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Point technique: le virage

Pendant la durée des championnats du monde, les consultantes de France Télévisions, Roxana Maracineanu, championne du monde en 1998 et vice-championne olympique du 200m dos en 2000, et Malia Metella, vice-championne olympique du 50m nage libre en 2004 et vice-championne du monde du 100m nage libre en 2005, décortiquent quelques aspects techniques d'une course. Aujourd'hui, le virage.
Article rédigé par Thierry Tazé-Bernard
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 4min
La culbute du nageur en plein virage

"Le virage fait partie intégrante de la nage", note Malia Metella, l'ancienne sprinteuse. "C'est le moment utilisé pour se relancer dans une course. Schématiquement, le nageur doit effectuer une boule, en rentrant la tête sur la poitrine, et tout le corps doit ainsi s'enrouler jusqu'aux jambes. C'est un mouvement qui part des bras, et le reste du corps doit suivre avec la tête, le corps et les jambes. C'est une continuité dans la course. Pour éviter que l'eau n'entre dans le nez au moment où on bascule, on expire par le nez l'air qu'on vient de prendre par la bouche. C'est la même chose que l'on fait à chaque fois qu'on prend de l'air lorsqu'on nage, tous les trois temps, c'est-à-dire qu'on fait trois mouvements et sur le troisième mouvement on prend de l'air. Avec la pratique, tout cela se fait automatiquement. 

Les grands spécialistes des virages parviennent à gagner du temps avec le virage et la coulée qui suit. Mais on peut rater son virage, notamment à cause des plaques au muret qui sont souvent glissantes et qui peuvent empêcher de prendre appui avec les deux pieds pour bien relancer. Il est important que les deux pieds soient sur le mur. Et il y a différentes positions lorsqu'on arrive sur le mur. Par exemple, l'Américaine Natalie Coughlin prend ses virages avec le corps en position latérale, enchaînant ensuite ses ondulations dans cette position avant de se remettre sur le ventre. Jérémy Stravius le fait également comme ça, les deux ayant le point commun d'être des spécialistes de dos. D'autres effectuent la culbute en étant toujours sur le ventre. Par le passé, les spécialistes des virages étaient plus nombreux car il n'y avait pas de limites de distance dans la coulée, ce qui pouvait donner un gros avantage dans la course. Désormais, la coulée est limitée aux 15m. Lochte, Stravius, Coughlin actuellement, Phelps, Thorpe sont ou étaient de grands spécialistes. Les Américains et les Australiens ont été longtemps les meilleurs. Il y a tout un travail à faire en extérieur de tonicité, d'explosivité, qui sert au départ, au virage et dans la coulée."

Une coupure physique et psychologique

"En dos, ce qui diffère avec le crawl, c'est qu'on évalue pas facilement la distance qui sépare du mur", détaille Roxana Maracineanu. "Donc on compte les mouvements à partir des drapeaux des 15m avant de se retourner, puisqu'on a le droit de faire un seul mouvement de bras en crawl avant de basculer. Il faut donc se retourner au bon moment pour que ce mouvement et la vitesse suffisent à arriver à bonne distance pour entamer la rotation. Ensuite, il faut poser les pieds à la bonne hauteur sur le mur pour descendre ensuite vers le fond, dans une trajectoire similaire au plongeon, afin d'effectuer le nombre d'ondulations prévu pour sortir aux 15m.

Lors de sa finale du 100m dos, Jérémy Stravius a rajouté une ondulation, au lieu d'en faire 10 il en a fait 11. Sa tactique était d'entamer son deuxième 50 avec un autre rythme de bras. Or, en sortant de sa coulée, il s'est rendu compte qu'il ne pouvait pas imprimer ce rythme, peut-être à cause de cette ondulation supplémentaire, et du coup, il l'a fait en accélération, pas d'un coup. Et pendant ce temps, l'Américain Grevers avait lui changé son rythme. Lorsqu'il est arrivé au rythme prévu, il ne restait que 15m, c'était trop tard. Ils avaient travaillé le fait de faire un premier 50 relâché en puissance, puis de passer un autre rythme de bras sur le deuxième 50, mais ils n'avaient pas travaillé le moment de décision. Et entre le moment où on prend la décision et où on l'applique, il peut y avoir un laps de temps. Cette décision aurait dû se passer avant le virage. Grevers l'a fait, pas Stravius.

Ce changement de rythme doit être anticipé dans sa tête avant le virage. Ce virage est une coupure physique et psychologique entre deux manières de nager. Il sert de temps mort pour que tout se mette en place dans la tête et dans les mouvements pour arriver à ce changement tactique. Celui qui était très impressionnant dans cet exercice, c'était Michael Phelps. Il arrivait à mettre énormément de puissance dans sa coulée et il rattrapait ainsi son retard sous l'eau. Natalie Coughlin est l'autre référence en la matière."

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