Laure Manaudou se retire des bassins
Ca y est, c'est fini… Cette fois, Laure Manaudou ne devrait plus tenter de come-back, au contraire de ce qu'elle avait fait en juin 2011, après quasiment deux années de retraite. Couverte de titres internationaux entre 2004 et 2007, l'élève de Philippe Lucas avait redonné ses lettres de noblesse à une natation française en déliquescence. Les chiffres suffisent à le prouver. Avant sa victoire sur le 400 m aux JO d'Athènes, seuls deux tricolores avaient conquis l'or olympique, dont le dernier, Jean Boiteux, aux Jeux d'Helsinki en 1952. Depuis le sacre de la nageuse de Villeurbanne, quatre de ses compatriotes et un relais sont montés sur le toit de l'Olympe.
Entre sa couronne olympique et sa retraite, neuf années seulement se sont écoulées. Le temps pour Manaudou d'enchaîner trois vies sportives aux goûts diamétralement opposés. Viens d'abord le succès. Immense, magistral, et démesuré. A 17 ans seulement, Laure Manaudou devient une star et une icône. Ultra-dominatrice en catégories jeunes sur le sol national et facile au niveau européen (5 médailles dont 1 d'or), elle écrase les championnats de France de Saint-Etienne 2003 et confirme sa toute-puissance à Dunkerque l'année suivante. Ses trois médailles d'or aux championnats d'Europe de Madrid à quelques encablures des Jeux Olympiques laissent augurer de belles performances en Grèce.
VIDEO: Le 400 m en or aux Jeux Olympiques d'Athènes
Dans le bassin athénien, Manaudou est irrésistible. Alors qu'elle n'est pas encore majeure, elle s'offre le 400 m olympique, faisant tomber le record d'Europe sur la distance au terme d'une course irrespirable. La sirène du Rhône devient princesse, d'autant qu'elle décroche une breloque argentée sur 800 m puis le bronze sur 100 m dos. Puis, la princesse se transforme en reine incontestable et incontestée, au fur et à mesure que les médailles s'amoncellent. Le 400 m reste sa chasse gardée aux Mondiaux de Montréal (2005) et de Melbourne (2007) comme aux Europe de Budapest (2006) en grand bassin ou ceux de Trieste (2005), Helsinki (2006) et Debrecen (2007) en petit bassin. Au niveau continental, elle règne également sans partage sur le 100 m dos. Au gré de ses envies, elle s'aligne sur le 200 ou le 800 m voire le 200 m 4 nages, montant chaque fois sur le podium.
Rien ne résiste à Manaudou, qui éclabousse de son talent les championnats du monde australiens dont elle est désignée meilleure nageuse en compagnie de… Michael Phelps. La Rhodanienne fait tomber les records du monde du 200 et du 400 m nage libre et fracasse quelques autres marques de références européennes sur 100 m dos, 800 m ou 1500 m nage libre. Sans qu'elle le sache, sa carrière est à son apogée. En mai 2007, la nageuse choisit de quitter son mentor Philippe Lucas pour rallier l'Italie et rejoindre son copain Luka Marin. Débute alors un cauchemar. La meilleure nageuse de l'année 2007, désignée par le magazine Swimming World, est au centre de nombreuses rumeurs et ne peut se stabiliser de l'autre côté des Alpes. Elle opte pour un retour dans sa région sous la direction de son frère Nicolas, avant de le quitter pour rejoindre Lionel Horter à Mulhouse en 2008.
VIDEO: Les trois olympiades de Laure Manaudou
Si elle fait illusion aux championnats d'Europe d'Eindhoven la même année avec trois médailles, les Jeux de Pékin déchoient celle que les Jeux d'Athènes avaient portée aux nues. Dernière de sa finale sur 400 m nage libre, elle ne figure même pas dans les 8 meilleures nageuses sur 100 m dos et 200 m nage libre. Le début de la fin pour l'ex pensionnaire du Canet-en-Roussillon. Son départ d'Alsace vers le Cercle des Nageurs de Marseille n'y change rien. Privée "du plaisir de nager", la jeune prodige met un terme à sa carrière début 2009, à 23 ans à peine.
Rattrapée par la fièvre de la compétition, Manaudou replonge en juillet 2011 et entame sa troisième vie. Mais elle n'est plus là même. Désormais mère d'une petite Manon, celle qui partage sa vie avec Frédérick Bousquet ne suscite plus les mêmes attentes. Pourtant, elle écrase toutes les distances de dos aux championnats de France de Dunkerque en mars 2012, se qualifiant pour le 100 et le 200 m de la discipline pour les JO et les championnats d'Europe de la même année. Hors-sujet à Londres, la Française se rattrape au niveau continental en s'octroyant l'or sur 50 m dos, l'argent sur 100 m dos puis le bronze sur le relais 4x50 m 4 nages. A Chartres, Laure Manaudou aura donc disputé ses dernières courses. Après avoir survolé la natation mondiale, la nageuse au papillon tatoué sur l'épaule droite choisit de déployer ses ailes hors des bassins.
Michel Rousseau: "Elle a impulsé le mouvement avec Philippe Lucas"
Ancien champion d'Europe du 100 m nage libre et vice champion du Monde sur la même distance dans les années 70, Michel Rousseau a notamment suivi de près la carrière de Laure. Il revient sur le parcours de la jeune femme: "De Laure, je retiens évidemment son titre olympique sur 400 m aux jeux d'Athènes. C'était le 1er titre olympique pour la France depuis Jean Boiteux. C'est un événement qui a ouvert l'esprit des gens et un avenir doré à la natation française".
"Elle a impulsé le mouvement avec Philippe Lucas. Parce que je considère qu'il est impossible de les dissocier. C'est une histoire qui a créé une natation forte. Ils ont joué un rôle de starter. Avant eux, la natation était un sport qui avançait masqué, un sport olympique un peu dans l'ombre et désormais c'est un sport fort et reconnu", reprend une des figures de la natation tricolore.
"C'est une énorme personnalité et une image humaine de ce sport. Ils ont travaillé dur avec Lucas mais l'humanisme de ce couple était marquant. Ils ont souffert ensemble et ont montré que pour réussir il fallait travailler. La natation française a eu la chance d'avoir une fille belle avec une forte personnalité qui a attiré les regards et les médias, conclut ainsi "Mickey".
VIDEO: Une carrière dans le rétro avec Alexandre Boyon
Jérôme Carrère
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