JO d'hiver 2018 : "Il n'y a personne, c'est vraiment ridicule..." Mais où sont les fans à Pyeongchang ?
Plusieurs journalistes, envoyés spéciaux en Corée du Sud, décrivent des tribunes vides devant les épreuves majeures des Jeux olympiques d'hiver.
"Devant le ski alpin, il n'y a quasiment personne. Ça m’a choqué." A Pyeongchang (Corée du Sud), les journalistes français venus couvrir les Jeux olympiques s'étonnent. De nombreuses tribunes restent vides, même devant les grands rendez-vous de la quinzaine. Quentin Ramelet, correspondant de francetvsport sur place, raconte à franceinfo : "Jeudi, j'ai assisté au géant dames. On avait des grands noms comme Tessa Worley, mais il n'y avait personne... On devait être à 600 personnes dans les tribunes à tout casser et 300 maximum devant l'aire d'arrivée, alors que les lieux sont prévus pour accueillir 8 000 spectateurs", regrette le journaliste.
Dans un article publié sur la Tribune de Genève, un autre journaliste se dit "triste" et "fâché" devant le peu de monde que l'épreuve de descente en ski alpin a attiré. "Franchement… C’est la discipline reine du ski alpin, l’un des rendez-vous incontournables des Jeux d’hiver. Svindal, Jansrud et Feuz, ces trois immenses champions méritaient mieux que monter sur le podium devant trois pelés", écrit-il.
Le même problème qu'à Rio en 2016
"Entre le ski alpin et les Coréens, l'incompréhension est presque totale", juge L'Equipe. Tous les journalistes sur place l'ont remarqué : le public ne répond pas présent pour de nombreuses disciplines phares des JO. "On voit souvent des tribunes vides sur les côtés. C'est très clairsemé", note Christophe Gaudot, journaliste de francetvsport sur place, qui trouve la situation "dommage pour les athlètes".
Et c'est surtout le cas en ski alpin, estime-t-il. "Il n'y a personne, c'est vraiment ridicule." Pierrick Taisne, rédacteur en chef pour RMCsport à Pyegongchang, en est à ses troisièmes Jeux d'hiver. Il se souvient de tribunes pleines à Sotchi (Russie) et Vancouver (Canada). "En comparaison, il y a beaucoup moins de monde qu'à Vancouver. C'est à peu près le même problème de fréquentation qu'on a vu à Rio pour les Jeux d'été" en 2016, expose-t-il.
Heureusement, les athlètes ne semblent pas pâtir du manque de public. "Les Français font beaucoup de bruit, donc les athlètes tricolores ne s'en rendent pas trop compte, je pense", décrit Christophe Gaudot. Quentin Ramelet ajoute au public français les Américains, les Australiens, les Canadiens et les Scandinaves. D'après lui, ils se sont déplacés en nombre et sont, eux aussi, très agités. "Il y a quand même du bruit devant les courses."
Des patinoires en feu
Pour Pierrick Taisne, la fréquentation "dépend des sports". "En tant qu'Européens, on a l'habitude de regarder de l'alpin. Les disciplines qui ont beaucoup d'intérêt ne sont pas les mêmes pour le public asiatique", explique-t-il. Devant le patinage artistique, le short-track, le hockey ou le skeleton, les tribunes sont "toujours pleines, à 90%", note Christophe Gaudot.
Quentin Ramelet a ainsi assisté au premier match qui opposait les hockeyeuses coréennes à la Suisse, samedi 10 février. "L'ambiance, c'était de la folie. A chaque fois qu'elles avaient le palet, c'était électrique. Les Suisses font du bruit d'habitude, mais là, à côté, c'était dérisoire", décrit-il.
D'après les journalistes sur place, ces différences ont plusieurs explications. La première est culturelle. "Il y a un intérêt minimum pour tout ce qui est sport de neige ici", présente Christophe Gaudot. "C'est moins ancré dans les mœurs", confirme Pierrick Taisne. Contrairement aux sports de glace. "Le patinage artistique, le short track... C'est une institution chez eux. [Vendredi matin] il y avait de l'alpin ou du snow au programme. Pourtant, sur les télévisions sud-coréennes, on ne voyait que du skeleton et du curling", remarque-t-il.
Météo glaciale et tarifs exorbitants
Pour Jean Saint-Marc, journaliste à 20 Minutes, la faible fréquentation s'explique aussi par le prix des tickets auxquels s'ajoute celui des billets d'avion. "Les billets sont très chers, même pour les épreuves pas très populaires", raconte-t-il. A titre d'exemple, les prix montent à plus de 400 euros pour la finale dames du short-track (patinage de vitesse). Certains spectateurs finissent même par ruser : "J’ai parlé à des Français qui m’ont raconté qu’ils avaient acheté les places les moins chères et qu’après, ils se glissaient dans les tribunes. Ça marchait", confie Jean Saint-Marc.
La météo a également peut-être changé la donne. "Sur le biathlon, ça se passe le soir et on est parfois à -20 °C ressentis", décrit encore le journaliste de 20 Minutes. Les conditions météorologiques ont causé le report de nombreuses épreuves, certaines courses majeures se déroulant en simultané. Quentin Ramelet cite le combiné, le super-G ou la descente. "Du coup, on avait des journées ultra pleines, avec moins de monde sur chaque épreuve. Le ski alpin en a pâti", souligne le journaliste de francetvsport. Christophe Gaudot cite enfin l'accessibilité des sites. "Pyeongchang est assez isolé. On a un TGV qui la relie à Séoul, mais en voiture, c'est l'enfer : des bouchons à n'en plus finir..."
Vers des tribunes mieux garnies ?
Malgré ces constats, tous espèrent que la situation va s'améliorer d'ici à la fin des Jeux olympiques, le 25 février. "Il ne me reste plus qu’à espérer que la tendance puisse encore s’inverser. Que le spectacle sera suffisamment grand pour occulter tout cela", écrit la Tribune de Genève. Pierrick Taisne reste positif : "Sur le biathlon ça a été long à partir, mais maintenant, il y a un peu plus de monde."
Quentin Ramelet pense, lui, que le public s'intéresse peu à peu au ski. "En ski de fond pour le 15 km vendredi, c'est la première fois que je vois un public exceptionnel. Il y avait 8 000 personnes à peu près", dépeint-il. Malgré les températures très froides, le journaliste est heureux d'avoir assisté à l'épreuve et d'avoir vu cette "ambiance dingue". Parmi les spectateurs, beaucoup de Norvégiens, Finlandais, Suisses et Suédois, mais "aussi des Coréens !"
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