JO d'hiver 2018 : comment Elizabeth Marian Swaney est devenue la skieuse "la plus nulle" des Jeux
Le temps d'un passage en qualifications de ski acrobatique, lundi, la Hongroise est devenue l'une des stars des Jeux olympiques de Pyeongchang.
Elle s'avance en haut du pipe, doucement. Puis elle s'élance, toujours avec prudence. Elle ne décolle guère lorsqu'elle arrive au sommet du tube et n'enchaîne aucune figure, là où les autres concurrentes du ski halfpipe tournoient ou s'envolent à plusieurs mètres au cours du "run". Résultat : une dernière place lors des qualifications de ski acrobatique, lundi 19 février, et une pluie de critiques et de moqueries sur les réseaux sociaux ou dans les médias. "La skieuse acrobatique qui ne savait pas faire d'acrobaties", "la performance la plus nulle", "la risée de Hongrie", RMC Sport a même parlé de la performance "la plus nulle" de ces Jeux.... Pas de quoi troubler cette skieuse de 33 ans, née aux Etats-Unis, prête à tout pour aller au bout de son rêve olympique malgré ses lacunes.
Changement de nationalité, échec au patinage et petits boulots
"C'est l'exemple même de la fille qui est allée au bout de son rêve olympique", témoigne le journaliste de francetv sport, Christian Choupin, qui a commenté son passage. Un rêve qu'elle poursuivait depuis toute petite. "Je veux aller aux JO", écrivait-elle à l'école primaire lorsqu'on lui demandait quelles étaient ses aspirations, rapporte Yahoo! (en anglais).
Consciente que son niveau ne lui permettait pas d'intégrer la délégation américaine pour les Jeux, Elizabeth Swaney s'est d'abord tournée vers le Venezuela, où sa mère a grandi, avant d'abandonner. "C'est plus difficile d'être skieur sud-américain", assure-t-elle. Elle opte finalement pour la Hongrie, d'où sont originaires ses grands-parents maternels. "Je voulais voir ce que ça faisait d'être une skieuse européenne", avoue-t-elle.
Mais avant d'avoir sa chance en ski halfpipe, elle s'est essayé à d'autres disciplines comme le patinage artistique et de vitesse, le hockey et même le skeleton. Avec autant d'échecs à la clé. Ce n'est qu'à 25 ans, rapporte BFMTV, soit huit ans avant d'être en lice aux JO, qu'elle finit par trouver sa voie.
J'ai travaillé très dur pour venir ici et il n'y a que 24 femmes dans le monde qui pourraient être dans cette finale.
Elizabeth Swaneyà Yahoo!
Pour financer son rêve, Elizabeth Swaney a fait appel à la générosité des internautes. Mais, elle a surtout dû enchaîner toutes sortes de boulots, parfois une demi-douzaine simultanément, précise Yahoo. Elle a, par exemple, travaillé pour une start-up, a été serveuse, caissière et a même présenté des bulletins météorologiques pour une chaîne locale dans l'Utah. Résultat : elle travaillait parfois entre 18 et 20 heures par jour.
Les failles du système de qualification
Pour être à Pyeongchang, Elizabeth Swaney a été maligne et a parfaitement profité des failles du système de qualification olympique. Elle a notamment bénéficié du faible nombre d'athlètes féminines engagées sur cette épreuve. "Elle a participé à chaque Coupe du monde, où il n'y avait que 24, 25 ou 28 femmes", éclaire le juge américain de halfpipe Steele Spence au Denver Post (en anglais).
Le niveau féminin en ski halfpipe n'étant pas exceptionnellement dense, elle a, à chaque fois, limité les risques en ne tentant jamais de figures spectaculaires pour ne pas tomber. Elle a ainsi accumulé suffisament de points pour se qualifier pour les Jeux. "Je suis toujours en train d'essayer de skier du mieux que je peux", se défend-elle. Une attitude critiquée par certains internautes et spectateurs.
Shame on you for scamming your way into the Olympics. #Olympics #PyeongChang2018
— Mike Jr. (@cusemike) 22 février 2018
You lack any shame.
— GiggityGoo (@whatayugonnado) 22 février 2018
What I was most disturbed by was your unearned sense of satisfaction at the end of your run. You did nothing to merit that entitked smile. Nothing to show respect for that awesome sport you mocked with that spectacle.
De quoi susciter aussi des critiques au sein du Comité olympique hongrois. D'après Le Figaro, il va "tirer les leçons de ce cas" et "reconsidérer les procédures de qualification". Même chose du côté de la Fédération internationale de ski (FIS). Le juge Philippe Bélanger envisage de modifier les conditions de qualification et de forcer les skieurs à "afficher de bons résultats en Coupe du monde", précise-t-il au Denver Post (en anglais). La seule présence sur les skis, sans prendre de risque, ne suffirait plus.
Mais elle est défendue par ses concurrentes, comme la Française Marie Martinod, médaille d'argent en ski halfpipe : "Si c'était une fille jamaïcaine, tout le monde dirait, 'Oh, elle l'a fait !'. Ce sont les Jeux olympiques. Qui se soucie d'où elle vient ? Vous vous battez pour être ici, elle n'est pas une grande skieuse, mais elle l'a fait."
Une habituée des défis fous
"Tout le monde envie sa folie de rêver, assure son ami Eric Hand à Yahoo (en anglais). Elle ne semble pas avoir cette voix dans sa tête qui lui dit qu'elle ne peut pas faire quelque chose." Car avant de forcer la porte des qualifications pour participer aux Jeux, cette diplômée d'Harvard a relevé d'autres défis fous. Elle a ainsi présenté sa candidature en 2003, à l'âge de 19 ans, au poste de gouverneur de Californie face à Arnold Schwarzenegger. Mais à l'image de sa prestation en ski acrobatique, sa campagne n'a jamais décollé.
En 2017, elle a aussi participé à une émission de téléréalité de cuisine. Son nom ? "Worst Cooks in America" ("Les Pires Cuisiniers des Etats-Unis"). Elle voulait "apprendre à faire un bon sandwich", s'amuse Jeff Passan, le journaliste qui l'a rencontrée pour Yahoo (en anglais). "J'essaie juste de garder l'esprit ouvert et de ne pas me mettre de limites", relève simplement Elizabeth Swaney. Même si ça l'oblige à se risquer à quelques acrobaties dans son quotidien.
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