L’indispensable Monsieur Griezmann
La France chérit sa liberté. Sa riche histoire l’a aussi vu s’abandonner derrière les bottes de ses grands leaders. La tradition française des grands chefs. Le bonapartisme n’est pas mort avec Napoléon, encore moins en football. On a beau vanter les mérites du collectif sans quoi une équipe ne peut rien réussir, c’est oublié un peu vite que dans chaque génération triomphante, il y a une étoile qui éclaire les autres. Platini en 1984. Zidane en 2000. Si les Bleus remportent un troisième Euro dimanche au stade de France face au Portugal, Antoine Griezmann entrera dans cette caste des faiseurs de rêve à qui ont donne les clés du camion sans se poser de questions existentielles. Chahuté après le match d’ouverture contre la Roumanie, l’attaquant madrilène a très vite remis son horloge interne à l’heure de l’Euro. Dès le 2e match contre l’Albanie, « Grizi » a repris à Payet le costume de sauveur de la patrie d’une tête merveilleuse à la 90e minute. Le stade Vélodrome de Marseille venait de chavirer de bonheur une première fois pour son lutin français. Même joueur et émotions décuplées quatre matches plus tard quand Griezmann envoyait les Bleus en finale grâce à son doublé contre l’Allemagne (2-0). Egalement buteur contre l’Eire et l’Islande, il portait à six buts son total sur cet Euro. Personne n’avait autant marqué que lui sur une seule édition depuis Michel Platini et ses neuf buts en 1984.
Un but à la Gerd Müller
Comme Platini ou Zidane à leurs grandes heures, Griezmann a pris ses responsabilités sur le penalty accordé aux Bleus avant la mi-temps. « J’avais à cœur de retirer un penalty dans un moment important, a-t-il expliqué après le match en référence à sa tentative ratée en finale de la Ligue des champions perdues avec l’Atlético Madrid face au Real. Je suis heureux d’avoir décidé de le tirer et de le réussir. » Electron libre quand il évolue derrière un attaquant de pointe, « Grizi » a aussi donné le tournis aux Allemands et permis à toute une équipe de souffler pendant la domination des hommes de Löw. Ses accélérations ou ses temporisations étaient vitales. « Antoine est un grand joueur. Il l’a prouvé dans tout ce qu’il a fait ce soir, a reconnu le sélectionneur Didier Deschamps. En plus il a été très généreux avec Giroud ce soir. Grâce à leur travail, on a fait un bloc compact. » Et qui a enfoncé le clou dans les têtes allemandes ? Encore Griezmann, à la retombée d’un ballon mal dégagé. « Manuel Neuer commet un erreur et Grizi en Gerd Müller, ironie du sort, la met parfaitement entre six jambes », raconte Olivier Giroud, admiratif et presque hilare lorsqu’il évoque le 2e but français.
Un système sur mesure pour lui
L’Allemagne va regretter longtemps de ne pas avoir mis en place un plan anti-Griezmann. Didier Deschamps a lui tout fait pour le mettre dans les meilleures conditions. Ce système en 4-3-2-1 qui va si bien à ces Bleus, le sélectionneur l’a surtout installé pour lui permettre d’influer sur le jeu en décrochant et en s’infiltrant entre les lignes adverses. « C’est un joueur très important, confirme Deschamps. Il est décisif sur cet euro. Et en plus il fait bien jouer les autres joueurs autour de lui. » Malgré ce concert de louanges, Antoine Griezmann refuse de s’enflammer ou de tirer la couverture à lui. « C’est la victoire de tout le monde. Des kinés à Clairefontaine, des remplaçants qui ne jouent peu et qui donnent tout à l’entraînement. » Pour que l’aventure soit encore plus belle et qu’on parle de lui comme d’un prétendant sérieux au Ballon d’or face à Cristiano Ronaldo, il reste un match à gagner. « C’est le plus compliqué, indique-t-il. Il faudra être prêt. » CR7 le sera mais lui aussi.
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