Mondial de handball : l'heure d'encaisser "la gifle" pour les Bleues
La pression ? L’envie ? Le niveau de jeu ? Tant d’interrogations entourent l’équipe de France, sur le toit du handball mondial depuis deux ans, qui vient d’enregistrer son pire résultat sur un championnat du Monde depuis 1990 et une 14e place.
"Quand on prend une fessé faut savoir pourquoi on l’a prise"
"L’atterrissage est particulièrement douloureux.", confiait Allison Pineau après la défaite rédhibitoire contre le Danemark. Et pour cause ! Quand tout vous réussit lors des dernières compétitions (championnes du Monde en 2017 puis championnes d’Europe en 2018) il est compliqué de mettre des mots sur un échec retentissant. "Cette fois, c’est clair, il y a eu énormément de défaillances individuelles sur ce Mondial. Je ne sais pas comment l’expliquer, tente d'élucider la joueuse du Paris 92. C’est un des éléments de notre contre-performance." Car en effet, sur cette compétition les cadres sont passées à côté et toutes ont déjà su le reconnaître. Maintenant, les Bleues doivent en tirer les enseignements, "se remettre en cause" prévient Olivier Krumbholz, "c’est une gifle ! Quand on prend une fessée, faut savoir pourquoi on l’a prise."
Pourquoi donc ? Positionné à sept mois des Jeux Olympiques, ce championnat du monde ne s’apparentait pas comme un réel objectif, même si les joueuses et le sélectionneur avaient affiché l'ambition légitime de défendre leur titre. Un Mondial et un championnat d’Europe dans la poche, Olivier Krumbholz s’était déjà, peut-être, un peu trop avancé dans la préparation des Jeux Olympiques de Tokyo, objectif majeur d’une génération : "On a laissé le choix aux joueuses de participer ou de ne pas participer à ce mondial pensant que deux compétitions dans l’année c’est très sollicitant". Erreur de communication, frileux ou visionnaire ? Le sélectionneur avait en tout cas tiqué sur cette compétition.
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De leur côté, les joueuses ont décidé unanimement de se déplacer au Japon pour disputer ce Mondial. Tout le monde tirait dans le même sens, et misait sur la découverte du pays pour préparer les Jeux. Mais cette ombre olympique n’a pas cessé de planer tout le long du championnat sur l’équipe de France jusqu’à hanter certaines têtes qui rêvent de l’or à Tokyo. "Effectivement, les filles qui ont été dans la difficulté, la première chose à laquelle elles ont pensé, sans jamais le dire, c’est que si c’était déjà difficile dans une liste de 16, ça serait encore plus dans 6 mois dans une liste de 14, souligne Olivier Krumbholz. Faut être honnête, cette interrogation, je ne sais pas si elles l’ont partagé avec Richard (Ouvrard, le préparateur physique), mais moi j’ai senti qu’elle existait fortement."
La pression de perdre sa place pour les Jeux
En refusant la proposition du sélectionneur de faire l’impasse, les cadres se sont donc exposées. Et face à la concurrence au sein de cette équipe de France, le moindre faux pas était interdit. Le sélectionneur avait posé les conditions avant de s’envoler pour Kumamoto : "Le Mondial servira d’évaluation et les joueuses en sont conscientes. Elles savent compter, elles savent que ça passe de 16 à 14, que des jeunes poussent derrière. Moi j’ai fait le choix de faire confiance aux anciennes sur ce championnat du monde après il ne faut pas me demander des miracles. Celles qui ne seront pas performantes au Mondial n’auront pas marqué des points pour les JO."
A l'heure de compter les points, ils ne sont pas nombreux et avec cet échec les cartes semblent rebattues. La fin de match contre le Danemark en est l'illustration. Avec Orlane Kanor, Méline Nocandy et Océane Sercien-Ugolin sur la base arrière (ndlr : moins de 22 ans de moyennes d’âge), le coach a envoyé un premier message à ses cadres. "On a des joueuses jeunes qui se mettent au service du collectif et qui ravalent pendant des jours et des jours leur tristesse de ne pas jouer, avoue Krumbholz. Quand l’une rentre, l’autre sort, c’est mathématique. Tout le monde est au service de l’équipe et la peine de l’une n’est pas supérieure à la peine de l’autre. Donc à partir de ce moment-là il n’y a pas de privilège acquis." La sortie du groupe de Camille Ayglon-Saurina pour Gnonsiane Niombla après deux matches est le parfait exemple. "Dans un collectif qui fonctionne bien, on doit accepter sa position dans l’équipe et accepter que sa position puisse évoluer" conclut le chef du navire tricolore.
Des absences qui pèsent
Les Bleues ont dû composer pour ce Mondial avec des absences notables. La capitaine Siraba Dembélé (maternité) a manqué à l’équilibre du groupe, tant elle a pris une place importante dans le cocon des handballeuses tricolores. Les deux gardiennes, Cléopâtre Darleux (maternité) et Laura Glauser (genou), doublure d’Amandine Leynaud au Mondial 2017 pour la première et à l’Euro l'an dernier pour la seconde, ont manqué dans la rotation pour soulager leur numéro une. Irréprochable, Leynaud a du prendre à bras le corps ses responsabilités dans le but tout en assumant son nouveau rôle de capitaine. Pas simple à gérer.
L’équipe de France doit maintenant terminer sa compétition en jouant ses deux derniers matches de classement pour terminer entre les 13e et 16e places. Ensuite, il sera l’heure de débriefer pour se projeter sur la suite. "Le discours hier soir (vendredi) c’était : ‘Ne commençons pas à se déchirer, à se jeter des critiques à la figure.’ Je leur ai dit : ‘soyez digne de votre histoire et tout ce qu’il s’est passé depuis 4 ans.’ Il serait dommage de tout remettre en cause parce qu’on est en difficulté" termine Krumbholz. Un coup revenu en France, les Bleues pourront enfin ouvrir la page Tokyo 2020 mais certaine comme Alexandra Lacrabère on pris de l'avance : "Maintenant il va falloir aller chercher la consécration olympique."
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