Berlin : L'équipe de France à l'heure des doutes?
"Humilité, lucidité, combattivité". Les mots d’ordre de Francis Luyce, président de la Fédération Française de natation fleurent bon le labeur et non le triomphe. Parce que l’heure n’est pas forcément à l’euphorie chez les Bleus, à la veille de ces championnats d’Europe de Berlin, la grande échéance d’une année qui a été "longue" de l’aveu même de Jérémy Stravius, l’un des cadres rescapés des Bleus. Entre le forfait de Camille Lacourt il y a deux semaines et la retraite surprise de Camille Muffat au début de l’été, les Bleus tirent un peu la langue. Le bilan exceptionnel de Budapest – 21 médailles dont huit titres – il y a quatre ans ne sera sûrement qu’un lointain souvenir dimanche prochain. "Nous attendons huit à douze médailles" assure d’emblée le Directeur Technique National, Lionel Horter. Des chiffres qui sont dans la lignée des Mondiaux, où les Bleus étaient repartis avec neuf breloques, et des JO (sept) où les Bleus avaient terminé meilleure nation européenne. Un objectif réaliste, donc, puisque sans les Camille, c’est quasiment six médailles qui s’envolent.
Ambiance et ambition malgré tout
Si dans les faits, cette équipe de France ne transpire par la sérénité, puisqu’au bilan européen seul Yannick Agnel sur 200m est tête avant l’ouverture de cet Euro, dans les paroles, les différents acteurs du clan tricolore ont voulu rassurer. Ils sont soit "impatients d’en découdre" (Bonnet), soit en forme avec de "bonnes sensations" (Stravius). Mulhouse est passé par là. Cette période de préparation de 15 jours, inhabituellement longue quand elle dure normalement une semaine. "On vient de passer 15 jours ensemble. C’est l’encadrement et les nageurs qui l’ont décidé pour se préparer dans les meilleures conditions possibles à une date tardive. Ces 15 jours se sont déroulés sans le moindre nuage avec de la concentration, du travail, du sérieux", déclare Lionel Horter.
Un tableau idyllique donc si on l’écoute. Assez pour chasser les fantômes ? "Il n’y a pas plus de craintes ou de peur que les autres fois. Il y a de la motivation, de la sérénité. On a fait notre travail pour mettre cette équipe dans les meilleures conditions possibles". La confiance règne et l'appétit est bien présent. Et tant pis si les Bleus ne sont plus l’ogre européen de Budapest. "Il y a de bonnes chances qu’on ne soit pas meilleure nation européenne à la fin de la compétition, sourit le DTN, le sport de haut-niveau est une succession de défis. Cette compétition dans laquelle nous rentrons amoindris en est un. C’est un challenge passionnant".
Tous attendus
Malgré les difficultés, le degré d’exigence sera tout de même élevé. Pour les 43 nageurs présents, les stars comme chez les novices. "Tous ces jeunes, on les attend à leurs meilleurs niveaux. On attend qu’ils battent leurs meilleures performances personnelles. On a décidé avec les entraîneurs de les laisser nager plusieurs fois afin qu’ils prennent de l’expérience. Ca sera difficile car là ils vont être bousculés. Quant aux nageurs majeurs, on attend des titres, des médailles avec leurs meilleures performances personnelles parfois", énonce Horter. En creux, il pointe les insuffisances de cette nouvelle génération qui pointe le bout de son nez. "La génération des jeunes n’a pas les résultats des nageurs tricolores au plus haut niveau, concède-t-il. Chez les juniors nous sommes dans les profondeurs des classements européens. On a décidé d’emmener des jeunes pour leurs mettre le pied à l’étrier. Il y a aussi une question de générations. On n’aime pas trop ce terme, mais il y a quand même des gens exceptionnels dans cette équipe de France et on ne les trouve pas tous les jours".
Finalement, le meilleur allié des Bleus à Berlin pourrait bien avoir brillé cette semaine à Zurich. L’équipe de France d’athlétisme a collectionné les médailles (23 au total) en Suisse et pourrait servir d’inspiration aux nageurs. Comme il y a quatre ans où à Budapest la moisson des nageurs avait répondu à celle de l’athlétisme à Barcelone. "C’est vrai qu’on regarde. On a envie de faire pareil", souffle Coralie Balmy. "Les athlètes ont la fibre patriotique. Ils suivent, ils sont affectés par la disqualification du 3000m steeple. Mais surtout, ils ont pris plaisir à voir les athlètes performer. Ce ne sont pas les mêmes sports, ni le même niveau. Mais c’est génial, on va essayer d’emboîter le pas, on va essayer de prendre le relais", confirme Romain Barnier, l’entraîneur des Bleus. A eux de jouer.
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