Lièvremont regrette le "manque de sincérité" de Harinordoquy
Près d'un mois après la finale perdue contre la Nouvelle-Zélande, Marc Lièvremont est sorti de son silence. Dans une longue interview au Monde.fr, il évoque son "retour sur terre", revient sur le Mondial, sur son rôle, son image, ses relations avec les joueurs, sa vision du milieu. Comme toujours, il livre sa vérité. "Pour l'instant, je me sens serein, apaisé. Il y a un reste d'euphorie et j'ai conservé mon mode de fonctionnement pour le sommeil: je dois dormir 3 à 4h par nuit, comme ça a été le cas pendant la compétition", dit-il, avant d'avouer qu'il n'a pas revu la finale, le seul match qu'il n'a pas revisionné pour "conserver le premier ressenti, à chaud. Et puis, cela pourrait raviver des blessures. Il y a quand même un sentiment d'amertume. On est passé à côté de quelque chose d'énorme."
Comme souvent lorsqu'il livre ses pensées, Marc Lièvremont donne l'impression d'être offensif. Son image et sa cote auprès du public ? "En Nouvelle-Zélande, je voyais des gens qui portaient la moustache et qui m'applaudissaient, peut-être un petit peu plus fort que certains joueurs - je pense que certains n'ont pas aimé. Cela n'a sans doute pas aidé. Alors que moi, l'image, je m'en fous."
"Mon rôle d'être Père Fouettard"
Son management ? "J'ai toujours essayé de placer les joueurs devant leurs responsabilités et j'ai souvent regretté leur manque d'implication, parfois d'autocritique. Je pense qu'on avait un groupe sain dans l'ensemble, et beaucoup de joueurs ont été irréprochables jusqu'à la fin de la compétition. Sur les trois dernières semaines, ils ont su donner le meilleur d'eux-mêmes et mettre de côté leurs problèmes d'ego. Mais ce qui a changé, c'est le rapport à l'image. Les joueurs sont conseillés et savent que c'est elle qui va leur permettre de capitaliser sur leurs performances sportives. C'est mon rôle d'être le Père Fouettard, quitte à blesser les joueurs, parce que j'ai compris depuis longtemps qu'on ne peut pas attendre de leur part de la reconnaissance ou de la gratitude. La critique positive, les proches, les agents vont la faire, moi je suis dans une position d'exigence. Certains l'ont mal vécu mais je n'ai aucun regret." Et de reconnaître que "mon principal levier, c'est la franchise" face à ses troupes, ce qui a pu aboutir à "une sorte de révolte contre moi" lors de la finale. "Si ça a été un des leviers de leur performance en finale, tant mieux. Que certains m'aient fait la gueule, on peut le comprendre, c'est humain."
Un hérisson face à la presse
Ses relations avec la presse ? "J'ai bien conscience que vis-à-vis de la presse, je me suis transformé en hérisson. C'était pour me protéger. J'ai considéré que mes joueurs et moi-même surtout moi peut-être nous étions seuls contre tous. Si le sport est populaire, il y a forcément plus de médiatisation, plus de polémiques. Et puis on sait que la presse est en crise, notamment la presse écrite." Il avoue que ce n'était "pas confortable pour les joueurs de vivre dans ce climat de défiance, de critique permanente. (...) Moi, j'ai eu le tort d'arriver avec très peu d'expérience et d'être vite critiqué."
Les critiques d'Imanol Harinordoquy, le qualifiant dans Midi Olympique de "perdu" et de dépassé" ? "Je le considère comme quelqu'un d'intelligent, avec un gros ego. J'ai été surpris par son manque de sincérité, parce que jusqu'au bout il m'a serré la main. Il aurait pu, même après la finale, me dire qu'il ne m'avait pas apprécié. Ces sorties médiatiques, je ne peux que les regretter, mais personnellement j'en ai pris tellement plein la gueule ! Alors, une ou deux critiques de plus "
Son avenir est-il possible hors du rugby ? "Depuis toujours, c'est le fil rouge de ma vie. J'ai commencé à cinq ans et je n'ai plus lâché Donc il y aura certainement encore du rugby quelque part." Et de répéter une nouvelle fois que "je n'ai jamais considéré cette fonction de sélectionneur, dont je ne voulais d'ailleurs pas, comme un aboutissement. C'est une belle parenthèse, même si je sais qu'en terme d'émotions, j'aurai du mal à vivre quelque chose d'aussi fort. Heureusement, à 43 ans, je ne me dis pas que je suis en préretraite."
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