: Reportage Pour avoir leur vignette comme les pros, de plus en plus d'amateurs lancent leur album de club
L’odeur d’un album neuf, l’excitation d’ouvrir un paquet de vignettes, puis le plaisir de s’appliquer à bien les coller dans le cadre prévu… Tout cela exacerbé par le fait de voir figurer ses coéquipiers ou même sa propre photo sur les petites images autocollantes, comme des professionnels. Les plus nostalgiques des albums Panini, et les enfants qui découvrent le concept, participent au développement des albums de vignettes dans les clubs amateurs, souvent dans le but de fédérer les licenciés.
"Nous avons décidé, avec les entraîneurs, de ne distribuer les albums qu’à la fin de l’entraînement, sinon il n’y aurait pas d’entraînement et les filles seraient captivées par leur album". En ce mercredi après-midi de mai à Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine), David Valcke, le président du GPSO 92, ne s’y trompe pas. Les premiers albums de vignettes de ce club de foot 100% féminin, aux 240 licenciées, viennent d’arriver, et toutes les jeunes joueuses se pressent à la buvette à la fin de leur séance pour obtenir le leur. Les parents, présents à proximité, sont aussi mis à contribution, avec leur portefeuille, pour acheter les premiers paquets de vignettes, vendus un euro l’unité.
Pascal, ancien collectionneur de vignettes Panini, venu assister à l’entraînement de sa fille Camille, met la main à la poche sans trop de difficulté : "C’est un plaisir simple de voir sa fille dans ce genre d’album. Je pense que les filles sont super contentes de pouvoir le remplir avec leur photo, celles de leurs amies ou des joueuses des catégories supérieures qui viennent parfois les encadrer". Aussitôt achetés, les paquets sont ouverts avec frénésie par les jeunes joueuses. Luna, qui évolue en U13, a un coup de chance : la première photo qui apparaît est la sienne ! "Je veux les coller tout de suite !", s'exclame-t-elle alors que ses parents préféreraient qu'elle attende le retour au domicile.
Anastasia, joueuse en U11, se voit, quant à elle, offrir cinq pochettes par son père Alexandre. Mais déçue des vignettes obtenues, elle aimerait qu’il en rachète. "Si tu fais de bons entraînements, on verra, lui promet-il. Il y a plus de 130 images à collectionner, ça va me coûter cher cette histoire, il va falloir miser sur les échanges". Le troc, c’est justement ce qui anime les fins d’entraînements de l’équipe seniors loisirs du club, et les conversations sur WhatsApp, pour obtenir les vignettes manquantes. Laure-Hélène a dépensé une trentaine d’euros, mais est en passe de boucler son album : "Ça devient un peu un challenge. Au début j’avais acheté quelques paquets, mais je n’avais pas toutes celles que je voulais, de mes coéquipières, donc ça m’a encouragé à racheter des vignettes, puis à échanger mes doubles".
"Je remarque que l’album marche surtout auprès des petites ou des adultes nostalgiques de leurs collections de vignettes", note David Valcke, le président du club. Les adolescentes se sont un peu moins mobilisées pour les photos et ne sont pas toutes présentes dans l’album. "C’est un premier essai. On voit qu’il y a de l’engouement, c’est très fédérateur, et on recommencera la saison prochaine en prenant des photos dès l’inscription, car c’est assez difficile de rassembler tout le monde pour se faire tirer le portrait", ajoute-t-il.
"Plutôt en province, où il y a davantage un esprit de clocher"
Comme le GPSO 92, de plus en plus de clubs se lancent dans des projets d’album. "Hors année Covid, il y a une hausse constante. L’année dernière, nous avons travaillé avec 200 clubs, et cette saison, environ 300", assure Franck Martel, dirigeant de l’entreprise "L’Album du club", leader en France dans ce domaine. Sa société propose différentes offres selon le nombre de licenciés, et collabore avec les clubs pour le design des albums, avec environ six semaines de délai entre la réception des éléments de la part du club, et la livraison des albums. "Ce sont majoritairement des clubs de foot, mais aussi de hand et de basket, puis de rugby, plutôt en province, où il y a davantage un esprit de clocher, que dans les grandes métropoles", ajoute celui qui a découvert ce concept en Espagne avant de le développer en France.
L’AS Bressols, club de rugby du Tarn-et-Garonne, a lui aussi créé et vendu son album cette saison. "Ça a cartonné ! On avait d’abord commandé 1 500 pochettes de vignettes et on les a vendues en deux jours. Il a fallu en recommander. Au total, on en a vendu environ 6 000, témoigne Thomas Médale, qui a organisé ce projet dans le club. Les enfants étaient, bien sûr, à fond, mais leurs parents étaient aussi sur motivés d’avoir leur enfant dans l’album". Les commerces locaux ont aussi été mis à contribution. "Le bureau de tabac et la supérette ont commercialisé les pochettes et étaient contents d’avoir du passage supplémentaire, d’autant que les stocks se vidaient très rapidement", assure le préposé aux albums.
Et si la motivation ne semblait pas manquer à Bressols, le club tente d’inciter encore un peu plus ses licenciés à compléter leur album de 300 vignettes en organisant un tirage au sort, avec des cadeaux à la clé, pour ceux qui auront réussi à collecter tous les autocollants. "Le prochain cadeau, ce sera un ballon dédicacé par les joueurs du Stade toulousain", promet Thomas Médale.
En plus des quelques centimes collectés sur la vente de chaque pochette, l’AS Bressols a commercialisé des pages de publicité auprès de ses partenaires. Le GPSO 92, lui, a préféré leur offrir l’affichage dans l’album pour les remercier de leur soutien, et ne compte pas réaliser une grande opération financière avec cet album. "Ce n’est pas le but. On voulait surtout marquer le coup pour les 25 ans du club. On a une marge de 15% sur la vente des pochettes, donc si on en vend 1 500 ou 2 000 à un euro, on aura simplement peut-être de quoi organiser un pot de fin d’année", sourit David Valcke. Rien de mieux qu'un barbecue, comme ultime rassemblement de la saison, pour s'échanger les dernières vignettes.
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