MMA : Salahdine Parnasse, itinéraire d'un surdoué prêt à marquer l'histoire
"On veut marquer l'histoire." Stéphane Chaufourier, plus communément appelé "Atch", est catégorique concernant son jeune poulain, Salahdine Parnasse. En cas de victoire, le combattant français peut cumuler une troisième ceinture simultanée en MMA, un accomplissement jamais réalisé dans l'histoire de ce sport. Le Franco-Marocain affronte Adrian Bartosinski, samedi 16 décembre, pour obtenir la ceinture des poids mi-moyens (- 77 kg) du Konfrontacja Sztuk Walki (KSW), l'organisation polonaise de MMA, considérée comme l'une des plus grandes en Europe.
Le natif d'Aubervilliers (Seine-Saint-Denis) est déjà champion des poids plumes (- 66 kg) du KSW. D'abord intérimaire en 2019, il devient champion incontesté grâce à l'abandon de ceinture de Mateusz Gamrot quelques mois plus tard, qui a rejoint l'Ultimate Fighting Championship (UFC). Il est également champion des poids légers (- 70 kg), d'abord intérimaire en 2022, puis officiellement champion en juin dernier, après le forfait trente minutes avant le début du combat de Marian Ziolkowski.
Malgré ces deux titres en sa possession, sa soif de victoires est loin d'être étanchée. "C'est quelqu'un qui a un gros tempérament et qui n'aime pas du tout la défaite", explique Stéphane Chaufourier à franceinfo: sport. Le jeune homme de 26 ans, qui a commencé par le football, a beaucoup appris aux côtés de son manager, tant d'un point de vue sportif que personnel. "Il m'a instauré une certaine éducation. C'est avec lui que j'ai grandi, il m'a apporté beaucoup de valeurs et de principes", confie Salahdine Parnasse, dont le père est décédé alors qu'il avait 18 ans.
"J'étais un petit avec beaucoup d'énergie, il fallait me canaliser"
Pourtant, rien ne le prédestinait à se trouver là où il en est. Il a découvert par hasard ce sport à 11 ans, une époque où le MMA n'était pas encore légal en France (il l'est depuis janvier 2020), alors qu'il se promenait avec un ami à Aubervilliers. "Je voulais faire de la boxe, du judo, mais le MMA regroupe tous les arts martiaux. J'étais un petit avec beaucoup d'énergie et il fallait me canaliser. Ma mère m'a inscrit directement quand je lui ai montré la salle." Une occasion pour elle de le voir encadré par des professionnels, lui qui se chamaillait avec l'un de ses quatre frères. "On s'amusait à faire du catch, ma mère n'en pouvait plus", confiait son frère Samir dans un documentaire sur la chaîne RMC Sport.
Progressivement, Salahdine Parnasse a enchaîné les combats en amateur, puis en professionnel, mais ne gagnait toujours pas sa vie en tant que combattant. "Il a commencé à travailler très tôt à la mairie d'Aubervilliers, aux alentours de 18 ans, mais on a pu trouver des horaires aménagés pour qu'il puisse s'entraîner deux fois par jour", indique Atch.
Passé par la Chine et la Belgique avant de rejoindre l'organisation polonaise de MMA, Salahdine Parnasse a gagné 19 combats en 21 disputés. Il est devenu à 25 ans le plus jeune double champion du KSW l'été dernier. Un parcours similaire à un certain Kylian Mbappé, d’où le surnom de "Kylian Mbappé du MMA". Journaliste pour Actu MMA, Lorenzo D'Adamo décrypte cette comparaison : "Les deux sont des prodiges dans leurs disciplines. Ils ont battu des records très jeunes et ont un avenir prometteur dans leur sport. Ils ont tout pour avoir une carrière de légende."
Travail et discipline
Acharné de travail, le "Super Prodige" s'entoure des mêmes depuis tout petit. Pour ce combat, Salahdine Parnasse ne déroge pas à la règle et repousse sans cesse la limite à l'entraînement. "Quand la séance est finie, j'essaye de faire un maximum de musculation pour avoir un bon gabarit", assure-t-il. Atch explique même qu'il "va courir quand il ne peut pas venir à l'entraînement".
Malgré son quotidien chargé, le jeune combattant assure en parallèle son rôle de père d'une petite fille de huit mois, "une source de motivation supplémentaire", et profite de son temps libre pour rester en famille. S'il est timide, Salahdine Parnasse sait aussi faire preuve de beaucoup d'humour assure son manager. "C'est un jeune comme les autres. Il joue à la Playstation, il aime blaguer, mais à la différence d'autres, il ne va pas en boîte de nuit, il reste avec sa famille."
Un immense défi
Une discipline obligatoire pour préparer l'immense défi qui attend Salahdine Parnasse, face à un combattant invaincu, qui a infligé 11 K.O en 14 combats. "On a un bolide en face de nous", prévient Atch. "C'est quelqu'un qui frappe très fort, qui va certainement tout mettre dès le premier round. Ce sera à nous d'être vigilant et de jouer sur ce qu'on sait faire le mieux : être vif et faire durer le combat", ajoute le créateur de la Atch Academy. Car le "cardio", soit l'endurance au combat, est l'un de ses atouts, estime Lorenzo D'Adamo. "Le rythme qu’il met dans chacun de ses combats, c’est vraiment l’élite. Il submerge et noie ses adversaires."
"Je pense qu'en cinq fois cinq minutes, Salahdine est imprenable, peu importe qui il a en face de lui."
Stéphane Chaufourier, entraîneur de Salahdine Parnassefranceinfo: sport
Son passage chez les mi-moyens implique des modifications des entraînements et de l'alimentation. "Il s'alimente un peu plus en termes de calories, il a besoin de prendre un tout petit peu plus de poids, mais pas trop non plus car il tourne déjà à 77 kilos hors combat", explique Atch.
Une victoire... avant un changement ?
Malgré son niveau déjà élevé, Salahdine Parnasse a encore du pain sur la planche selon son manager. "Il adore le ground and pound, c'est-à-dire les frappes au sol. Sur cette discipline, il est très fort, mais d'un point de vue technique, il peut encore s'améliorer." En revanche, en striking (partie boxe ou pieds-poings), il n'a rien à envier aux meilleurs frappeurs du monde, selon Lorenzo D'Adamo. "Il est hyper précis, rapide et puissant. Il est très complet et sa technique est bonne."
Une victoire face au champion Adrian Bartosinski, une troisième ceinture à la clé, le ferait basculer dans une autre dimension. Son contrat au KSW prend fin dans deux combats, et certains de ses supporters souhaitent le voir ensuite à l'UFC, la plus grosse organisation mondiale de MMA. Mais Atch ne veut pas précipiter les choses. "Aller à l'UFC, c'est bien d'un point de vue marketing, mais tu peux très vite aussi dégringoler. Une défaite à la décision partagée et tout change, et la partie financière est importante chez un gamin qui a grandi à Aubervilliers. On sait ce qu'est la nécessité d'avoir quelque chose entre les mains quand on finit sa carrière", ajoute Atch.
Salahdine Parnasse lui-même n'est pas pressé de partir du KSW, qui organise des combats devant plus de 50 000 spectateurs et propose des contrats avantageux financièrement. Le combattant pourrait même ramener l'organisation polonaise en France. "C'est en discussion", précise-t-il. Quoi qu’il en soit, Salahdine Parnasse se trouve à un combat d'entrer dans l'histoire du MMA.
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