Cet article date de plus de neuf ans.

Rolls blanches, père dealer et séjour en prison : Floyd Mayweather, le "meilleur boxeur de l'Histoire"

Alors que son combat contre le Philippin Manny Pacquiao vient d'être conclu, retour sur un parcours qui vaut le détour.

Article rédigé par Pierre Godon
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 9min
Le boxeur Floyd Mayweather fait son entrée dans le Mandalay Bay Events Center de Las Vegas (Nevada) pour un combat contre Carlos Baldomir, le 4 novembre 2006. (STEVE MARCUS / REUTERS)

Six ans que cela traîne. Le combat entre les deux plus grandes stars de la boxe, l'Américain Floyd Mayweather et le Philippin Manny Pacquiao, était dans l'air depuis 2009. Samedi 21 février, c'est fait : "ce sera le plus grand évènement de l'histoire de notre sport", estime, en toute modestie, Mayweather, qui se définit comme "le meilleur boxeur de l'Histoire". La date est déjà connue : le 2 mai 2015, à Las Vegas (Nevada). Le combat pourrait rapporter 250 millions de dollars, établissant un nouveau record. Les deux duettistes se sont mis d'accord sur la répartition des gains : 60/40 pour Mayweather. Faisons plus ample connaissance avec l'Américain, sportif le mieux payé au monde en 2014, avec 104 millions de dollars pour 72 minutes passées sur les rings. 

Trafic de drogue, querelle familiale et coups de fusil

"Je pense que c'est ma grand-mère qui a détecté mon potentiel, confie Mayweather au New York Times (en anglais), en 2006. Quand j'étais petit, je lui ai dit : 'je pense chercher du travail'. Elle m'a répondu : 'pas la peine, continue à boxer'." Floyd Mayweather naît en 1977 dans une famille de boxeurs. Son père, lui aussi prénommé Floyd, est un pugiliste de haut niveau, qui a combattu Sugar Ray Robinson. Malheureusement, le "noble art" ne nourrit pas son homme, et le paternel se reconvertit dans le trafic de drogue. Sa première cliente, c'est sa femme. Son associé, son beau-frère, surnommé "Baboon".

Un jour, Baboon fait irruption dans la maison, un fusil à la main, fermement décidé à mettre un terme à son association. Floyd Senior s'empare de son fils, encore un nourrisson, et le brandit devant lui : "Si tu veux me tuer, tire, mais tu tueras le bébé avec moi !" Sa femme, hystérique, essaie de lui arracher l'enfant des mains. En vain. "Elle faisait ça pour que son frère puisse m'abattre, explique froidement Floyd Sr au Los Angeles Times (en anglais). Mais je n'avais aucune envie de mourir. Je savais que Baboon ne tuerait pas l'enfant. Donc, il a baissé le canon de son arme vers ma jambe, et a fait feu." Blessé, Floyd père ne sera plus jamais le même boxeur. Et ses relations avec son fils resteront durablement marquées par l'évènement.

Floyd Mayweather avant un combat contre Marcos Maidana organisé à Las Vegas (Nevada), le 12 septembre 2014.  (AL BELLO / GETTY IMAGES NORTH AMERICA)

Des seringues d'héroïne dans le jardin

"Ma mère était une junkie qui arrivait à garder son job. Je restais la plupart du temps chez ma grand-mère, jusqu'à ce qu'elle craque et me renvoie chez ma mère. Le week-end, j'allais chez mon père, qui n'était jamais là, explique Mayweather au magazine Rolling Stone. Le seul endroit où son père l'emmène, c'est au gymnase. Entre deux raclées. "Mon père me battait, quoi que je fasse, et même si je ne faisais rien, raconte le boxeur au Guardian (en anglais). Je priais pour qu'arrive le jour, où, adulte, je pourrais me tirer d'ici." A Grand Rapids (Michigan), le petit Floyd retrouve des seringues d'héroïne dans le jardin. Il se rêve un destin, ailleurs. Dès qu'il apprend à écrire, il signe des autographes. Des centaines d'autographes. "Les premiers, il les a distribués aux filles de sa classe alors qu'il avait à peine 8 ans", sourit sa sœur.

La famille Mayweather quitte le Michigan, pour rejoindre le New Jersey. Ils vivent à sept - dont Baboon, le beau-frère - dans une pièce, sans eau chaude et sans chauffage. "Les immeubles sentaient la pisse", se rappelle Mayweather. Trois ans de galère, avant de retourner à Grand Rapids. Floyd Senior purgeant une peine de prison, Floyd Junior passe sous la coupe de son oncle. C'est à ce moment qu'il commence à percer dans la boxe. Il remporte un tournoi espoir, puis se fait voler en demi-finale du tournoi olympique d'Atlanta. 

"Mon père dit qu'il m'a tout appris. Depuis sa prison ?"

Quand Floyd père sort de prison, il redevient naturellement le coach de son fils. Pas longtemps. Le fils l'éjecte deux ans plus tard, pour travailler de nouveau avec son oncle. N'empêche. "Tout ce que vous voyez sur le ring, c'est moi qui lui ai appris", se gargarise son père, qui souligne le fait qu'il l'a entraîné pendant huit ans, dans le Los Angeles Times. Réponse du rejeton : "Mon père a toujours cherché à s'arroger le travail que j'ai accompli, dénonce Mayweather dans Rolling Stone. Il dit qu'il m'a tout appris. Mais d'où, mec ? Depuis la prison ?" La brouille dégénère. Son père va jusqu'à conseiller deux de ses adversaires. Que Mayweather envoie au tapis. Une habitude chez lui.

Floyd Mayweather envoie au tapis Juan Manuel Marquez lors d'un match à Las Vegas (Nevada), le 19 septembre 2009. (STEVE MARCUS / REUTERS)

47 combats plus tard, Floyd Mayweather est toujours invaincu. Au rythme de deux matchs par an, il fait grossir son bas de laine, évalué à 420 millions de dollars. Mayweather, qui n'a jamais engagé de manager-sangsue comme Mike Tyson (qui lui reversait jusqu'à deux tiers des revenus des produits dérivés) est un homme riche. Il aurait 123 millions de dollars sur un seul compte. D'où des folies, qui font les choux gras de la presse à scandale. Par exemple, sa collection de voitures de luxe. Une flotte d'une dizaine de voitures, Bentleys, Rolls, toutes blanches, à Las Vegas. Et les mêmes, toutes noires, dans son pied-à-terre de Miami. Pour son ex-compagne, l'argent l'intéresse plus que la boxe. "C'est ça, sa récompense. Il en est plus fier que ses ceintures de champion du monde. Il adore l'idée de pouvoir sauter dans son jet privé, ou acheter n'importe quelle montre de luxe", explique Josie Harris à Yahoo! (en anglais).

Le jour où Floyd est devenu "Money"

Mayweather a dû batailler pour se faire un nom. Son concurrent Oscar de la Hoya bat tous les records chez le public latino ? Il décide de se créer un personnage. "Money" Mayweather est né. Le principe est simple : étaler sa richesse sur tous les plans, poser avec des liasses de billets, bref, jouer à fond la carte du bling-bling. "Pendant des années, il nous a demandé de le marketer mieux, de mettre en avant la superstar, explique Max Kellerman, le spécialiste boxe de la chaîne câblée HBO, dans Rolling Stone. Il en a eu marre d'attendre, et s'est marketé tout seul. C'était l'une des meilleures opérations commerciales que j'ai jamais vues".

"Money" Mayweather se réveille parfois la nuit, en sueur, rêvant que sa carrière s'est brutalement arrêtée et qu'il n'a plus un sou, confie son assistant au Los Angeles Times (en anglais). "J'ai perdu hier soir", lâche Mayweather, en larmes, dans son lit. "Non, tu as juste rêvé."

Mayweather, les femmes et les voitures

Le boxeur clinquant a une sacrée zone d'ombre. En douze ans, il a été impliqué dans sept affaires de violences conjugales, sur cinq femmes différentes. La mère de sa fille aînée ? Frappée avec une portière de voiture. Le cas le plus emblématique : Josie Harris, menacée de mort, une nuit de septembre 2010. Mayweather et Harris ne sont plus ensemble, le boxeur s'est même trouvé une nouvelle petite amie, mais ne supporte pas l'idée de savoir son ex fricoter avec un joueur de NBA. Il découvre des textos coquins sur son téléphone et explose. Il la frappe violemment à l'arrière du crâne - des coups qui peuvent entraîner la mort, les boxeurs le savent bien, et qui ne laissent pas de trace visible. Alertés par le bruit, les enfants se lèvent. D'après le rapport de police, dévoilé par Deadspin (en anglais), Mayweather a hurlé qu'il "leur exploserait le cul s'ils appelaient les flics". Un des enfants, Koraun, 9 ans, brave l'interdiction et alerte la police. "Je serais morte si la police n'était pas venue", affirme Harris. Alors qu'il risque 34 ans de prison, Mayweather plaide coupable et négocie une peine de 90 jours. Il ne passera que deux mois en prison, en réussissant même à faire décaler l'exécution de sa peine pour organiser un dernier combat. 

Le boxeur se rend-il compte de ses actes ? Pressé sur CNN de s'expliquer, il grommelle : "Personne n'est parfait." Dans la presse sportive, on évacue pudiquement la question. Finalement, c'est dans un documentaire sur sa vie qu'il autoproduit pour la chaîne câblée HBO qu'il livre sa vision de la femme : "En ce qui concerne les femmes... Même si vous ne pouvez pas conduire dix voitures en même temps, il y a des gens qui ont dix voitures. Ce qui veut dire qu'on peut entretenir dix voitures. Je pense que la même chose devrait s'appliquer pour les femmes. Si vous pouvez en entretenir vingt, alors vous devriez en avoir vingt." Le pense-t-il vraiment ou est-ce encore le personnage de "Money" Mayweather qui fait de l'esbroufe ? "Les trucs que je dis face caméra, c'est du business", crânait-il dans Rolling Stone.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.