Coupe du monde de rugby : entre "six semaines" et "trois mois" d'indisponibilité, des spécialistes pessimistes sur un retour d'Antoine Dupont
L'inquiétude grandit. Le diagnostic sur la blessure d'Antoine Dupont n'a pas rassuré grand monde, vendredi 22 septembre, au lendemain du choc tête contre tête qu'a subi le capitaine du XV de France à l'occasion de la victoire record des Bleus contre la Namibie. Le demi de mêlée du Stade toulousain "a subi une fracture maxillo-zygomatique. Un avis chirurgical spécialisé a été demandé pour définir précisément la durée de l’indisponibilité. Antoine Dupont demeure avec le groupe France", a indiqué l'encadrement de l'équipe de France dans un bref communiqué, vendredi.
Selon différents spécialistes contactés par francenfo: sport, une fracture maxillo-zygomatique est un terme médical large, qui ne permet pas encore de poser un diagnostic clair et définitif. Roger Salamon, président du comité médical de la Fédération française de rugby (FFR), a confirmé à franceinfo: sport qu'Antoine Dupont a subi "plusieurs fractures", "a priori seulement osseuses", sans risque, en l'état, d'atteinte oculaire. L'international tricolore de 26 ans devrait, toujours selon Roger Salamon et d'après les données médicales à sa disposition, être "opéré à Toulouse". Le maître à jouer tricolore pourrait même retrouver le terrain en fin de Coupe du monde, pour la demi-finale (20 ou 21 octobre) ou la finale (28 octobre). Le président du Stade toulousain, Didier Lacroix, a d'ailleurs affirmé à l'AFP qu'Antoine Dupont retournait à Toulouse pour consulter des spécialistes.
Un retour à la compétition jugé "déraisonnable"
Des experts interrogés sont eux un peu moins optimistes sur un possible retour du joueur avant la fin du Mondial. "Si c’est suffisamment stable et qu’il n’y a pas besoin d’opérer, il faut quatre semaines d’immobilisation minimum", a expliqué le chirurgien maxillo-facial, François Morel, dans un entretien accordé au Parisien. Le médecin précise qu'à l’issue des quatre semaines, Antoine Dupont "pourrait jouer s’il ne fait pas n’importe quoi et avec une protection comme un casque". En revanche, si la fracture nécessite une opération, "il faut attendre quatre ou cinq jours pour que ça dégonfle avant d’opérer puis laisser passer au moins quatre semaines." Faire rejouer Antoine Dupont ne serait alors "pas raisonnable" selon lui.
Une possible reprise de la compétition semble également déraisonnable pour Martine Duclos, cheffe du service de médecine du sport au CHU de Clermont-Ferrand. "Déjà, il a subi une commotion cérébrale, il est donc en arrêt pour plusieurs jours. Ensuite, il faut que la fracture se consolide, et donc qu'il ne reçoive aucun choc au niveau de la tête." Pour consolider une telle fracture, un délai de "six semaines à deux mois" est nécessaire selon Martine Duclos. Par ailleurs, pour cette dernière, la reprise de la compétition avec un casque n'est pas une protection "suffisante" puisque celui-ci "ne protège pas la mâchoire."
Une zone touchée très complexe
Pour l'heure, il est encore trop tôt pour arrêter un diagnostic définitif. Ce qui est certain en revanche, c'est que la "région anatomique concernée est très complexe, très sensible sur le plan de la douleur, et la sensibilité", explique le professeur Jean Chazal, neurochirurgien à Clermont-Ferrand et spécialiste d'anatomie maxillo-faciale. Il faut d'abord attendre que "l'hématome se résorbe pour en savoir plus", précise l'un des premiers à avoir alerté sur le danger de la violence des chocs dans le sport. Il faut aussi savoir "si la fracture a provoqué un déplacement du plancher de l'orbite oculaire", ajoute celui qui compare le choc reçu par Antoine Dupont à "un uppercut à main nu d'un boxeur professionnel d'au moins 100 kilos".
"Même si tout va bien, qu'il n'a pas besoin d'opération, ou qu'une opération se passe bien, il faut attendre la consolidation, et cela demande au moins trois mois", tranche même Jean Chazal, qui juge "déraisonnable" de voir Antoine Dupont fouler de nouveau le terrain lors de ce Mondial.
"Quand un choc à la tête intervient, qui plus est au niveau du massif facial, avec une fracture, il y a un principe de précaution qui se met en place. On met le patient au repos et on réévalue la blessure trois mois après les soins."
Jean Chazal, neurochirurgien et spécialiste d'anatomie maxillo-facialeà franceinfo: sport
"D'après les infos que j'ai [sans consulter le dossier du joueur], et pour une fracture maxillo-faciale qui justifie une hospitalisation, des explorations en imagerie, et un avis chirurgical d'un spécialiste, cela veut dire qu'il s'agit d'un traumatisme majeur de la face, estime le professeur. Je ne vois pas comment on peut reprendre une Coupe du monde dans les six-huit semaines à venir après une lésion, un choc pareil."
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