Dans le documentaire "Teddy" qui lui est consacré, Teddy Riner s'est "redécouvert"
Dans le documentaire, intitulé "Teddy", on vous suit pendant 1 an et demi dans votre quotidien, à l’entraînement, en compétition, en famille. Pourquoi avez-vous souhaité réaliser ce documentaire ? En quoi est-ce important pour vous?
Teddy Riner : "C’était important pour moi parce que quand je suis rentré à l'Insep, j'avais 14 ans. Quand j'ai vu et découvert l'univers du sport de haut niveau, et le monde olympique, j'ai été incroyablement surpris, parce que nous sommes juste dans l'ignorance totale de ce que chaque sportif fait pour essayer de réaliser son rêve. A l’époque, j’ai commencé par réaliser des vidéos amateurs, mais bon … Je ne savais pas vraiment ce qu'il fallait filmer mais je tournais des images. Et quand j'ai eu mon premier titre, et ensuite avec mon palmarès et ma notoriété, j'ai pu approcher certaines chaînes de télévision, ce qui m’a permis de réaliser des documentaires. Celui-ci est mon deuxième et je suis heureux car à travers ces films, le public découvre le monde olympique et le sport amateur. Les jeunes peuvent aussi s’identifier et il y a des réponses dans ce film qui permettent de se projeter."
Quand vous avez regardé pour la première fois le documentaire finalisé, vous-êtes vous découvert sous un autre jour ?
TR : "Bien sûr. Une des choses qui m'a frappé, c’est de voir le poids que j'ai pris pendant ma coupure ! Wow… Je ne me voyais pas en fait et là je vois que ... J'étais énorme ! Et j’ai ainsi compris pourquoi telle ou telle chose n'allait pas, pourquoi j'ai mis du temps sur ci ou cela, je me suis découvert aussi."
"Si on fait un film, ce n'est pas pour dire 'non je n'aime pas cette image'... Quand on ouvre les portes, on les ouvre"
Quand on se voit à la télévision, notre propre regard change sur nous-même. Est-ce que cela a été votre cas ?
TR : "Même si je ne n'aime pas, je ne le dirai pas, parce que de toute façon les gens doivent vous voir comme vous êtes. Si on fait un film, ce n'est pas pour dire "non je n'aime pas cette image..." Quand on ouvre les portes, on les ouvre. Bien sûr, il y a plein de moments où je me dis que je n’aime pas, mais voilà c'est comme ça, on ne peut pas être beau tout le temps. Et puis, je ne suis pas le genre de personne qui programme tout."
Le public vous connaît comme le judoka double champion olympique. Pensez-vous qu'il va vous découvrir ou vous redécouvrir à travers ce documentaire ?
TR : "Il y a une partie du public qui va me découvrir et une autre qui va me redécouvrir parce que j’évolue et je grandis. Et je deviens aussi un père de famille, qui apprend tous les jours donc forcément je change. C'est comme le vin qui mûrit, moi aussi, je mûris et j'essaie de m'embellir."
"A mon époque, c'était une honte d’être suivi sur le plan psychologique, il fallait se cacher, mais je n'ai jamais eu honte"
Est-ce qu'il y a eu des moments, pendant le tournage, où vous vous êtes autocensurés ?
TR : "Non, et je n'ai pas été dans la programmation du film et je ne le veux pas. Ce n'est pas mon job, c'est aux journalistes de raconter. Je leur ai donné l'opportunité de pouvoir tourner avec moi. Maintenant, si c'est moi qui suis à la construction du documentaire, je pense que, déjà ça ne serait pas le même film, et chacun voit ce dernier à sa manière. Le documentaire qu’ils ont produit est authentique."
Pendant le tournage, avez-vous été à l'aise tout de suite et avez-vous rapidement oublié la caméra ?
TR : "Les caméras, quoi qu'il arrive, je les oublie. Ensuite, c'est une relation de confiance qui se crée avec le caméraman et l'équipe de production. Et c'est vrai, qu'elle s'est bien construite."
Dans le documentaire, on y apprend que vous êtes suivi par une psychologue depuis vos débuts, à l’âge de 14 ans. Est-ce qu’à l’époque, cette idée vous est venue naturellement ?
TR : "Non, on m'a proposé et j'ai accepté d’essayer. A mon époque, c'était une honte d’être suivi sur le plan psychologique, il fallait se cacher, mais je n'ai jamais eu honte. Se cacher de quoi ? Pour la performance, il n'y a pas besoin de se cacher, il faut mettre tous les ingrédients dans son panier pour pouvoir être champion et réussir. Il n'y a pas de honte à avoir."
Et même aujourd'hui, après avoir été deux fois champion olympique, et huit fois champion du monde (dans la catégorie +100 kg), vous éprouvez toujours ce besoin ?
TR : "Oui j’ai toujours eu ce besoin. Et on ne change pas une équipe qui gagne, c'est comme ça."
Dans le documentaire, votre staff indique que vous intériorisez beaucoup et que lorsque que quelque chose ne va pas, vous ne le montrez pas. Est-ce qu'il y a une personne à qui vous vous confiez davantage ?
TR : "Oui Meriem (Salmi, sa psychologue, ndlr). Si quelque chose ne va pas, la personne qui le saura, ça sera elle la plupart du temps. Et de toute façon, même si j'essaie de dissimuler (rire), c'est dingue comment elle sait, comment elle sent ce qu'il se passe. Ce qui est extrêmement marrant, c’est que quand quelque chose arrive dans ma vie, je reçois un message d’elle, comme si elle était connectée. C'est impressionnant."
C'était comment d'être suivi pendant 19 mois par trois journalistes ?
TR : "C’est cool parce que quand on ne tourne pas, on est ensemble, on mange ensemble, on rigole ensemble. Il y a tous les moments au-delà du tournage."
Aujourd’hui, quel est votre lien avec Benoit Durand, Laurent Lefebvre et Brice Baubit ? Ce n'est plus une simple relation entre sportif et journalistes ?
TR : "Non, c'est plus fort. Si demain, même s'ils ne sont plus à France Télévisions, ils me demandent n'importe quel service, je ferai tout mon possible pour les aider, avec plaisir. Ce n’est plus vraiment du travail, c'est devenu des amis je pense, ils me connaissent, on a appris à évoluer ensemble."
Une suite de ce documentaire est-elle envisageable ? Et pourquoi pas une suite qui nous emmène jusqu’à Tokyo à l'été 2021…
TR : "Bien sûr. Il faut l’épisode 2 pour savoir comment cette aventure va se terminer, et pour savoir si j'ai réussi à obtenir cette médaille d’or."
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