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Sotchi : ce qui pourrait gâcher les Jeux olympiques de Poutine

Le président russe compte en faire "le plus grand évènement de l'histoire post-soviétique", mais des menaces pèsent sur la bonne tenue de ces JO d'hiver.

Article rédigé par Simon Gourmellet
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 8min
Vladimir Poutine, le 4 janvier 2014 à Sotchi (Russie) : il testait ce jour-là la patinoire où se dérouleront les épreuves de hockey sur glace.  (ALEXEI NIKOLSKY / AP / SIPA)

Ces jeux sont les siens. C'est lui qui en a eu l'idée au lendemain de son élection en 2000, en skiant sur les pistes de Sotchi, cette station huppée du Caucase. Et c'est lui qui a su convaincre les membres du Comité international olympique (CIO) en 2007.

Sept ans plus tard, Vladimir Poutine compte bien en faire, dit-il, le "plus grand événement de l'histoire post-soviétique". Avec un double objectif en tête : faire oublier l'affront des Jeux de Moscou en 1980, largement boycottés après l'invasion de l'Afghanistan, et s'affirmer sur la scène internationale en plaçant la Russie au centre du monde le temps des épreuves.

Pour y arriver, il a mis les moyens. Ces Jeux olympiques sont d'ores et déjà les plus chers de l'histoire, avec un coût estimé à plus de 50 milliards de dollars (soit 37 milliards d'euros). Pour autant, l'événement rêvé par Poutine pourrait être gâché. Par quoi ? Francetv info détaille quelques éléments trouble-fêtes.

Une attaque terroriste

Des dizaines de milliers de policiers, des drones et une surveillance digne de l'ère soviétique : la Russie a pris des mesures de sécurité sans précédent face aux menaces d'attentats de la rébellion islamiste du Caucase. A tel point que l'on comptera 26 militaires pour un athlète dans la zone.

La menace est bien réelle, confirme à francetv info Philippe Migault, spécialiste de la Russie à l'Institut de relations internationales et stratégiques (Iris) : "Sotchi est au cœur du Caucase, une zone où l'on trouve des groupements terroristes liés à Al-Qaïda." Déjà, les auteurs des attentats de Volgograd ont promis aux autorités "un cadeau (...) pour vous et pour tous les touristes qui viendront". Le Tchétchène Dokou Oumarov, chef de la guérilla islamiste du Nord-Caucase, a également appelé ses partisans à recourir à "la force maximale". Enfin, des "veuves noires", ces femmes kamikazes qui poursuivent le combat de leur mari défunt, auraient été repérées sur place. Leurs portraits ont été placardés dans la ville, rapporte le Washington Post.

Des manifestations 

C'est l'autre sujet épineux. Les trois semaines de compétition seront une tribune unique pour les défenseurs de la cause gay en Russie. Ils ne manqueront pas de protester contre la récente loi interdisant la "propagande homosexuelle" devant les mineurs. Un dispositif qui prévoit de lourdes amendes et des peines de prison pour ceux qui organisent des défilés comme la gay pride, qui défendent publiquement les droits des homosexuels ou affirment que les relations entre personnes de même sexe équivalent aux relations hétérosexuelles. L'attitude des autorités, et notamment des autorités locales, sera donc particulièrement scrutée, puisque, selon Anatoly Pakhomov, le maire de la station, l'homosexualité n'est "pas admise" dans la région.

En signe de protestation, la délégation officielle des Etats-Unis, nommée par Barack Obama, est composée de deux athlètes, icônes de la lutte pour les droits des homosexuels (Billie Jean King et Caitlin Cahow). L'organisation Human Rights First aura également ses représentants sur place pour aider la communauté gay, lesbienne, bi et transgenre (LGBT) russe "à mieux vivre". Cédant aux pressions du Comité international olympique (CIO), le président russe a fini par autoriser les manifestations dans "une zone spéciale", mais à une quinzaine de kilomètres des sites olympiques...

A l'initiative d'Amnesty International, des danseurs de ballet réalisent une scène du "Lac des cygnes" devant l'ambassade de Russie à Londres (Royaume-Uni), le 29 janvier 2014.  (LEON NEAL / AFP)

Pour les athlètes aussi, le cadre est très strict. Si un athlète médaillé venait à exprimer son soutien à la cause homosexuelle sur un podium olympique, "il serait sanctionné comme l'ont été d'autres athlètes dans le passé qui ont essayé d'utiliser les JO pour faire passer des messages politiques", indique à RTL Tony Estanguet, membre du CIO et représentant de la commission des athlètes. "Après, il y a beaucoup d'autres temps que ceux de la compétition et du podium pour faire passer un message. Je pense qu'il faut être plus malin que la loi russe", ajoute-t-il.

Des résultats sportifs décevants

Après l'échec de Vancouver (trois médailles d'or glanées), les Russes, et Vladimir Poutine en tête, veulent retrouver leur statut de grande nation du sport. "Terminer premier au tableau des médailles, c'est l'enjeu majeur pour la Russie. Depuis quelques semaines, les télévisions russes ne parlent que de ça", confirme Alban Mikoczy, le correspondant de France 2 en Russie interrogé par francetv sport.

S'il est une épreuve qui retiendra toute l'attention des Russes, c'est bien le hockey sur glace. L'humiliation de la défaite face au Canada (7-3) en quart de finale à Vancouver est encore dans toutes les têtes. Sur le banc, les joueurs ont discuté de l'importance de la médaille d'or de la Russie au hockey, explique à ESPN le gestionnaire des patinoires olympiques. "D'autres équipes viendront ici pour gagner ou perdre, explique-t-il. Nous allons gagner ou nous mourrons."

Mais "on est loin du sort réservé aux Nord-Coréens lors de la Coupe du monde de football en 2010", nuance Carole Gomez, de l'Institut de relations internationales et stratégiques (Iris). Si l'objectif est de ramener un maximum de médailles, c'est l'attitude des sportifs russes qui sera particulièrement observée : "Ils doivent surtout se distinguer sur ce terrain-là, pour prouver que la grandeur russe est de retour."

L'absence de neige

Pour skier, la neige, c'est mieux. Pourtant, elle n'est pas garantie sur les hauteurs de Sotchi. Les faibles chutes constatées l'année dernière ont obligé les organisateurs à stocker près de 700 000 m3 de neige, sur quatorze "collines" érigées à plus de 1 100 mètres d'altitude, rapporte Terra Eco

Des canons à neige en marche sur une des pistes de la station de Sotchi (Russie), le 2 janvier 2014.  (ANTON DENISOV / RIA NOVOSTI / AFP)

Si le plan B est prêt, l'absence de chutes de neige ne manquera pas de relancer la polémique sur le choix du lieu. Car Sotchi se situe en zone subtropicale, avec treize jours enneigés en moyenne dans l'année, détaille Le Monde. Et en février, la température moyenne tourne autour des 6 °C. "Les conditions météorologiques étaient affreuses", témoignait le skieur freestyle Kevin Rolland à son retour d'une étape de Coupe du monde, en février 2013. D'autant qu'il a fallu, après 2007 et la désignation par le CIO, tout construire à partir de pas grand-chose, avec un budget battant tous les records et entaché par la corruption. Comme le rappelle Rue89, il y a quatre ans encore, la station ne comptait qu'une remontée mécanique !  

Des tribunes vides

Ces olympiades sont aussi pour Poutine l'occasion de se refaire une santé dans les sondages auprès des Russes. Les tickets ont ainsi été mis en vente à des prix raisonnables pour les citoyens russes. "Les Russes des quatre coins du pays, peu importe leur milieu, doivent pouvoir se rendre aux Jeux. C'est dans ce but que nous avons mis en place une politique de prix très flexible", a affirmé Vladimir Poutine en novembre dernier.

Mais trois semaines avant le début des Jeux, la billetterie n'affichait pas encore complet, loin de là, notait L'Equipe, avec 65% des places vendues. Le taux normal étant à ce stade habituellement de 85%.

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