et même avant que le plus célèbre des plombiers devienne une star planétaire. Ce livre revient sur l'origine du boom du jeu vidéo, des premières salles arcade qui poussèrent comme des champignons dans les années 1970 avec Pac-Man comme fer de lance. Voici une belle plongée dans la première génération vidéo-ludique qui permet de comprendre l'explosion de la console de salon qui naquit avec le célèbre Pong (deux barres qui se renvoient une balle blanche) pour se réduire et s'emporter lorsque la Game Boy débarque. Les 20 ans de progrès technologiques qui ont bouleversé et propulsé le jeu vidéo au rang d'art avec ses codes et ses héros (Mario, Donkey Kong, Sonic, Lara Croft, etc.). Un cadeau pour les nostalgiques qui s'amuseront à reconnaître leur(s) console(s) de jeunesse au fil des pages.
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